Nom de la loi

Loi Cornelia concernant le mariage et la σωφροσύνη

Date

82 ou 81 av. J.-C.

Rogator

L. Cornelius Sulla

Thèmes

Sources

Plut., Comp. Lys. Sull., 3, 3
ὁ δὲ οὔτε νέος ὢν περὶ τὰς ἐπιθυμίας ἐμετρίαζε διὰ τὴν πενίαν οὔτε γηράσας διὰ τὴν ἡλικίαν, ἀλλὰ τοὺς περὶ γάμων καὶ σωφροσύνης εἰσηγεῖτο νόμους τοῖς πολίταις αὐτὸς ἐρῶν καὶ μοιχεύων, ὥς φησι Σαλούστιος.

Bibliographie

  • VOIGT, M., « Ueber die lex Cornelia sumtuaria », BSG , 42, 1890, 244-279 (245-246, 271-273, 278-279)
  • LANGE, RA, 23, 665 ; 32, 166
  • MOMMSEN, Strafr., 691 = Dr. pén., 417
  • ROTONDI, LPR, 359-360
  • MANFREDINI, A., Contributi allo studio dell' iniuria in età repubblicana, Milan, 1977, 229 n. 30
  • PUGLIESE, G., « Linee generali dell’evoluzione del diritto penale pubblico durante il principato », ANRW , 2, 14, 1982, 731
  • BAUMAN, R. A., « The Rape of Lucretia. Quod metus causa and the Criminal Law », Latomus 52, 1993, 563-564
  • RIZZELLI, Lex Iulia, 270-272
  • SANTALUCIA, B., Diritto e processo penale nell’antica Roma2 , Milan, 1998, 202
  • FAYER, C., La familia romana : aspetti giuridici ed antiquari. Parte terza, Concubinato, divorzo, adulterio, Rome, 2005, 215

Commentaire

Le dossier concernant cette loi, qui concerne les modalités de la répression de l’adultère avant la lex Iulia de adulteriis coercendis (voir Loi n° 432), repose entièrement sur l’exégèse d’un texte de Plut. Une intervention législative de Sulla dans le domaine du mariage et de la σωφροσύνη est en effet attestée par Plut., citant apparemment pour source Sall., probablement dans une allusion rétrospective faite par celui-ci à la dictature de Sulla dans un passage des Hist. (Bauman, 564 ; voir effectivement Sall., Hist., 1, 58Mox tanta flagitia in tali uiro pudet dicere. et Sall., Hist, 1, 60Insanum aliter sua sententia, atque aliorum mulierum …, et le commentaire de Maurenbrecher), mais la référence faite par Plut. à Sall. pouvait ne concerner que les mœurs dissolues de Sulla, et non une législation due à ce dernier. Le pluriel τοὺς περὶ γάμων καὶ σωφροσύνης νόμους semble impliquer plutôt une ou des lois sur le mariage et une ou des lois distinctes sur la σωφροσύνη que des lois traitant chacune les deux matières associées, mais on ne peut guère fonder de certitude sur les formulations de Plut. Dans Plut., Comp. Lys. Sull., 3,8 Σύλλας μὲν γὰρ ἀκόλαστος ὢν καὶ πολυτελὴς ἐσωφρόνιζε τοὺς πολίτας, Λύσανδρος δ᾽ ὧν αὐτὸς ἀπείχετο παθῶν ἐνέπλησε τὴν πόλιν, ὥστε ἁμαρτάνειν τὸν μὲν αὐτὸν ὄντα χείρονα τῶν ἰδίων νόμων, τὸν δὲ αὑτοῦ χείρονας ἀπεργαζόμενον τοὺς πολίτας., le pluriel τῶν ἰδίῶν νόμῶν doit faire référence à la loi sur le mariage et à la loi somptuaire (la lex Cornelia sumptuaria, voir Loi n° 163), puisqu’il mentionne deux traits de caractère de Sulla, ἀκόλαστος et πολυτελής.

On considère en général que σωφροσύνη concerne les comportements sexuels (Bauman, 564, n. 32, rapproche les termes περὶ γάμων καὶ σωφροσύνης de la formulation de Suet., Aug., 34, 1Leges retractauit et quasdam ex integro sanxit, ut sumptuariam et de adulteriis et de pudicitia, de ambitu, de maritandis ordinibus. ,de adulteriis et de pudicitia, à propos de la législation d’Auguste), mais on peut considérer que σωφροσύνη correspond plutôt à temperantia qu’à pudicitia, et renvoie donc à une ou des lois somptuaires (dont la lex Cornelia sumptuaria).

