Description
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Yves, évêque de Chartres
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Hugues de Pierrefonds, évêque de Soissons
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après 1093 - avant 1103
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n.c.
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Lettre
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Hugoni, Dei gratia Suessionensium episcopo(1), Ivo, humilis Carnotensis Ecclesiae minister, confortari in Domino(2).
Publicis negotiis praepeditus, plura quae volui fraternitati vestrae scribere non valui. Si autem aliquando mererer dulce colloquium vestrum, dicerem plurima in aure tuta(3), quae cartula celare non posset si in aemulorum manus, antequam ad vestras perveniret, incideret. Hoc itaque interim suadeo vobis ut juventutem vestram honestis exercitiis occupetis, lectione, oratione, sacrae legis meditatione, ut si aliquando aliqua foeda imaginatio per sensuum fenestras templum cordis irrumpens ibi appingi tentaverit, vel prorsus ab ipso introitu repellatur, vel si forte aliqua incuria vel importunitate ostium cordis irrepserit, casta intus vigente dignitate cum dedecore excludatur. Sic enim testimonio bonae conscientiae poteritis(a) in justitia Dei exsultare et internae suavitatis gustum proximis fiducialiter eructare(b). Nec infructuosus esse poterit sermo doctoris quem intus accendit et format divini virtus amoris.
Si vero perversorum odia et detractiones ex hoc incurrerit vestra fraternitas(4), toleranda erunt vobis verbera verborum(5), qui in eorum numero(c) estis qui, apostolico gradu insistentes, pro domo Dei sustinuerunt non tantum rapinas bonorum suorum(6), sed etiam tormenta et mortes corporum. Quod enim illi sustinuerunt pro fidei defensione, nos sustinere habemus pro criminosorum actuum reprehensione ; alioquin erimus pastores nosmetipsos(d) pascentes(7), nostra quaerentes(8), oves morbidas non sanantes, sed fortes et pingues devorantes(9). Nec ab hac fortitudine deterreat vos raritas praesentium exemplorum, cum excusare nos non valeat haec ratio apud judicem internorum. Valete et fratres nostros Bistesiaci(10)(e) Deo militantes sub patrocionio vestro pro Dei amore et nostro juvate et contra aemulorum infestationes paterne supportate.
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poteris M
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erogare M
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merito al.
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nos ipsos MAT
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Bistiacensi T.
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Hugues de Pierrefonds, 1092 ou 1093-30 janvier 1103. Plusieurs lettres de la correspondance de Lambert d'Arras le concernent : éd. citée,
Registre, E. 13, le pape lui ordonne d'aller à la consécration de Manassès ; E. 21, Hugues demande justice à Lambert ; E. 26, Hugues et Anselle de Beauvais invitent Lambert à une entrevue ; E. 29 et 31, affaire avec l'abbé de Saint-Médard ; E. 61, Hugues annonce son départ pour Jérusalem : il meurt en chemin à Aquilée.
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Expression biblique ex. I Sam. 30, 6 ; Zach. 10, 12.
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Tutaeaures, Horace, Odes, I, 25, 18.
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Voir lettre 83.
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Voir lettre 29.
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Hebr. 10, 34.
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Ez. 34, 8.
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I Cor. 13, 5.
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Métaphore inspirée d'Ez. 34, 8-16.
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Béthisy, cant. Crépy-en-Valois, arr. Senlis, Oise ; ce prieuré dépendant de Saint-Quentin de Beauvais était situé dans le diocèse de Soissons.
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a. Avranches, BM 243, 29v
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 18v-19
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T. Troyes, BM 1924, 80-80v
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Au. Auxerre, BM 69, 14-14v
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À Hugues, par la grâce de Dieu évêque des Soissonnais, Yves, humble ministre de l'Église de Chartres, reprendre courage dans le Seigneur.
Empêché par des affaires publiques, je n'ai pas pu écrire à votre fraternité plusieurs choses que je voulais dire. Mais s'il m'arrivait de mériter un doux entretien avec vous, je dirais en toute sécurité à l'oreille davantage de choses, que ce billet ne pourrait cacher si, avant de parvenir en vos mains, il tombait aux mains de mes adversaires. C'est pourquoi d'ici là je vous conseille d'occuper votre jeunesse à des exercices honnêtes, lecture, prière, méditation de la loi sacrée, pour que, s'il advenait que quelque imagination honteuse, envahissant le temple de votre cœur par les fenêtres des sens, tente de s'y fixer, ou bien elle soit chassée dès l'entrée même, ou bien, au cas où elle forcerait la porte du cœur par quelque incurie ou importunité, elle soit refoulée pour son déshonneur par la chaste dignité qui veille à l'intérieur. Car ainsi, avec le témoignage de la bonne conscience, vous pourrez vous réjouir dans la justice de Dieu et répandre avec confiance sur vos proches le goût de la suavité intérieure. Et ne pourra être infructueuse la parole d'un docteur qu'enflamme intérieurement et conforte la vertu de l'amour divin.
Mais si votre fraternité encourt pour cette raison les haines et les détractions des méchants, il vous faudra supporter les maux des mots, vous qui êtes du nombre de ceux qui, poursuivant le chemin apostolique, ont subi pour la maison de Dieu non seulement les vols de leurs biens, mais aussi les tourments et les morts de leurs corps. Car ce que ceux-ci ont subi pour la défense de leur foi, nous avons à le subir pour réprimer les actes criminels ; autrement nous serons des pasteurs qui paissent pour nous-mêmes, cherchent nos intérêts, ne soignent pas les brebis malades, mais dévorent les fortes et les grasses. Que la rareté des exemples présents ne vous détourne pas de ce courage, puisque cette raison ne peut nous excuser auprès du juge des consciences. Portez-vous bien et pour l'amour de Dieu et le nôtre aidez nos frères qui militent pour Dieu à Béthisy sous votre patronage et soutenez-les paternellement contre les attaques de leurs adversaires.