Quia super his
Lettre à l'évêque de Marseille requérant des restrictions à propos des juifs
Alexander III Marsiliensi episcopo. Quia super his unde nos in literis tuis de Iudaeis scripsisti, certum canonem non habemus, fraternitati tuae significatione praesentium intimamus, quod clero tuo in unum pariter convocato, generaliter tam nostra quam tua auctoritate interdicas, ut Iudaei ostia vel fenestras in die Parasceues aperta non habeant, sed clausa teneant tota die. Mancipia quoque Christiana nulla cum eis habitare permittas, sed generaliter cunctis edicas, ne aliquis Christianorum in eorum servitio audeat commorari, ne forte ex ipsorum conversatione ad Iudaismi perfidiam convertantur. De terris vero, quas Iudaei colunt, tuae prudentiae respondemus, ut eos ad decimas persolvendas, vel ad possessiones penitus renunciandas cum omni districtione compellas, ne forte occasione illa ecclesiae valeant suo iure fraudari.
The Apostolic See and the Jews, vol. 1, Documents: 492-1404, S. Simonsohn, ed., (Toronto, 1988), 50.
Alexandre III à l'évêque de Marseille. Étant donné que nous ne disposons pas d'un canon spécifique traitant des sujets sur lesquels tu nous a écrit dans ta lettre concernant les juifs, nous te faisons savoir, frère, grâce aux clarifications apportées par la présente lettre que ton clergé et toi ensemble réunis devriez de manière générale interdire aux juifs, au moyen de votre autorité et de la nôtre, d'ouvrir leurs portes ou leurs fenêtres le Vendredi saint ; tout au contraire, ils doivent les garder fermés toute la journée. Vous devriez aussi interdire aux domestiques chrétiens de vivre avec eux et informer de manière générale tous les individus qu'aucun chrétien ne doit prendre le risque de rester à leur service de crainte qu'en vivant à leurs côtés ils n'en viennent à se convertir à la perfidie juive. Au sujet des terres habitées par les juifs, nous répondons à la prudence dont tu fais preuve que tu dois les forcer à payer la dîme sous peine qu'ils aient à renoncer complètement à leur propriété, pour éviter qu'il n'arrive à cette occasion que les églises soient victime d'escroquerie à cause de leur loi.
L. Foschia
Cette lettre adressée à l'évêque de Marseille qui survécut dans deux canons des Décrétales de Grégoire IX constitue une tentative pour interdire aux juifs d'ouvrir leurs portes et fenêtres le jour du Vendredi saint. Elle informe aussi l'évêque qu'il ne doit pas permettre aux domestiques chrétiens de vivre dans les demeures juives et qu'il doit les faire renoncer complètement à travailler pour des juifs. Enfin, la lettre ordonne aux juifs de continuer à payer la dîme sur la propriété — il s'agissait probablement de propriété achetée ou acquise d'une autre façon auprès de chrétiens, et ce pour éviter que l'Église n'ait à subir quelque perte que ce soit. On se reportera aussi au canon 26 du 3e Concile de Latran.
Étant donné que cette décrétale existe sous la forme de deux canons séparés dans le recueil des Décrétales, il n'est pas sûr qu'il ait survécu dans son intégralité. L'allusion aux domestiques chrétiens que l'on trouve dans cette lettre fait écho à celle que l'on trouve dans le canon 26 du troisième concile de Latran de 1179. Cependant, comme la lettre n'est pas datée, on ignore si elle est antérieure ou postérieure au concile ; ainsi, nous ne sommes pas certains des liens qui unissent le canon et la lettre. L'interdiction faite aux juifs d'apparaître en public le Vendredi saint telle qu'elle apparaît dans la lettre fut aussi répétée et développée lors du quatrième concile de Latran en 1215. Cette décrétale fait partie intégrante des Décrétales de Grégoire IX, compilées dans les années 1230, sous les références 3.30.16 and 5.6.4. La première partie, de Quia super à convertentur apparaît en 5.6.4 et appartient à "Sur les juifs, les sarrasins et leurs domestiques". La deuxième partie, de De terris to fraudari comprend 3.30.16 et appartient à "Sur la dîme".
cohabitation ; dîme ; Juifs/Judaïsme ; semaine sainte ; serviteurs
Laurence Foschia : traduction
Jessie Sherwood : collaborateur pour le commentaire
Adam Bishop : traduction
Notice n°103881, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait103881/.