Général
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Yves, évêque de Chartres
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Urbain 2, pape
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après 1097/02 - avant 1099
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[après février 1097]
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Lettre
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Domno et Patri suo Urbano, summo pontifici, Ivo suus, salutem et obsequium.
Postquam discessi a facie vestrae beatitudinis, multis hinc et inde concurrentibus causis non fuit mihi facultas ad vos redeundi nec per nuntium meum vestram celsitudinem salutandi. Cum enim Parisiensis episcopus(1) ad vos proficisceretur, jam ferme compleverat iter octo dierum, quando nondum audieram eum ad vos esse venturum. Quo tamen audito per quemdam servientem suum, misi post eum litteras istas quibus commendo eum paternitati vestrae, utpote apud nos enutritum et eruditum et, quantum videbatur, in annis adolescentiae suae innocenter et sine querela conversatum. Pro eo itaque quia ex indulgentia vestra pastoralem suscepit sollicitudinem, supplicamus paternitati vestrae ut eum materna pietate colligatis, paterna gravitate corrigatis, quatenus ex disciplina vestra correctior, ex gravitate vestra nobis reddatur gravior, videlicet ut studium venandi(2) et alia juvenilia desideria in se comprimat, studiosius solito orationi et lectioni incumbat(3).
Praeterea summopere rogamus excellentiam vestram ut eum munitum litteris apostolicis remittatis contra Latiniacensem abbatem(4) et monachos ejus, qui nescio qua nova libertate suos excessus tuentur et subjectionem Parisiensi Ecclesiae debitam et hactenus exhibitam, contra canonicam institutionem, de cervice sua excutere moliuntur. Hae autem personae hujusmodi sunt quibus magis necessaria est subjectio quam libertas, qui libertate in occasionem carnis abutuntur, quibus si decem millia paedagogorum in Christo(5) ad custodiam deputarentur, vix tamen sic regularis continentiae legibus ligarentur. Sicut ergo decet discretionem moderationis apostolicae, ita rem inter utrumque temperate ut nec Parisiensis Ecclesia suo jure minuatur, nec Latiniacense monasterium aliquod gravamen a Parisiensi Ecclesia indebite patiatur(6).
De Senonensi electo, cujus consecratio a legato vestro Lugdunensi archiepiscopo ob hoc impeditur, quia ei jure primatus sui, ante consecrationem suam, obedientiam non profitetur(7), quid nobis agendum sit rescribat vestra paternitas. Cum enim nulla aliquo accusante alia causa praetenderetur propter quam ejus consecratio differretur, eo tamen jubente propter reverentiam vestram manus ab ejus consecratione continuimus, cum de professione a metropolitanis primatibus facienda nihil legamus consuetudine firmatum, vel legibus institutum ; ultra quas metas nihil concessum esse primatibus testatur papa Nicolaus ita scribens, inter alia, Radulfo Bituricensi archiepiscopo(8) : « Primates vel patriarchas nihil privilegii habere prae caeteris episcopis, nisi quantum sacri canones concedunt et prisca consuetudo illis antiquitus contulit diffinimus. »
De pace sanctae Romanae Ecclesiae et vestra prosperitate det nobis Dominus audire quae optamus. Valete.
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Guillaume de Montfort, voir lettre 43. Après sa consécration le 1
eroctobre 1096, il se rendit à Rome en février 1097.
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De nombreuses interdictions concernent la chasse : Yves,
Décret5, 353 ; 6, 289 ; 13, 29-34.
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Yves,
Décret6, 177,ex dictis Augustini,quod presbyteri assidue legere debeant et orare.Mêmes injonctions I Tim. 4, 13 ; I Cor. 7, 5.Regula Sancti Benedicti,passim.
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Abbaye bénédictine Saint-Pierre de Lagny, cant. Lagny, arr. Meaux, Seine-et-Marne, diocèse de Paris. Pillée par les Normands, elle avait été restaurée à la fin du X
esiècle par le comte de Champagne Herbert le Jeune. L'abbé était Arnoul, frère de saint Thibaud dont il fit transférer le corps et en l'honneur de qui il consacra l'église de Saint-Thibaud-des-Vignes, M. Bur,La formation du comté de Champagne, p. 244 ; il mourut en 1106.