La nature de la loi concernant le mariage est discutée : bien que Plut. souligne le contraste entre la législation de Sulla et les adultères dont il se rendit coupable (αὐτὸς ἐρῶν καὶ μοιχεύων), une loi spécifique réprimant l’adultère est peu probable, malgré Mommsen et Lange (contra, Kunkel, RE, 24, 1963, s. u. quaestio 1, 745, remarquant qu’aucune quaestio traitant de l’adultère n’est attestée avant Auguste ; dans le même sens, Pugliese). L’hypothèse d’une loi de Sulla réprimant l’adultère a été remise en avant par Bauman, qui se fonde sur les notices de Suet., Aug., 34, 1, cité supra, et de Paul., Coll., 4, 2, 2Et quidem primum caput legis [Iuliae de adulteris] prioribus legibus pluribus obrogat., concernant la législation antérieure à Auguste, mais elle se heurte toujours au fait qu’aucune procédure publique d’adultère n’est attestée avant Auguste (voir la mise au point détaillée de Rizzelli, 270-272, concluant qu’aucune loi n’établissait de tribunal permanent réprimant l’adultère avant Auguste ; cf. Fayer, 215, refusant de considérer la notice de Plut. comme attestant une loi de Sulla). On pourrait même considérer que la remarque de Val. Max., 6, 1, 13Sed ut eos quoque, qui in uindicanda pudicitia dolore suo pro publica lege usi sunt, strictim percurram, Sempronius Musca C. Gellium deprehensum in adulterio flagellis cecidit, C. Memmius L. Octauium similiter deprehensum pernis contudit, Carbo Attienus a Vibieno, item Pontius a P. Cer<en>nio deprehensi castrati sunt. Cn. etiam Furium Brocchum qui deprehenderat familiae stuprandum obiecit. Quibus irae suae indulsisse fraudi non fuit., citant trois maris ayant exercé au Ier s. av. J.-C., pro publica lege, une vengeance privée contre les amants de leur femme surpris en flagrant délit, oppose la situation en vigueur à cette époque (absence de loi) à celle que connaissait Val. Max. (l’adultère, délit public réprimé par la loi d’Auguste ; voir, apparemment en sens contraire, Rizzelli, 271).

Voigt rapportait les mesures de Sulla concernant l’adultère (et la pédérastie) à la loi Cornelia sumptuaria (voir notice n° 163) ; contra, S. Perozzi, c. r., RISG, 11, 1891, 263, soulignant l’hétérogénéité des matières. La formulation de Suet., Aug., 34, 1, pourrait toutefois constituer un léger argument dans ce sens (le système de coordination semble rapporter sumptuariam et de adulteriis et de pudicitia à une unique mesure). Manfredini rapporte ces mesures à la loi Cornelia concernant l’iniuria (voir notice n° 134), en se fondant sur l’existence d'une clause édictale de adtemptata pudicitia offrant une action pour injure (229 n. 30, cf. 188) ; le lien qu’il établit en outre, avec prudence, entre cette même loi et l’adultère (Papin., 1 adult., D., 48, 5, 23, 2Ius occidendi patri conceditur domi suae, licet ibi filia non habitat, uel in domo generi : sed domus et pro domicilio accipienda est, ut in lege Cornelia de iniuriis. atteste que la définition de domus établie par la lex Cornelia de iniuriis était valable dans les procès d'adultère intentés en vertu de la loi Julia) est trop ténu pour permettre de rapporter à une loi de iniuriis la répression de l’adultère.

Pour tenter d’accorder la notice de Plut. et l’absence de cas attesté d’une loi de Sulla réprimant l’adultère, Pugliese suppose que Plut. ferait référence à une loi présentée mais non votée (hypothèse reposant peut-être sur une interprétation restrictive de εἰσηγεῖτο, ou sur l’idée d’une incompréhension par Plut. d’une source latine employant lex par anticipation au sens de rogatio).

L’existence d’une loi de Sulla concernant le mariage est possible, mais son contenu nous échappe (Santalucia, 202 n. 52). Il est cependant exclu qu’elle ait fait de l’adultère un délit réprimé par une quaestio.

Comment citer cette notice

Philippe Moreau. "Loi Cornelia concernant le mariage et la σωφροσύνη", dans Lepor. Leges Populi Romani, sous la dir. de Jean-Louis Ferrary et de Philippe Moreau. [En ligne]. Paris:IRHT-TELMA, 2007. URL : http://www.cn-telma.fr/lepor/notice124/. Date de mise à jour :09/01/19 .