Description
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Yves, évêque de Chartres
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Sancion, évêque d’Orléans
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après 1096/09 - avant 1116
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[après septembre 1096]
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Lettre
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Ivo, Dei gratia humilis Carnotensium episcopus, S[anctioni](a), Aurelianensium episcopo(1), viriliter agere et confortari in Domino(2).
Audivi de fraternitate vestra, quod mihi vehementer displicet et omnibus bonis, quia si quid perversum admittitis, quia manus vobis imposui(3), mihi imputatur et aemulus vester(4), non tantum adversum vos, sed etiam adversum me de vestris excessibus gloriatur. Insinuatum est enim mihi per litteras quod clericum illum, quem in die vestri introitus secundum morem vestrae civitatis(5) nostra exhortatione de carcere liberastis, iterum carcerali custodiae crudeliter mancipastis. Ea namque die qua vobis in missa servierat, qua vobis in mensa communicaverat, verberatum, spoliatum, per manus servorum trahi fecistis ad carcerem et curiae traditum(6) nulla consolatione refovistis neque de ejus liberatione curare voluistis. Nonne satius erat rapinam bonorum vestrorum(7) perpeti, vel etiam personam vestram, sicut promiseratis, carceri mancipari, quam clericus vester non judicatus, non damnatus a vobis curiae traderetur ubi, more furis, contumeliis et injuriis quotidianis cruciaretur. Non est hoc officium pastoris, sed mercenarii(8). Non facit tales fructus arbor quam plantavit Dominus(9) ; non promittunt bonos exitus ista principia(10). Unde si vultis amplius nos amicos habere et adjutores(b), aut diaconum curiae traditum liberate, aut pro ejus liberatione, quod exigit cura pastoralis sine dilatione perficite. Quod si non feceritis, patens erit procul dubio quia consilio vestro vel vestrorum captus fuit, nec eum fides sed fraus in introitu vestro liberavit. Paraveram quippe litteras mittendas Lugdunensi archiepiscopo de ordinatione vestra(11), quas retineo donec audiam quomodo vos habueritis in hoc negotio. Valete.
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S. AMT
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coadjutores éd. L.
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Le changement d'adresse par rapport à la lettre 51 permet de dater celle-ci d'après septembre 1096.
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D'après I Cor. 16, 13.
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Richer était privé de l'usage du pallium, voir lettre 50 où Yves lui conseille cependant de consacrer Guillaume. Yves l'a donc remplacé pour consacrer Sancion.
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Jean II, voir lettres 51 et 75.
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Privilège des évêques qui n'a été aboli qu'à la Révolution. Daniel Polluche,
Discours sur l'origine du privilège des évêques d'Orléans, Orléans, 1734. Gaël Rideau, « Ville et clergé dans la traditionnelle entrée des évêques d'Orléans (XVIIe-XVIIIesiècles) »,Entrer en ville, F. Michaud-Fréjaville, N. Dauphin et J.-P. Guilhambet (dir.), Rennes, PUR, 2006, p. 245-266 (p. 261-263). Plusieurs vies de saints y font référence : Vie de saint Aignan, ch. 3,MGH Scriptores rerum merov., t. 3, Bruno Krusch éd., p. 110. Vie de saint Éloi de Noyon, l. 2, ch. 14,PL87, col. 522-523, citées dans la note de Juret,PL162, col. 320-321. L'évêché de Chartres n'en jouit pas.
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La faute de l'évêque est grave car il a de lui-même livré un clerc à la justice séculière. Or
ad saecularia judicia nullus clericus est pertrahendus(Gratien, 11, 1). Voir lettres 22, 66, 137.
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Heb. 10, 34.
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D'après Joh. 10, 12-13.
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Daprès Matth. 7, 11.
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Références voir lettre 40.
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Sur la suite de l'affaire, voir lettres 54, 59.
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a. Avranches, BM 243, 34v-35
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 22rv
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T. Troyes, BM 1924, 85rv
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Au. Auxerre, BM 69, 19v-2
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L. Lettres de saint Ives évêque de Chartres traduites et annotées par L. Merlet, Chartres, 1885,
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Yves, par la grâce de Dieu évêque des Chartrains, à Sancion, évêque des Orléanais, agir virilement et être fort dans le Seigneur.
J'ai appris au sujet de votre fraternité quelque chose qui me déplaît vivement, à moi et à tous les gens de bien, parce que si vous commettez quelque action perverse elle m'est imputée, puisque je vous ai imposé les mains, et votre rival se glorifie de vos écarts non seulement contre vous mais aussi contre moi. On m'a en effet glissé dans une lettre que ce clerc que le jour de votre intronisation vous avez sur notre exhortation libéré de prison, selon la coutume de votre cité, vous l'avez à nouveau cruellement livré à la garde de la prison. Et le jour même en effet où il avait servi la messe pour vous, où il avait communié avec vous à la table, frappé, dépouillé, vous l'avez fait traîner en prison par les mains de vos serviteurs et, une fois qu'il eut été livré à la cour, vous ne l'avez réconforté d'aucune consolation et n'avez pas voulu vous occuper de sa libération. N'était-il pas préférable pour vous de supporter la spoliation de vos biens ou même de livrer votre personne à l'emprisonnement, comme vous l'aviez promis, plutôt que de remettre, sans le juger, sans le condamner, votre clerc à la cour où, à la manière d'un voleur, il serait mortifié par des outrages et des injures quotidiens ? Ce n'est pas là l'office d'un pasteur, mais celui d'un mercenaire. L'arbre qu'a planté le Seigneur ne produit pas de tels fruits ; ces commencements ne promettent pas de bonnes fins. Donc si vous voulez continuer à nous avoir pour ami et appui, ou bien libérez le diacre remis à la cour ou accomplissez sans délai pour sa libéraation ce qu'exige la charge pastorale. Si vous ne le faites pas, il sera évident sans le moindre doute qu'il a été fait prisonnier sur votre conseil et celui des vôtres et que ce n'était pas la bonne foi mais la perfidie qui l'a libéré à votre entrée. J'avais bien préparé une lettre à envoyer à l'archevêque de Lyon à propos de votre ordination, que je conserve jusqu'à ce que j'apprenne comment vous vous êtes comporté dans cette affaire. Adieu.