Description
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Yves, évêque de Chartres
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Daimbert, archevêque de Sens
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après 1103 - avant 1104
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[1103-1104]
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Lettre
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Daimberto, Dei gratia Senonensium archiepiscopo Ivo, humilis Carnotensis Ecclesiae minister, salutem et obsequium.
De pacto conjugali quod factum est inter duos nobiles, ita ut qui filiam habebat juraverit se eam traditurum uni de filiis alterius nobilis cui vellet cum ad nubiles annos virgo pervenisset, hoc paternitati vestrae respondeo quod et natura disposuit et lex tam ecclesiastica quam mundana firmavit quia quorum per conjugalem copulam unum debet fieri corpus eorumdem pariter animorum debet esse consensus. Quidquid ergo pater, nesciente virgine, juraverit, cum ad annos rationales perducta est, nisi ipsa virgo consentiat, etiam vivente patre, secundum leges irritum erit. Unde papa Nicolaus Hincmaro scribit episcopo(1) : « Sufficiat(a) secundum leges solus eorum consensus de quorum conjunctionibus agitur. Qui consensus solus in nuptiis si forte defuerit, caetera omnia etiam cum ipso coitu(b) frustrantur, Johanne Chrysostomo magno doctore attestante, qui ait(2) : “Matrimonium non facit coitus sed voluntas.” ». Inde etiam in legibus Romanis Justiniani imperatoris ita habetur(3) : « Sponsalia sicut nuptiae consensu fiunt contrahentium. Et ideo sicut in nuptiis, ita sponsalibus filiamfamilias consentire oportet. » Et alibi(4) : « A primordio aetatis sponsalia effici(c) possunt, si modo ab utraque persona id fieri intelligatur, id est si non minores sint quam duodecim annis. » Hoc de proposita inquisitione(d) sentio et hujusmodi controversiam, si ad aures meas pervenerit, tali ratione diffinio(e).
De caetero notum facio paternitati vestrae quod cum nulla a me illata esset injuria vel nulla denegata justitia, cum etiam respectus esset inter me et comitissam, mediante Cantuariensi(f) archiepiscopo(5), respectus etiam inter clericos et comitissam, mediante apostolico(6), Guillelmus(g) comitissae filius(7), in mortem clericorum Carnotensium et perniciem meam et omnium ad nos pertinentium, coram altari beatae Mariae conjuraverit et omnes cives qui sub banno sunt ad eamdem conjurationem compulerit, nisi voluntati servorum suorum cedamus, et sibi usurpet(h) violentia quod sola debet obtinere gratia. Ego itaque, hoc Herodianum juramentum audiens(8), nolui postea in praesentia hujusmodi conjuratorum divina sacramenta tractare nec super eos benedictionem episcopalem more solito dare. Promeritum tamen anathema distuli super eos fundere, donec consilium vestrae paternitatis et collegarum nostrorum super hoc acciperem et, consilio et auxilio multorum fretus, debita eos censura a funesta conspiratione revocarem. Cum ergo ad vos remisero(i), volo vos esse praemunitum ut consilium et auxilium quod vobis sit honestum et nobis utile(9) ad manum habeatis et naufragantibus ante submersionem manum extendere(10) festinetis. Valete.
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Sufficiat s leges s e c de quorum c a et c. Require retro prope invenies T, sufficiat per leges éd.
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coitu celebrata J
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fieri JT
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quaestione éd.
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Vale, fin de la lettre JT
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Cantuariensi archiepiscopo ... mediante om.éd., Merlet, raj. A
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Guillelminus Au
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usurpent AMAu
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misero M.
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Nicolas,
ep. ad Hincmarum,ad consulta Bulgarorum(866, Mansi XV, 403), c. 3, citant Jean Chrysostome (pseudo-Chrysostome),Opus imperfectum in Matthaeum, homélie 32 ou 33. Yves,Décret8, 17 ;Panormie6, 107 (Gratien, 27, 2, 1-2). Voir aussi lettres 99, 148, 242, 243. B. Basdevant-Gaudemet, « Le mariage d'après la correspondance d'Yves de Chartres »,Revue historique de droit français et étranger, t. 61, 1983, p. 206.
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La citation de Jean Chrysostome est tirée de la lettre de Nicolas, note
supra.
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Digeste, 23, 1, 11. Yves,Décret8, 21 et 16, 182 ;Panormie6, 12. Voir lettre 167.
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Digeste, 23, 1, 14, mais avec le chiffre de sept ans. Yves,Décret8, 22 et 16, 183 ;Panormie6, 13. L'âge est de 12 ans pour les filles et 14 pour les garçons dans leCode, 5, 4, 24.
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Anselme de Cantorbéry, 1093-1109. Voir lettre 127.
