Général
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Yves, évêque de Chartres
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Richer 2, archevêque de Sens
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après 1096/07 - avant 1096
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[après juillet 1096]
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Lettre
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Richerio, Dei gratia Senonensium archiepiscopo, Ivo, humilis Carnotensium episcopus, salutem cum debita obedientia.
Parabam me, sicut mihi mandaverat vestra paternitas, ut venirem ad colloquium vestrum et confratrum nostrorum cum eruditioribus Ecclesiae nostrae filiis. Sed interim mihi pro certo intimatum est a quibusdam amicis meis quia parabantur mihi insidiae a quibusdam parrochianis vestris, qui sunt affines illius olim dictae reginae(1) cujus inimicitiae nondum sunt adversum me aliqua ratione sedatae. Unde rogo mansuetudinem vestram ut a Picueris(2)(a) usque ad vos securum mihi conductum praeparetis, si praesentia mea adeo necessaria est vobis. Nam in hoc itinere me periculum aliquod incurrere, quantum mihi est damnosum, tantum vobis ignominiosum. Quod si ad praesens fieri non potest, quae dicerem vobis praesens ea scribo vobis absens.
De veteri querela quam habet adversus Senonensem Ecclesiam Lugdunensis Ecclesia(3), laudo et consulo ut, si qua habetis privilegia, apostolica manu roborata, vel scripta authentica, quae primatum Lugdunensis Ecclesiae, quem aliquando ex catalogis civitatum(4) conjicimus exstitisse, ab Ecclesia vestra removeant et libertatem quam desideramus eidem Ecclesiae defendant, ea confratribus nostris ostendatis et eadem parvitati nostrae transmittatis, quibus tanquam firmis sustentaculis innitamur et libertatem matris nostrae(5) pro posse nostro tueamur. Quae si modo ad manum non habetis, non est consilium meum ut contra torrentem brachia dirigatis(6), immo apostolicis sanctionibus interim acquiescatis absque praejudicio privilegiorum vel authenticarum scripturarum, si quando reperiri poterunt, quae hanc subjectionem ab Ecclesia vestra removeant et ejusdem Ecclesiae libertatem defendant. Qui melius sentiunt, melius consulant. Hoc tantum provideant quia rerum exitus prudentia metitur, ut ab imminenti gladio caput vestrum eripiant.
De caetero sciatis canonicos Parisienses, decanum videlicet cantorem, Rainaldum archidiaconum(7) in praesentia nostra secundum praeceptum domni papae jurasse se nullo terrore regis vel dictae reginae compulsos, domnum Guillelmum episcopum sibi elegisse, neque aliquid simoniacae pravitatis in ejus electione intendisse(8). Unde mando vobis ex parte domni papae ut si Parisiensis Ecclesia eum sibi ordinari et consecrari postulaverit, ante festum sancti Remigii(9) secundum auctoritatem et consuetudinem Ecclesiae vestrae ei manum imponatis et honore pallii, ad tempus vobis interdicto(10), in ejus ordinatione et consecratione uti nullatenus formidetis. Sic enim domnus papa mihi concessit apud Montem Pessulanum(11), cum ad petitionem regis de ejusdem Guillelmi electione tractaretur et post multam ventilationem ejusdem electionis discussio mihi a domno papa committeretur.
Ad ultimum rogo paternitatem vestram ut, secundum institutionem pacis quae a domno papa omnibus Gallicanis Ecclesiis indicta est(12), de parrochianis vestris Stampensibus(13), videlicet Ursione, filio Theodonis, et complicibus ejus, justitiam faciatis, qui episcopatus nostri partem episcopatui vestro contiguam(14) omnino devastant et pacem quam habet reliqua pars episcopatus sine causa perturbant. Praecipite itaque Stampensi archipresbytero ut vel eos ad satisfactionem adducat, vel ipsis excommunicatis et locis in quibus morantur divinum officium interdicat secundum consuetudinem pacis(15). Valete, et quod vobis placet per praesentium portitorem mihi remandate.
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Picuereis AT, Plicuris al., applicueris M.
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Bertrade.
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Pithiviers, arr. Loiret.
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Voir aussi lettres 54, 59.
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Notitia Galliarum, éd. Th. Mommsen,MGH AA, t. 9/1, Berlin, 1892, p. 552-612, 552 et 584 pour Lyon. Lambert d'Arras argumente également en s'appuyant sur cette liste,Registre, G. 6, E. 130, éd. citée, p. 101, 507.
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L'Église de Sens. La primatie avait été accordée de manière personnelle en 876 à Anségise et non au siège de Sens. Richer refusait de reconnaître la primatie de Lyon. Le récit de son opposition est fait dans la lettre d'Urbain II à Hugues de Lyon, qui confirme la primatie de Lyon, éditée dans le
Registrede Lambert d'Arras, éd. citée, C. 60, p. 212-217. A. Fliche,Philippe Ier, p. 350-351.
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Ille igitur numquam derexit bracchia contra torrentem, Juvénal,Satires, 4, 89-90.
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Renaud, archidiacre, apparaît dans de nombreuses chartes entre 1092 et 1120, M. Guérard,
Cartulaire de Notre-Dame de Paris, Paris, 1850, t. I,passim.
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Voir lettre 43. Sa parenté avec Bertrade l'avait rendu suspect.
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1
eroctobre.
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Par Urbain II à Clermont le 1
erdécembre 1095, voir notesupra.
