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Proposuisti nobis

Auteur

Alexander III

Titre en français

Proposuisti nobis

Titre descriptif

L'époux ou l'épouse d'un apostat ou une apostate ne peut pas se remarier

Type de texte

Lettre

Texte

Idem Tyrensi archiepiscopo. [i] Proposuisti nobis in prouincia tua sepe contingere quod alter eorum qui sibi sunt uinculo coniugali astricti ad hostes nominis et fidei Christiane aut sponte transit aut trahitur quandoque inuitus, ubi et professioni sue renunciat et Christianam religionem exsufflat, ibique aliam ducens uel alii nubens, et ad comparem manentem ordinarie domus habitatorem ulterius non reuertitur, sed redire omnino postponit; ille uel illi qui domi remanent integritatem fidei obseruare uolentes, forsan alterius consortium minime admittentes, te grauiter post longam expectationem sua conquestione fatigant et cum multa instantia postulant ut eis ad secunda uota migrandi tribuas facultatem. [ii] Eodem modo graues de his pateris molestias quorum uterque ab infidelibus captus, alter eorum ad hostium superstitionem, Christi fidem negando, se confert, alter Trinitatis cultor intemeratus quocumque casu ad propria habet, eum diuina gratia ducente, regressum. Quia uero super hiis nostrum queris habere responsum, consultationi tue taliter respondemus quod, ex quo aliqui interueniente matrimonii copula una sunt caro effecti, sine iudicio ecclesie matrimonium nulla potest ratione dissolui, nec ei ad secunda uota migrandi licentia debet aliquantinus indulgeri, quia sacra testante scriptura [1 Cor. 7] uir non potest uxorem nisi causa fornicationis dimittere et tunc aut ei debet reconciliari aut ea superstite continere. Id ipsum in spirituali fornicatione credimus obseruandum. Dat. Lat. v. idus Iulii.

Langue

Latin

Source du texte original

Decretales ineditae saeculi XII, ed. S. Chodorow and C. Duggan, Monumenta Iuris Canonici, Series B, vol 4 (Vatican, 1982), doc. 94, 166-67.

Datation

  • Entre 1166 et 1179
  • 12ème siècle
  • Précisions : Daté du 11 juillet, des années 1166, 1178 ou 1179.

Aire géographique

  • Palestine
  • Tyr était l'un des quatre archevêchés du Patriarchat de Jérusalem.

Traduction française

Du même, à l’archevêque de Tyr Tu nous as exposé que dans ta province souvent il arrivait que l’un de ceux qui se sont liés par les liens du mariage ou bien se rend de lui-même, ou bien parfois est entraîné contre son gré, vers les ennemis du nom et de la foi du Christ ; que là il abjure sa foi et repousse la religion chrétienne, et que, prenant une autre femme là-bas et l’épousant, il ne revient pas ensuite vers son épouse qui demeure en règle dans leur habitation, mais aussi abandonne tout à fait l’idée de revenir ; celui ou ceux, qui demeurent en leur maison avec la volonté de conserver l’intégrité de leur serment, peut-être n'acceptant pas du tout le mariage avec une autre personne, après une longue attente t’accablent gravement avec leurs demandes, et avec beaucoup d’insistance te pressent d’accorder la capacité de quitter leur situation pour un second mariage. De la même façon, tu endures de grands désagréments à propos de ceux dont l’un, étant capturé par des infidèles, se tourne vers la superstition des ennemis, niant la foi chrétienne, tandis que l’autre se tient en toute circonstance partisan intègre de la Trinité jusqu’au retour de l’autre, conduit par la grâce divine. Parce que sur ces sujets tu demandes notre réponse, nous répondons de telle manière à ta question, à savoir que : à partir du moment où deux époux sont mêlés par les liens du mariage, ils sont faits d’une seule chair, et sans le jugement de l’Église, le mariage ne peut être annulé pour aucune raison, et il ne faut pas être complaisant de quelque façon que ce soit pour leur accorder l’autorisation d’un second mariage, parce que, comme l’attestent les textes sacrés [1 Cor. 7] un homme ne peut renvoyer son épouse sauf pour un motif de débauche, et alors il doit se réconcilier avec elle ou demeurer dans le célibat tant qu’elle-même vit encore. Nous croyons que cela doit aussi être observé en ce qui concerne la débauche spirituelle. Fait à Latran, le 5ème jour avant les Ides de Juillet.

