Description
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Yves, évêque de Chartres
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Mathilde, reine d’Angleterre
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après 1090 - avant 1116
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n.c.
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Lettre
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Ivo, humilis Ecclesiae Carnotensis minister, Mathildi(1), Anglorum reginae, cum regina angelorum in coelo regnare
Cum omne datum non tantum ex sua quantitate quantum ex dantis affectu aestimandum sit, campanas quas beatae et perpetuae Virgini dedistis, tum pro vestra devotione, tum pro sua delectabili sonoritate vice ipsius perpetuae Virginis gratanter suscepimus et in loco celebri ad auditum confluentium populorum collocari fecimus(2). Quae quotiens ad significationem certarum horarum moventur, ita auditorum mentes mulcent ut vestra memoria in singulorum cordibus renovetur. Nec leviter est aestimanda talis memoria, quae tunc reflorescit, quando illa singularis hostia, pro nobis redimendis in ara crucis oblata, per novi sacerdotii ministros in Domini mensa quotidie consecratur, quando hymnis coelestibus, tanquam vitulis labiorum(3), Deus a fidelibus honorificatur(a), quando a peccatoribus rea pectora tundentibus Deus offensus sacrificio contribulati spiritus(4) ad misericordiam inclinatur. Horum bonorum procul dubio participes exstant qui Dei ministris bona quibus abundant et istis desunt pro ejus amore et honore subministrant. Ita quod deerat inopiae nostrae, copia vestra benigne ministrare jam coepit et se suppleturam in supplendis vel reficiendis(b) Ecclesiae nostrae tectis uberius repromisit(5).
Sic antiquus Dei populus(6) ad usum tabernaculi, jubente Domino, per Moysem offerebat aurum, argentum et aes, bissum quoque et coccum, purpuram et iacinctum, mulieres etiam gemmas et inaures, quibus tunc visibiliter vestimentum pontificis et tabernaculum ornarentur et ministrorum Novi Testamenti sancti mores designarentur. Quibus autem ista pretiosa deerant pilos caprarum offerebant, quibus vela cilicina fierent ad conservandum splendorem interiorum ornamentorum, ne pulvere sordescerent(c) vel imbribus putrefierent. Hanc formam pietatis sequetur excellentia vestra, cum ad utensilia vel sarta tecta domus Dei reficienda, in quibus voluerit vel quantum voluerit, suppeditabit necessaria. Pro quibus omnibus illum exspectate procul dubio retributorem quem talium didicistis fuisse praeceptorem. Valete.
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honoratur M
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restituendis éd.
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sorderent AMAu.
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Voir lettre 107.
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Les clochers que l'on voit aujourd'hui à la cathédrale de Chartres ne seront construits qu'après 1134 (1138 et 1142, d'après A. Erlande-Brandenburg,
Architecture en région centre, dir. J.-M. Pérouse de Montclos, 1988, p. 275). Il y avait sans doute auparavant une construction ; la suite de la lettre prouve que les cloches ont été suspendues puisqu'elles sonnent et le nécrologe attribue à la reine Adèle la construction d'un clocher :que fecit huic ecclesie jussit fieri campanarium quod est super ecclesiam preciosum et bonum, voir lettre 118. Les cloches ont fondu dans l'incendie de 1194,Poème des miracles de la Vierge(1210), traduit par mestre Jehan le Marchant (1252), éd. Antoine Thomas, cité par L. Merlet,Lettres, p. 259.
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D'après Os. 14, 3
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Ps. 50, 19.
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Promesse tenue, d'après le nécrologe de l'Église de Chartres, en 1118 :
ObiitMathildis, Anglorum regina, quae hanc ecclesiam dilectionis privilegio amplectens et venerans, plumbeo tegmine decoravit et praeter alia multa beneficia casulam ei deauratam et XL libras nummorum ad usum fratrum donavit. Cartulaire de Notre-Dame de Chartres, t. 3, p. 204. Sur les dons des rois, voir aussi lettre 118.
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D'après Ex. 35, 5-9. Sur la signification symbolique du tabernacle, voir le traité de Geoffroy de Vendôme, n.°70, éd. citée (op. 7), d'après Origène, Homélies 9 et 13, Sur l'Exode, éd. M. Borret, Sources chrétiennes, t. 321, p. 291, 301, 377-397. Bède, De tabernaculo, l. 2, éd. D. Hurst, CCSL 119A, p. 44.
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a. Avranches, BM 243, 81
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 55rv
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T. Troyes, BM 1924, 117v-118
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Au. Auxerre, BM 69, 55rv
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Yves, humble ministre de l'Église de Chartres, à Mathilde, reine des Angles, régner dans le ciel avec la reine des anges.
Comme tout don doit être estimé non tant par son importance que par l'affection du donateur, les cloches que vous avez données à la Vierge bienheureuse et immortelle, nous les avons, au nom de cette même Vierge immortelle, reçues avec gratitude autant pour votre dévotion que pour leur sonorité agréable et nous les avons fait placer dans un lieu fréquenté pour que les foules qui y affluent les entendent. Toutes les fois qu'elles s'ébranlent pour annoncer des heures précises, elles charment les esprits des auditeurs si bien que votre mémoire est ravivée dans le cœur de chacun. Et il ne faut pas juger de peu de prix une telle mémoire, qui refleurit au moment où cette hostie singulière, offerte pour nous racheter sur l'autel de la croix, est consacrée quotidiennement à la table du Seigneur par les ministres d'un nouveau sacerdoce, au moment où par les hymnes célestes, comme par les offrandes des lèvres, Dieu est honoré des fidèles, au moment où Dieu, offensé par les pécheurs qui frappent leurs poitrines coupables, penche vers la miséricorde grâce au sacrifice d'un esprit accablé. Sans nul doute, ils se trouvent participer à ces biens, ceux qui procurent aux ministres de Dieu, pour son amour et son honneur, les biens dont ils abondent et dont ceux-là manquent. Ainsi, ce qui manquait à notre pauvreté, votre libéralité a déjà entrepris avec bienveillance de le procurer et a promis qu'elle le compléterait plus généreusement encore en complétant ou en réparant les toitures de notre église.
Ainsi l'antique peuple de Dieu, sur ordre du Seigneur, par la bouche de Moïse offrait pour l'usage du tabernacle l'or, l'argent et l'airain, ainsi que le lin et l'écarlate, la pourpre et l'hyacinthe, et les femmes aussi offraient pierres précieuses et boucles d'oreilles, pour orner alors de manière visible le vêtement du pontife et le tabernacle et pour symboliser les mœurs saintes des ministres du Nouveau Testament. Et ceux qui manquaient de ces choses précieuses offraient des peaux de chèvres pour faire des voiles de poil de chèvre afin de conserver la splendeur des ornements intérieurs, de peur qu'ils ne soient souillés par la poussière ou pourris par les pluies. Votre excellence suivra cette forme de piété quand elle fournira le nécessaire pour les objets de culte ou pour la réfection des toits de la maison de Dieu, en ce qu'elle voudra et autant qu'elle le voudra. Pour tout ceci attendez sans le moindre doute la rétribution de celui qui, vous le savez, a prescrit de telles choses. Adieu.