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Urbain II était à Maguelone le 28 juin 1096, passait à Montpellier le 2 juillet, était arrivé à Nîmes le 5 juillet pour le concile. R. Crozet, « Le voyage d'Urbain II et ses négociations avec le clergé de France (1095-1096) »,
Revue historique, t. 179, 1937, p. 271-310, p. 305 pour Montpellier. La rencontre et le problème de cette élection sont racontées dans laVita Urbani,PL151, § 269, col. 210, mais il n'y a pas de lettre du pape sur le sujet.
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Allusion au concile de Clermont, voir lettre 44.
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Étampes, arr. Essonne. D'après Joseph Depoin, « La chevalerie étampoise. Les chevaliers et les vicomtes d'Étampes sous Philippe I
eret Louis VI »,Bulletin de la société historique et archéologique de Corbeil, d'Étampes et de Hurepoix, 1909, p. 73-93, p. 79, Orson II, chevalier d'Étampes, est le fils de Thion Ierlui-même fils d'Orson Ierle Riche. Il a souscrit le privilège donné à Fleury par Louis VI (après le 29 août 1106, A. Luchaire,Louis VI le Gros, n° 42. Après le 4 août, J. Dufour,Recueil des actes de Louis VI, Paris, 1992, n° 13, t. 1, p. 21-23). En 1107 c'est sans doute lui qui apparaît comme grand connétable à la cour des rois Philippe Ieret Louis VI. D'après la généalogie d'Étienne Pattou, Orson II est le frère de Thion Ier. site internet ., mais c'est en contradiction avec la lettre d'Yves qui le dit fils de Thion. Sur cette famille voir aussi lettre 132.
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Étampes est en effet proche de la limite entre les évêchés de Sens et de Chartres.
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L'excommunicaton et l'interdit sont les sanctions prévues dans les décrets concernant la paix de Dieu.
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a. Avranches, BM 243, 33-34
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 21v-22
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T. Troyes, BM 1924, 84rv
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Au. Auxerre, BM 69, 18-19
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À Richer, par la grâce de Dieu archevêque des Sénonais, Yves, humble évêque des Chartrains, salut avec l'obéissance qui lui est due.
Je me préparais, comme votre paternité me l'avait demandé, à venir à l'assemblée de vos confrères et des nôtres, avec les fils les plus instruits de notre Église. Mais entre temps il m'a été communiqué avec certitude par quelques-uns de mes amis que se préparaient contre moi des embûches tendues par certains de vos paroissiens, qui sont alliés de cette femme autrefois dite reine, dont les inimitiés contre moi n'ont encore été apaisées d'aucune manière. Aussi demandé-je à votre mansuétude de me préparer une escorte sûre de Pithiviers jusqu'auprès de vous si ma présence vous est à ce point nécessaire. Car dans ce voyage autant il est dommageable pour moi, autant il est ignominieux pour vous que je coure quelque danger. Si cela ne peut se faire à présent, ce que je vous dirais présent, absent je vous l'écris.
À propos de l'ancienne querelle qu'a l'Église de Lyon contre l'Église de Sens, voici ce que j'approuve et conseille : si vous avez des privilèges confirmés par la main apostolique ou des écrits authentiques qui soustraient votre Église à la primatie de l'Église de Lyon, que nous pensons avoir autrefois existé d'après les listes des cités et qui défendent la liberté que nous désirons pour cette même Église, montrez-les à nos confrères et transmettez-les à notre petitesse, pour que nous nous appuyions sur eux comme sur de solides étais et que nous protégions autant que nous le pouvons la liberté de notre mère. Si vous ne les avez pas sous la main, mon conseil est que vous ne dressiez pas vos bras contre le torrent, mais plutôt qu' en attendant vous vous soumettiez aux prescriptions apostoliques, sans préjudice des privilèges ou des écrits authentiques, si un jour ils peuvent être trouvés, qui soustraient votre Église à cette soumission et défendent la liberté de cette même Église. Ceux qui ont un meilleur avis, qu'ils donnent un meilleur conseil. Qu'ils veillent cependant à ce que la prudence mesure l'issue des choses pour arracher votre tête au glaive qui la menace.
Par ailleurs, sachez que les chanoines de Paris, à savoir le doyen, le chantre, l'archidiacre Renaud, en notre présence, selon l'ordre du seigneur pape, ont juré que, sans être poussés par aucune peur du roi ou de ladite reine, ils ont élu pour être leur évêque le seigneur Guillaume et que dans son élection il n'est rien entré de dépravation simoniaque. Je vous demande donc de la part du seigneur pape, si l'Église de Paris réclame qu'il soit ordonné et consacré pour elle, de lui imposer la main avant la fête de saint Remi selon l'autorité et la coutume de votre Église et de ne craindre nullement de vous servir dans son ordination et sa consécration de l'honneur du pallium qui vous a été momentanément interdit. Car le seigneur pape me l'a ainsi accordé à Montpellier, alors qu'à la demande du roi il était question de l'élection de ce même Guillaume et qu'après beaucoup de discussions le contrôle de cette même élection m'avait été confié par le seigneur pape.
Enfin, je prie votre paternité que, selon la constitution de paix qui a été envoyée par le seigneur pape à toutes les Églises de Gaule, vous fassiez justice de vos paroissiens d'Étampes, à savoir Ursion, fils de Thion, et de ses complices qui ravagent complètement la partie de notre évêché contiguë au vôtre et perturbent sans raison la paix que connaît tout le reste de notre évêché. C'est pourquoi, ordonnez à l'archiprêtre d'Étampes ou de les amener à réparation ou, selon la coutume de la paix, d'interdire l'office divin pour eux après les avoir excommuniés et pour les lieux où ils demeurent. Adieu et répondez-moi ce que vous décidez par le porteur de la présente.