Général
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Yves, évêque de Chartres
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Geoffroy, doyen du Mans
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après 1090 - avant 1116
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n.c.
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Lettre
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Ivo, humilis Ecclesiae Carnotensis minister, Gaufrido, Cenomanensis Ecclesiae decano(1), salutem.
Multis et magnis negotiis occupatus, fraternitati tuae sufficienter ad praesens scribere non potui. De Ebrardo(2)(a) tamen hoc tibi respondeo quia, cum morum acerbitate et tam actuum suorum quam verborum importabili praesumptione confratres suos frequenter offenderet, hoc modo licentiam ab eis promeruit et hoc tantum ut monachus Majoris Monasterii(3) maneret obtinuit. Qui ergo contempto clericatu ad monasterium confugit et e converso contempto monasterio iterum ad clericatum aspirare contendit, non mihi facile suscipiendus videtur ab his quibus vita et doctrina et moribus nondum fuit manifestus. Si ergo ejus(b) modi personae intrusione te senseris praegravari, libera est tibi facultas refutandi, quia secundum decretum papae Coelestini(4) : « Tunc primum alter de altera eligendus est ecclesia, si de civitatis ipsius clero, cui episcopus est ordinandus, nullus dignus, quod evenire non credimus, potuerit reperiri. » Et quia per te sapis, superfluum mihi videtur te instruere, quibus auctoritatibus debeas ignotos et ex transverso venientes refutare. Hoc tamen consulo tibi ut abbatem Majoris Monasterii(5), cujus adhuc monachus est, commonefaciatis, quatenus praedictum Ebrardum a tali ambitione compescat ac regulari severitate(6), si sit necesse, coerceat. Licet enim abbatem eum fieri consenserit, non tamen eum a jugo monasticae disciplinae liberavit. Vale.
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Ebraldo M
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hujus AT.
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Doyen du Mans, il fut, à la mort d'Hoël le 28 juillet 1096, soutenu par le comte Hélie pour être le concurrent d'Hildebert de Lavardin, élu par le clergé et qui lui fut finalement préféré. Voir lettre 254.
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Ce ne peut être Ébrard II, seigneur du Puiset, qui fut à partir de 1076 moine à Marmoutier, où il apparaît dans de nombreux actes. J. Leclercq suggère qu'il s'agit d'un membre de la famille du Puiset, fils d' Adélaïde du Puiset et de Roger de Montgomery, qui entra dans le clergé séculier et mourut attaché à la chapelle du roi Henri I
erd'Angleterre. A. de Dion,Le Puiset,op. cit., p. 11-12. Mais dans cette lettre Évrard était d'abord chanoine (confratres suos) et s'est ensuite installé à Marmoutier. Les moines qui veulent changer de lieu sans raison sont considérés comme gyrovagues et vus avec suspicion ; le doyen Ernaud en est un exemple, lettre 262 ; le problème était fréquent et créait souvent des tensions entre maisons religieuses, voir par exemple Geoffroy de Vendôme, lettres 22, 24, 33, 53, 81, 92, 93, 127, 145, 166C, 178, 196.
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Célèbre abbaye Saint-Martin, aux portes de Tours. D. Barthélemy, « Note sur les cartulaires de Marmoutier (Touraine) au XI
esiècle », dansLes cartulaires,Mémoires et documents de l'École des chartes, 39, p. 247-256. Ébrard du Puiset apparaît dans leCartulaire de Marmoutier pour le Dunois, éd. E. Mabille, Châteaudun, 1874, chartes 75, 144, 149 ;Cartulaire de Marmoutier pour le Vendômois, éd. A. de Trémault, Vendôme, 1893, ch. 177 ;.dans leCartulairemanceau, éd. E. Laurain, 1911 et 1940, t. 2, p. 73, 86, 451-451, 457.
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Célestin, lettre aux évêques de Gaule, c. 5,
Fausses décrétales, éd. Hinschius, p. 560. Yves,Décret5, 61 ;Panormie3, 7 (Gratien, D. 61, 13). La prescription se rapporte à l'évêque et non à un moine ou un clerc.
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Bernard, voir lettres 4, 73. Évrard avait participé à son élection, comme le rappelle la dernière phrase de la lettre.
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Regula sancti Benedicti, 1, 11 ; 4, 78 ; 58, 9, 17 ; 60, 9 ; 61, 5.
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a. Avranches, BM 243, 34rv
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 22rv
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T. Troyes, BM 1924, 6v
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Yves, humble ministre de l'Église de Chartres, à Geoffroy, doyen de l'Église du Mans, salut.
Occupé par des affaires nombreuses et importantes, je n'ai pu jusqu'à présent écrire de manière satisfaisante à ta fraternité. Cependant à propos d'Évrard je te réponds que, comme il a souvent offensé ses confrères par la rudesse de ses mœurs et l'insupportable présomption tant de ses actes que de ses paroles, il a par ce moyen reçu d'eux une dispense et a seulement obtenu ceci, demeurer moine à Marmoutier. Donc celui qui, après avoir méprisé la cléricature, s'est enfui vers un monastère et, inversement, après avoir méprisé le monastère, a prétendu aspirer à nouveau à la cléricature, ne me semble pas devoir être facilement reçu par ceux devant qui il ne s'est pas encore révélé par sa vie, par sa doctrine et par ses mœurs. Si tu juges donc que tu es encombré par l'intrusion d'une personne de ce genre, tu as la libre faculté de le refuser parce que, selon le décret du pape Célestin : « Une autre personne venant d'une autre église ne doit être finalement élue que si aucun homme digne ne peut être trouvé parmi le clergé de cette cité même pour laquelle on doit ordonner un évêque, ce que nous ne croyons pas pouvoir arriver. » Et, comme tu le sais de toi-même, il me semble superflu de t'apprendre sur quelles autorités tu dois refuser les inconnus et ceux qui arrivent par des voies de traverse. Cependant je te conseille d'informer l'abbé de Marmoutier, dont il est encore moine, pour qu'il retienne ledit Évrard d'une telle ambition et qu'il le contraigne par la sévérité de la règle si c'est nécessaire. Car bien que ce dernier ait consenti à ce qu'il devienne abbé, cela ne l'a cependant pas délivré du joug de la discipline monastique. Adieu.