Source traduction française

C. Chauvin

Résumé et contexte

Cette lettre reconnaît que l'apostasie était chose courante au royaume croisé de Jérusalem au XIIème siècle. Le pape Alexandre III est d'avis que l'épouse d'un apostat ne devrait pas se remarier tant que son époux est en vie. Cette lettre a été écrite à l'archevêque de Tyr, en date du 11 juillet, mais l'année est inconnue. C'est envoyé de "Lucca", un endroit d'où Alexandre par ailleurs n'a jamais envoyé d'autre lettre, ce qui laisse penser qu'il faut probablement lire "Latran". Alexandre se trouvait à Latran un 11 juillet en 1166 (sous l'épiscopat de Frédéric de la Roche), 1178 et 1179 (sous l'épiscopat du fameux historien William).

Signification historique

La conversion à l'Islam a dû se produire fréquemment parmi les croisés, sans doute lors de batailles ou de sièges, ou après avoir été capturés par les soldats musulmans.1 Cette lettre, de même qu'une lettre d'Urbain IV au XIIIème siècle, suggère que les apostats chrétiens souhaitaient parfois revenir au christianisme. Un autre exemple du XIIème siècle peut se trouver dans les anecdotes d'Oussama ibn Mounqidh.2 Dans les lois séculières du royaume de Jérusalem, l'apostasie était un crime grave. Au chapitre 23 du Livre au Roi, écrit environ 40 ans après cette lettre, un chevalier peut être déshérité pour avoir commis l'apostasie, qui était considérée comme une trahison contre l'état ou contre la chrétienté. Seuls les catholiques romains pouvaient obtenir des fiefs du Roi, donc un apostat se voyait confisquer sa possession territoriale pour le reste de sa vie.3 Cependant le Livre au Roi différait de la lettre d'Alexandre III, en ce que l'épouse d'un chevalier apostat était encouragée à se remarier un an et un jour après, dans le but de prendre possession de la propriété de son époux. Le chapitre 22 du Livre au Roi autorise également un chevalier de retour de captivité à récupérer sa propriété, s'il jure qu'il n'a pas fait apostasie pendant son absence.

1 . B. Kedar, "Multidirectional conversion in the Frankish Levant", dans J. Muldoon, Varieties of Religious Conversion in the Middle Ages (Gainesville, 1997), repr. dans Franks, Muslims, and Oriental Christians in the Latin Levant (Aldershot, 2006), 194.

2 . Usama ibn Munqidh, The Book of Contemplation: Islam and the Crusades, trans. P. Cobb (Penguin, 2008), p. 143.

3 . J. Prawer, Crusader Institutions (Oxford, 1980), 435.

Textes apparentés inclus dans le corpus

Manuscrits

  • 1 Rot. 1.17 (Collectio Rotomagensis prima, Paris, BNF lat. 3922A, fols. 148r-167v, 245)

Editions

  • W. Holtzmann, Regesta decretalium saeculi XII (unpublished).
  • P. Jaffé, Regesta pontificum romanorum, ed. S. Loewenfeld (Berlin, 1885).

Etudes

  • B.Kedar, Crusade and Mission: European Approaches Toward the Muslims. Princeton, 1988.
  • B. Kedar, "Multidirectional conversion in the Frankish Levant", in J. Muldoon, Varieties of Religious Conversion in the Middle Ages. Gainesville, 1997; repr. in Franks, Muslims, and Oriental Christians in the Latin Levant. Aldershot, 2006.
  • J. Prawer, Crusader Institutions. Oxford, 1980.

Mots-clés

apostasie ; conversion à l'Islam ; mariage

Auteur de la notice

Adam   Bishop

Collaborateurs de la notice

Claire   Chauvin  :  traduction

Comment citer cette notice

Notice n°252084, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»

Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252084/.

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