« yves-de-chartres-43 »


Général

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    Yves, évêque de Chartres

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    Urbain 2, pape

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    après 1095/05 - avant 1099


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    [après mai 1095]

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    Lettre

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    Domno et patri suo Urbano, summo pontifici, Ivo, humilis Ecclesiae Carnotensis minister, cum Petro pugnare et cum Petro regnare.

    Quoniam Romana Ecclesia post multa naufragia sub vestro regimine ad portum pene jam pervenit(1) et Italiae regnum jamdiu rebelle in conspectu vestro totum pene conticuit, ita ut novus rex ad voluntatem Dei et vestram in manus vestras se dederit(2), gaudeo in Domino(3) et gaudium meum nullis syllabarum metis explicare sufficio. Quotidianas etiam preces coram Deo pro vestra incolumitate et pace multiplico, ut sermo Dei per vos currat(4) et de die in diem(5) magis proficiat et bona, quae per vos inchoavit, ad finem usque perducat(6).

    Notum autem facio sublimitati vestrae quod Guillelmum, bonae spei fratrem in Carnotensi Ecclesia nutritum, Parisiensis Ecclesia elegit in episcopum(7). Qui quidem sine consilio et assensu nostro nihil tale praesumere voluit. Misimus itaque cum eo quosdam de fratribus qui diligenter inquirerent utrum in eum vota omnium concurrerent, utrum haec electio mediante pecunia, vel aliqua esset a rege extorta violentia. Quibus bene cuncta renuntiantibus, illi fratri dedimus consilium et assensum ut illi electioni cederet et divinae ordinationi se non subduceret. Timebamus enim ne alius ex transverso se intruderet, et Ecclesiam simoniaca peste macularet. Addidimus quoque consilio ejus, quia aliquantulum infra annos legitimos nobis esse videbatur, ut promotiones ad gradus ecclesiasticos per congrua intervalla differret(8), et interim, aut per se aut per nuntios Ecclesiae, pro his quae ad integritatem ordinationis minus sunt a paternitate vestra indulgentiam postularet.

    Quod scribo absens, si opportunitas se offerret, dicerem praesens ; et pro ipsa Ecclesia et cum ipsa Ecclesia a paternitate vestra magna in vos fiducia(a) postulo ut nulli aemulo de ejus insimulatione aurem de caetero commodetis(b), et per praesentium latorem mihi et ipsi Ecclesiae litteris vestris quo ordine et quo(c) modo res incoepta ad exitum cum gratia vestra perduci possit vos ipse disponatis. Conterat Dominus Satanam, oro, sub pedibus vestris(9). Valete.


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    magnam in vos fiduciam M 

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    aurem accommodetis ATM éd.

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    om. ATM éd. L.


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    Allusion aux difficultés qu'a eues Urbain II pour prendre possession de son siège, voir lettre 41.

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    Conrad, fils de l'empereur Henri IV, et en révolte contre lui, fut couronné roi d'Italie en 1093.

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    D'après Phil. 4, 4.

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    II Thess. 3, 1.

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    II Cor. 4, 16.

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    Sur ce topos, voir lettre 40.

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    Guillaume de Montfort, fils de Simon Ier (mort en 1087), seigneur de Montfort (Montfort-l'Amaury, cant., arr. Rambouillet, Yvelines), demi-frère de Bertrade, succéda à Geoffroy de Boulogne, mort le Ier mai 1095, comme évêque de Paris en 1095/1096 et mourut en Terre Sainte le 27 août 1101.

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    Pour ne pas être tenu pour néophyte, il fallait avoir un âge requis (30 ans pour la prêtrise, textes réunis dans Panormie 3, 28-35) et observer les interstices entre les grades, soit rester 5 ans diacre, 3 ans prêtre. Silvestre, c. 7, Fausses décrétales, éd. Hinschius, p. 450. Célestin aux évêques de Gaule, c. 3, ibid. p. 560. Yves, Décret 5, 72 (Gratien, D. 59, 4). Ces points furent rigoureusement surveillés par les grégoriens comme Geoffroy de Vendôme, qui assimile cette transgression à l'hérésie simoniaque, lettres 35, 142, éd. citée, p. 67, 309. Le concile de Troyes en 1107 encore, c. 2-3, énumère les grades successifs. Mais bien des évêques ou archevêques, qui furent des gens dignes, obtenaient des dispenses, tels Manassès de Reims, Jean de Thérouanne, voir les lettres de Lambert d'Arras, Registre, E. 13, 50.

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    Rom. 16, 20.


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    a. Avranches, BM 243, 29v-30


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    M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 19


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    T. Troyes, BM 1924, 80v-81


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    Au. Auxerre, BM 69, 14v-15


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    L. Lettres de saint Ives évêque de Chartres traduites et annotées par L. Merlet, Chartres, 1885,



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    À son seigneur et père Urbain, souverain pontife, Yves, humble ministre de l'Église de Chartres, combattre avec Pierre et régner avec Pierre.

    Puisque l'Église romaine, après de nombreux naufrages, a désormais sous votre direction presque atteint le port et que le royaume d'Italie, longtemps rebelle, s'est presque tout entier apaisé à votre vue, de sorte que le nouveau roi s'est remis en vos mains selon la volonté de Dieu et la vôtre, je me réjouis dans le Seigneur et je ne réussis à étaler ma joie dans aucune des bornes des mots. Je multiplie même les prières quotidiennes devant Dieu pour votre salut et votre paix, pour que la parole de Dieu se répande par votre entremise et progresse davantage de jour en jour et mène à bonne fin les biens qu'elle a entrepris grâce à vous.

    Or je fais savoir à votre sublimité que l'Église de Paris a élu comme évêque Guillaume, frère de bonne espérance, élevé dans l'Église de Chartres. Il n'a assurément voulu prétendre à rien de tel sans notre conseil et notre approbation. C'est pourquoi nous avons envoyé auprès de lui certains de nos frères pour qu'ils recherchent soigneusement si les vœux de tous concordaient sur sa personne, si cette élection avait été extorquée moyennant argent ou par la violence du roi. Comme ils avaient fait un bon rapport sur tout ceci, nous avons donné à ce frère conseil et approbation pour qu'il accepte cette élection et ne se soustraie pas à l'ordre divin. Car nous craignions qu'un autre ne s'introduise par des voies de traverse et ne souille l'Église de la peste simoniaque. Nous lui avons également ajouté le conseil, parce qu'il nous semblait être un peu en dessous de l'âge légitime, de séparer par des intervalles convenables ses promotions aux grades ecclésiastiques et entre temps, soit par lui-même soit par des envoyés de son Église, de réclamer l'indulgence de votre paternité pour ce qui manque à l'intégrité de son ordination.

    Ce que j'écris absent, je le dirais présent si l'opportunité se présentait ; et pour cette Église et avec cette Église je demande à votre paternité, avec une grande confiance en vous, de ne plus prêter l'oreille à aucun rival qui le calomnierait et de décider vous-même, par une lettre de vous adressée à moi et à cette Église par le porteur de la présente, dans quel ordre et de quelle manière l'affaire entreprise peut être menée à sa fin avec votre grâce. Que le Seigneur écrase Satan sous vos pieds, je l'en prie. Adieu.

Informations

Acte

admin ydc (IRHT), dans  Yves de Chartres

Lettres d'Yves de Chartres, éd. G. Giordanengo (agrégée de l'Université), éd. électronique TELMA (IRHT), Orléans, 2017 [en ligne], acte n. 20980 (yves-de-chartres-43), http://telma.irht.cnrs.fr/chartes/yves-de-chartres/notice/20980 (mise à jour : 21/09/2017).