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I Cor. 4, 15.
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Un privilège d'Urbain II pour l'abbaye de Lagny est édité dans
PL151, lettre 261 à Arnoul, col. 523-524, sans date. Th. Ruinart,Vita Urbani, ch. 285,ibid.col. 222.
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Voir lettre 60.
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Lettre de 864. PL 119, col. 884. Yves, Décret 5, 56 ; Panormie 4, 29 (Gratien, 9, 3, 8). Voir lettres 60, 83, 236.
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a. Avranches, BM 243, 42rv
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 27v-28
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T. Troyes, BM 1924, 89v-90
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Au. Auxerre, BM 69, 29v-30v
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À son seigneur et père Urbain, souverain pontife, Yves qui est sien, salut et empressement.
Depuis que je me suis éloigné du visage de votre béatitude, pour de nombreuses raisons qui se sont accumulées ici et là je n'ai pas eu la possibilité de revenir vers vous ni d'envoyer mon messager saluer votre grandeur. En effet tandis que l'évêque de Paris se rendait auprès de vous, il avait déjà accompli presque huit jours de voyage quand j'ai appris qu'il allait vers vous. Cependant quand je l'eus appris par un de ses serviteurs, j'ai envoyé après lui cette lettre par laquelle je le recommande à votre paternité, comme un homme qui a été élevé et éduqué auprès de nous, et, autant qu'il nous semblait, qui s'est comporté dans les années de son adolescence innocemment et sans motif de plainte. C'est pourquoi puisqu'il a reçu de votre indulgence la sollicitude pastorale, nous supplions votre paternité de l'accueillir avec une piété maternelle, de le corriger avec une gravité paternelle, pour qu'il nous soit rendu mieux corrigé d'après votre discipline, plus grave d'après votre gravité, à savoir qu'il réprime en lui sa passion de la chasse et d'autres désirs de jeunesse, qu'il s'adonne avec plus de zèle à l'habitude de l'oraison et de la lecture.
En outre nous demandons à votre excellence de le renvoyer muni de lettres apostoliques contre l'abbé de Lagny et ses moines, qui défendent leurs excès par je ne sais quelle nouvelle liberté et s'efforcent contre la disposition canonique de secouer de leurs épaules la soumission due à l'Église de Paris et observée jusque-là. Or ils sont de ce genre de personnes à qui la soumission est plus nécessaire que la liberté, eux qui abusent de la liberté pour donner satisfaction à la chair et, si on leur envoyait pour les garder dix mille pédagogues dans le Christ, on aurait cependant peine ainsi à les lier avec les lois de la continence régulière. Donc, comme il convient à la discrétion de la modération apostolique, réglez l'affaire entre les deux de sorte que ni l'Église de Paris ne perde son droit ni le monastère de Lagny ne subisse quelque dommage indû de la part de l'Église de Paris.
Quant à l'élu de Sens, dont la consécration est empêchée par votre légat l'archevêque de Lyon pour la raison qu'il ne lui promet pas obéissance avant sa consécration selon le droit de sa primatie, que votre paternité récrive ce qu'il nous faut faire. Car bien qu'en l'absence d'accusation ne soit alléguée aucune autre raison pour différer sa consécration, cependant, sur son ordre, par révérence à votre égard, nous avons tenu notre main écartée de sa consécration, bien que nous ne lisions rien qui soit confirmé par la coutume ou décrété par les lois concernant une profession qui devrait être faite par les métropolitains aux primats ; au-delà de quelles bornes rien ne doit être concédé aux primats, le pape Nicolas l'atteste en écrivant ainsi, entre autres, à Raoul, archevêque de Bourges : « Nous décidons que les primats ou les patriarches n'ont pour privilège rien de plus que les autres évêques, sauf autant que les canons sacrés le leur concèdent et que l'antique coutume le leur a conféré de toute antiquité. »
Que le Seigneur nous donne d'apprendre ce que nous souhaitons au sujet de la paix de la sainte Église romaine et de votre prospérité. Adieu.