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Richard d'Albano, légat en France depuis 1102, voir lettre 127.
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Guillaume, fils aîné du comte de Blois Étienne-Henri et d'Adèle. Éphémère successeur d'Étienne en 1103, après qu'il eut été jugé incapable de succéder à son père on lui donna en apanage le domaine de Sours, A. Chédeville,
Chartres et ses campagnes, p. 261, n. 76. Il épousa Agnès, fille de Gilon de Sully d'après Orderic Vital, l. 5, ch. 11 et l. 11, ch. 4, éd. A. Le Prévost, t 2, p. 393-394 et t. 4, p. 188. Voir aussi lettre 136.
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Voir lettre 71.
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Quatre des termes de la lettre de Fulbert de Chartres au duc d'Aquitaine sur le serment de fidélité, l. 51, éd. Fr. Behrends, p. 90-93. Yves,
Décret12, 76 ;Panormie8, 122 (Gratien 22, 5, 18). G. et G. Giordanengo, « Autour de la lettre de Fulbert de Chartres à Guillaume d'Aquitaine, 1021 »,Mélanges offerts à Pierrette Paravy, Grenoble, 2009, p. 243-251.
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D'après Matth. 14, 31.
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a. Avranches, BM 243, 78v-79
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 53v-54
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J. Jesus College, Q.G.5, 29
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T. Troyes, BM 1924, 70v
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Au. Auxerre, BM 69, 52-53
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À Daimbert, par la grâce de Dieu archevêque des Sénonais, Yves, humble ministre de l'Église de Chartres, salut et empressement.
À propos du pacte conjugal qui a été fait entre deux nobles, à savoir que celui qui avait une fille a juré qu'il la donnerait à un des fils de l'autre noble, celui qu'il voudrait quand la jeune fille serait parvenue à l'âge nubile, voici ce que je réponds à votre paternité : la nature a disposé et la loi tant ecclésiastique que laïque a confirmé qu'entre ceux dont le corps doit devenir un par le lien conjugal l'accord de leurs âmes doit également exister. Donc ce que le père a juré, tandis que la jeune fille l'ignorait, si cette même jeune fille le refuse quand elle est arrivée à l'âge de raison, deviendra nul selon les lois, même du vivant de son père. Ainsi le pape Nicolas écrit à l'évêque Hincmar : « Que suffise selon les lois le seul consentement de ceux des unions de qui il s'agit. » Si par hasard ce seul consentement manque dans les noces, toutes les autres choses, l'union charnelle comprise, sont rendues inutiles, comme le grand docteur Jean Chrysostome l'atteste en disant : « Ce n'est pas l'union charnelle qui fait le mariage, mais la volonté. » Et il est dit aussi dans les lois romaines de l'empereur Justinien : « Les fiançailles comme les noces se font avec l'accord des contractants. Et ainsi, tant dans les noces que dans les fiançailles, il faut que les filles de famille soient consentantes. » Et ailleurs : « Les fiançailles peuvent se faire dès le plus jeune âge, à condition que chaque personne comprenne ce qui se fait, c'est-à-dire si elles n'ont pas moins de douze ans. » Tel est mon avis sur la question posée et je conclus une controverse de ce genre avec un tel raisonnement si elle parvient à mes oreilles.
Par ailleurs, je fais savoir à votre paternité que, alors que je n'ai commis aucune injustice ni dénié aucune justice, alors qu'il y avait même un répit entre la comtesse et moi avec la médiation de l'archevêque de Cantorbéry, entre les clercs et la comtesse avec la médiation du légat apostolique, Guillaume, le fils de la comtesse, a, pour la mort des clercs de Chartres, juré devant l'autel de sainte Marie et ma perte et celle de tous ceux qui nous touchent et a poussé à la même conjuration tous les citoyens qui sont sous son ban si nous ne cédons pas à la volonté de ses gens, et il s'arroge par la violence ce qu'il doit obtenir de notre seule grâce. C'est pourquoi moi, apprenant ce serment digne d'Hérode, je n'ai pas voulu ensuite en présence de conjurés de cette espèce célébrer les sacrements divins ni leur donner la bénédiction épiscopale à la manière habituelle. Cependant j'ai différé de répandre sur eux l'anathème qu'ils méritent tant que je ne reçois pas à ce sujet un conseil de votre paternité et de nos collègues et que, fort du conseil et de l'aide d'un grand nombre, je ne les écarte pas de cette funeste conspiration par la censure nécessaire. Quand donc je renverrai quelqu'un vers vous, je veux que vous soyez préparé à avoir sous la main un conseil et une aide qui soient honorables pour vous et utiles pour nous et à vous hâter de tendre la main aux naufragés avant qu'ils ne coulent. Adieu.