Sources

Commentaire

De même qu’en l’honneur de César le nom du mois Quintilis avait été changé en Iulius (notice n° 35), en l’honneur d’Auguste le mois suivant, Sextilis, vit son nom changé en Augustus. Mais il est difficile de reconstituer la procédure suivie et d’en dater les étapes, en raison des divergences entre les sources.

D’un côté, en effet, Macrobe donne le texte d’un s.c., et ajoute qu’un plébiscite sur le même sujet fut voté sur l’initiative du tribun Sex. Pacuvius (plebiscitum factum ob eam rem Sexto Pacuuio tribuno plebem rogante), ce qui laisse penser que le s.c. précéda le vote populaire. Le rogator est certainement le tribun dont Dion Cassius cite les initiatives spectaculaires (la fameuse deuotio à Auguste, notamment), au début de 27, comme exemplaires de l’accumulation de flatteries qui traduit le nouveau régime (Dio, 53, 20, 2-32. χαριζομένων δ᾽ αὐτῷ καθ᾽ ὑπερβολὴν ἄλλων ἄλλα, Σέξτος τις Πακούουιος, ὡς δ᾽ ἕτεροι λέγουσιν Ἀπούδιος, πάντας ἐξενίκησεν· ἐν γὰρ τῷ συνεδρίῳ ἑαυτόν τέ οἱ τὸν τῶν Ἰβήρων τρόπον καθωσίωσε καὶ τοῖς ἄλλοις συνεβούλευε τοῦτο ποιῆσαι. 3. ἐπειδή τε ὁ Αὔγουστος ἐμποδών οἱ ἐγένετο, πρός τε τὸ πλῆθος τὸ προσεστὸς ἐξεπήδησεν (ἐδημάρχει γάρ) καὶ ἐκείνους τε καὶ μετὰ ταῦτα καὶ τοὺς λοιπούς, κατά τε τὰς ὁδοὺς καὶ κατὰ τοὺς στενωποὺς περινοστήσας, καθιερῶσαί σφας τῷ Αὐγούστῳ κατηνάγκασεν·). De même l’abréviateur de Tite-Live (Per. Liv., 134C. Caesar rebus conpositis et omnibus provinciis in certam formam redactis Augustus quoque cognominatus est ; et mensis Sextilis in honorem eius appellatus est) évoque le changement de nom du mois immédiatement après l’attribution à Octavien du surnom Augustus, ce qui ramène à janvier 27, et les attendus du s.c. dont Macrobe cite le texte font pencher aussi pour cette date : le mois Sextilis rappelait une série de succès qui sont tous antérieurs à 27 (le premier consulat et le ralliement des légions du Janicule en 43, la rédaction de l’Égypte en 30, le triple triomphe en 29, la proclamation de la fin des guerres civiles en 28).

Mais, d’un autre côté, Censorinus, (Cens., 22, 16 Qui autem Sextilis fuerat ex sc C. Marcio Censorino C. Asinio Gallo cons. in Augusti honorem dictus est Augustus anno, Augusti uicessimo, quae nomina etiam nunc ad hanc permanent memoriam) , qui ne mentionne que le s.c., le date explicitement (par les noms des consuls) de 8 av. J.-C. ; Dion Cassius, (Dio, 56, 6, 6αὐτὸς γὰρ ἐκεῖνα μὲν οὐκ ἠθέλησε πέμψαι, ἐς δὲ δὴ τὰ γενέθλια ἱπποδρομίαν ἀίδιον ἔλαβε. τά τε τοῦ πωμηρίου ὅρια ἐπηύξησε, καὶ τὸν [μὲν] μῆνα τὸν Σεξτίλιον ἐπικαλούμενον Αὔγουστον ἀντωνόμασεcite) la mesure parmi les décisions prises par Auguste cette année-là, à son retour de Germanie ; et Suétone, (Suet., Aug., 31,12 Annum a Diuo Iulio ordinatum, sed postea neglegentia conturbatum atque confusum, rursus ad pristinam rationem redegit ; in cuius ordinatione Sextilem mensem e suo cognomine nuncupauit magis quam Septembrem quo erat natus, quod hoc sibi et primus consulatus et insignes uictoriae optigissent) la mentionne en même temps que la correction apportée par Auguste au calendrier julien, qui se place la même année. De plus, l’hésitation de Dion sur le nom du tribun (« un certain Sextus Pacuuius, ou, selon d’autres, Apudius » – que Cichorius a corrigé en Ampudius) jette un doute (cf. PIR VI (P), 1998, n° 51).

Parmi les solutions proposées par les modernes pour surmonter cette contradiction, celle de Fitzler et Seeck (à laquelle se sont rangés Scott et Manuwald), pour qui le s.c. et le pl.sc. dateraient de 27, et auraient été inclus ensuite dans l’édit pontifical par lequel Auguste imposait en 8 la correction du calendrier julien, paraît bien plus plausible que celle de Bosworth (suivi en partie par Rich), pour qui le s.c. daterait de 8 et résulterait d’une motion de Tibère, et le tribun rogator du pl.sc. serait le fils homonyme de celui de 27 (cette hypothèse prosopographique remonte à Hoffmann). Scheid, considérant que la formulation de Macrobe n’oblige pas à lier chronologiquement le plébiscite et le s.c., propose de voir dans le s.c., voté en 8, la reprise du plébiscite de 27, dont Auguste aurait mis en sommeil l’application en raison de ses difficiles relations avec le grand pontife Lépide, dont la consultation était nécessaire sur les questions de calendrier.

Quelle que soit la date du vote, il demeure que le rogator fut l’instrument de la volonté d’Auguste, qui préféra août, mois de ses victoires fondatrices, à septembre, mois de sa naissance (Suet. ; Dio), ce qui avait été au contraire le choix effectué pour César.