Général
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Yves, évêque de Chartres
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Gauthier, bibliothécaire de Beauvais
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après 1090 - avant 1116
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n.c.
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Lettre
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Ivo, humilis Ecclesiae Carnotensis minister, fratri Gualterio(a), Belvacensis Ecclesiae bibliothecario(1), salutem.
Requisitus ex tua parte qua poenitentia mulctandus sit presbyter qui verba divini sacramenti et insignia sacerdotalis officii in conjugali benedictione cujusdam virginis illusorie transmutavit et alia pro aliis interposuit(2), hoc interim respondeo, quia specialem sententiam super hoc non inveni, quia nec tale adulterium vel potius sacrilegium divinorum sacrorum alicubi(b) perpetratum(3) ulterius audivi. Videtur itaque(c) mihi quia sicut novum genus est criminis, ita procurandum est novum experimentum medicaminis(4). Ne tamen aliquid severius in hujusmodi sacrilegio(d) sine divinae auctoritatis munimine judicetur, ubi speciales sententiae non occurrunt, quantum mihi videtur, generales(5) quae super divinorum sacramentorum temeratores promulgatae sunt sufficere possunt. Habetur enim in concilio Toletano VIII capitulo II(6) : « Nihil contra ordinem temeritatis ausu praesumatur, neque illa quae summa veneratione censentur vel minimo praesumptionis tactu(e) solvantur. » Et post pauca : « Si quis haec temerare praesumpserit, excommunicationis sententiam sustinebit. » Item in decretis Julii papae episcopis per Aegyptum missis(7) : « Sacerdos aliter quam praeceptum est faciens tamdiu a sacrificando cessabit quamdiu legitima poenitentiae satisfactione correptus ad gradus sui officium redeat quod amisit. » Et haec de his qui simpliciter et ignoranter(8) erraverunt, quanto magis de his qui fraudulenter verba sacra perverterunt et ita mulierculam simpliciter accedentem, quantum in se fuit(9), fornicationi addixerunt ! De his ista sufficiant. Vale.
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G. illius ecclesie bibliothecario JT, Gaulterio A, Gauterio Au
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sacramentorum ab aliquo éd.
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ita AMAu
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sacrilegium ATAu
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actu éd.
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Ce personnage n'a pas été identifié.
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Verba divina detrahendo aut insidiando polluantur vel despiciantur, Évariste,ep. omnibus episcopis,Fausses décrétales, éd. Hinschius, p. 87, Yves,Trip. 1, 3, 1 (Gratien, D. 93, 11).
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Dans le
Décretd'Yves, la plupart des fautes méritant le nom de sacrilège sont liées à des vols ou ventes de biens d'Église (comme en droit romain,Digeste, 48, 13, 11). S'y ajoutent la corruption d'une vierge, 7, 134 et le viol de serment, 12, 78. Une définition générale en est donnée par Gratien, 17, 4, 29,Committunt etiam sacrilegium qui contra divinae legis sanctitatem aut nesciendo committunt aut negligendo violant et offendunt.
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Expression très fréquente chez les Pères, chère à Geoffroy de Vendôme, par exemple lettres 14, 32, 79, 80 etc. ; Yves, lettres 162, 237. Augustin,
De correctione Donatistarum liber seu epistola185, ch. 10, c. 45,cogunt enim multas invenire medicinas multorum experimenta morborum,CSEL45, p. 39-40. Yves,Prologue, § 13, éd. J. Werckmeister, p. 78. Augustin,ep. 98,ad Bonifacium,CCSL31A, p. 233. Yves,Décret6, 386.
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D'après le droit romain, les lois particulières sont contenues dans les lois générales,
Digeste, 50, 17, 147,semper specialia generalibus insunt. Epitome Juliani, 106, 370, 1. Yves,Décret4, 193. L'oppositionspecialis/generalisest fréquente en droit canonique.
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7
econcile de Tolède, c. 2, première et dernière phrases. Yves,Décret2, 124 (Gratien, 7, 1, 16).
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3
econcile de Braga, c. 1,Fausses décrétales, éd. Hinschius, p. 434. Yves,Décret2, 11 ;Panormie1, 146, avec l'inscription Jules aux évêques d'Ėgypte, comme dans la lettre (Gratien, DC 2, 5in fine).
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Ignoranter et simpliciter, termes canoniques fréquents. L'ignorance peut parfois être une circonstance atténuante, mais pour les clercs c'est une faute, car ils ne peuvent arguer de l'ignorance des canons, ex. Cyprien,ep. ad Caecilium, lettre 63, 17,CCSL3C, p. 413 (Gratien, DC 2, 3). Célestin, c. 1,Fausses décrétales, éd. Hinschius, p. 561. Ce fait explique la fréquence dans les lettres d'Yves de l'expressionut ipse melius nostis.
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D'après Cicéron,
De Natura deorum, 3, 15.
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a. Avranches, BM 243, 75v
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 51
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J. Jesus College, Q.G.5, 28v-29
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V. Vatican, Reg. Lat. 147, 19
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T. Troyes, BM 1924, 70rv
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Au. Auxerre, BM 69, 48v-49
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Yves, ministre de l'Église de Chartres, à son frère Gautier, bibliothécaire de l'Église de Beauvais, salut.
Comme tu m'interroges pour savoir de quelle pénitence doit être frappé un prêtre qui a changé par plaisanterie les termes du divin sacrement et les ornements de l'office sacerdotal pour la bénédiction conjugale d'une jeune fille et les a mis les uns à la place des autres, voici ce que je réponds en attendant, parce que je n'ai trouvé à ce sujet aucune sentence particulière et qu'en outre je n'ai pas entendu parler d'un tel adultère ou plutôt sacrilège des sacrements divins perpétré quelque part. C'est pourquoi il me semble que, de même que c'est un nouveau genre de crime, de même il faut soigner en expérimentant un nouveau remède. Pour éviter cependant de juger trop sévèrement dans un sacrilège de ce genre sans l'appui de l'autorité divine, là où les sentences particulières ne se présentent pas, les générales qui ont été promulguées sur les violateurs des sacrements divins peuvent, me semble-t-il, suffire. Il y a en effet dans le huitième concile de Tolède, au chapitre deux : « Que rien ne soit osé par l'audace de la témérité contre l'ordre établi et que les choses qui sont jugées dignes de la plus haute vénération ne soient pas détruites par un acte de présomption même minime. » Et peu après : « Si quelqu'un a l'audace de violer ceci, il subira la sentence d'excommunication. » Et encore, dans les décrets du pape Jules envoyés aux évêques d'Égypte : « Un prêtre agissant autrement que ce qui a été prescrit cessera d'accomplir le sacrifice jusqu'à ce que, corrigé par la légitime satisfaction de la pénitence, il revienne à l'office de son grade qu'il a perdu. » Et ceci, c'est pour ceux qui se sont trompés par simplicité et ignorance ; combien plus en sera-t-il pour ceux qui ont perverti par ruse les paroles divines et ont ainsi livré à la fornication, autant qu'il fut en eux, une faible femme qui venait à eux simplement. Cela suffit sur ce sujet. Adieu.
Cette lettre est placée après les deux suivantes (adressées à Daimbert) dans d'édition de L. Merlet et les manuscrits de Montpellier, Avranches, Nal 3041, Auxerre.