Général
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Yves, évêque de Chartres
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Gautier 2, évêque de Meaux
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après 1096 - avant 1098
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[entre 1096 et 1098](1)
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Lettre
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Ivo, humilis Ecclesiae Carnotensis servus, Galterio, Meldensi episcopo(2), sancta sapere et sancta facere.
Quoniam zelus domus Dei (3) tepere non debet in cordibus nostris, ejusdem domus decorem diligere(4) et pro eadem domo murum nos oportet opponere(5), ut impetus, quos super eam facit antiquus hostis, aut praecavendo propulsemus, aut si jam in eam per aliquam partem irrupit, cooperante Dei gratia, collectis in unum animi viribus, excludamus. Et quamvis difficilior sit labor ruinosa reficere quam integra in suo statu custodire, nos tamen per angusta et ardua, inter cruentationes etiam spinarum(6), inter incerta itinera nebularum, debemus perdita quaerere, dispersa colligere, quantum in nobis est sordidata mundare, moniti et instructi exemplo summi patrisfamilias, qui relictis nonaginta novem ovibus in montibus, centensimam quae perierat, ipse quaesivit(7), suo sanguine redemit(8), et ad ovile a quo aberraverat reportavit. Ne ergo nobis tanquam pastoribus sua quaerentibus a summo Pastore cum nostra confusione exprobretur(9) : « Quod perierat non quaesistis, quod confractum erat non consolidastis ». Nullus nos privatus amor, nullius quamlibet excellentis personae favor, nulla spes commodorum, nullus timor incommodorum ab officii nostri intentione dimoveat, quominus errantes ad viam revocemus et animas propria fragilitate vel diabolica illusione deceptas de fauce lupi invisibilis eripere studeamus.
Quod ideo suggero dilectioni vestrae, quia tam ex verbis Turonensium monachorum(10) quam ex litteris dominae Adeleidis(a), venerabilis comitissae(11), audivi turpissimam famam de monasterio Sanctae Farae(12), quod jam non locus sanctimonialium, sed mulierum daemonialium prostibulum dicendum est, corpora sua ad turpes usus omni generi hominum prostituentium. Quae quidem si corrigi nollent et sibi tantum mortem facerent, tolerari forsitan possent ; sed quia multarum factae sunt laqueus animarum, suggero et consulo vigilantiae vestrae ut aut praedictas mulieres in loco suo et in suo ordine corrigatis aut, si id fieri non potest, religiosis monachis locum illum cum suis possessionibus committere studeatis; accepta tamen ab eis cautione ut praedictas mulieres sub arcta disciplina coerceant et eisdem necessaria de rebus monasterii, quandiu vixerint, provideant. Hoc enim modo multiplicem fructum de bono principio facietis, quia et incontinentes illas mulieres ad propositum continentiae reducetis, et possessiones monasterii necessitatibus sanctorum a fidelibus deputatas in suum statum reformabitis, et detestabilem famam religiosa monasteria malo odore contristantem compescetis et incestuosorum animas ex earum contubernio pereuntes ab aeterno interitu liberabitis.
Quae vobis scribo, ex visceribus profero charitatis(13), idem mihi a vobis fieri desiderans, si me desidem in simili periculo audieritis. In via Dei namque ambulantes(14), mutuas exhortationum manus nobis invicem porrigere debemus, ut in perventione pariter de manipulis aeternorum fructuum gaudeamus(15). Valete.
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domnae Adelae al.
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Dates où la comtesse Adèle, qui est l'interlocutrice dans cette lettre, exerça la régence en l'absence de son mari Étienne-Henri parti en Terre Sainte, voir lettre 49.
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Gautier de Chambly, évêque de Meaux, 1085-1102.
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Ps. 68, 10 ; Joh. 2, 17.
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Ps. 25, 8.
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D'après Ez. 13, 5. Toute la lettre est remplie de vocabulaire biblique.
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Métaphores similaires, d'inspiration biblique, lettres 4, 272.
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D'après Matth. 18, 12-13 et Luc. 15, 4-7.
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D'après Apoc. 5, 9.
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Ez. 34, 4.
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Moines de l'abbaye de Marmoutier.
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Voir lettre 5.
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Abbaye de moniales bénédictines de Faremoutiers, cant. Coulommiers, arr. Meaux, Seine-et-Marne, diocèse de Meaux, fondée au VII
esiècle par sainte Fare, donnée par Philippe Ieraux moines de Marmoutier, M. Prou,Recueil des actes de Philippe Ier, n° 137, date incertaine après novembre 1090 et avant 7 avril 1100, p. 345-346 et note, qui souligne la relation entre la lettre de Philippe Ieret celle d'Yves dont il suggère la datation.
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Col. 3, 12.
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D'après Ps. 118, 3.
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D'après Ps. 125, 6.
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a. Avranches, BM 243, 46rv
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 30rv
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T. Troyes, BM 1924, 93v-94v
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Au. Auxerre, BM 69, 35rv
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Yves, humble serviteur de l'Église de Chartres, à Gautier, évêque de Meaux, savoir saintement et agir saintement.
Puisque le zèle de la maison de Dieu ne doit pas tiédir en nos cœurs, il nous faut aimer l'honneur de sa maison et opposer un mur pour cette même maison, afin que les assauts que fait sur elle l'antique ennemi soit nous les repoussions en les prévoyant soit, s'il a déjà fait irruption en elle par quelque endroit, nous le chassions, avec l'aide de la grâce de Dieu, en réunissant en commun les forces de notre esprit. Et bien que ce soit un labeur plus ardu de réparer ce qui est en ruines que de maintenir en son état ce qui est intact, nous devons cependant, à travers les sentiers étroits et rudes, à travers même les blessures des épines, à travers les trajets incertains dans les brouillards, rechercher ce qui est perdu, rassembler ce qui est dispersé, purifier autant qu'il est en nous ce qui est souillé, conseillés et instruits par l'exemple du très haut père de famille qui, abandonnant quatre-vingt-dix-neuf brebis dans les montagnes, rechercha en personne la centième qui s'était perdue, la racheta de son sang et la ramena vers le troupeau dont elle s'était écartée. Qu'il ne nous soit donc pas reproché pour notre confusion par le très haut pasteur, comme à des pasteurs qui recherchent leur intérêt : « Vous n'avez pas cherché ce qui s'était égaré, vous n'avez pas consolidé ce qui s'était brisé. » Qu'aucun amour privé, que la faveur d'aucune personne même très haut placée, qu'aucun espoir d'avantages, qu'aucune peur de désavantages ne nous détournent du dessein de notre office, en nous empêchant de ramener sur le chemin ceux qui errent et de nous appliquer à arracher de la gueule du loup invisible les âmes trompées par leur propre fragilité ou par l'illusion diabolique.
Voilà pourquoi j'évoque ceci à votre dilection : tant d'après les termes des moines de Tours que d'après la lettre de dame Adélaïde, vénérable comtesse, j'ai entendu une rumeur très honteuse concernant le monastère de Sainte-Fare, qu'on ne doit plus appeler lieu de saintes moniales mais de prostitution de femmes démoniaques, prostituant leurs corps à des usages honteux pour toute sorte d'hommes. Assurément, si elles ne voulaient pas se corriger et ne causaient la mort que pour elles-mêmes, on pourrait peut-être les tolérer ; mais parce qu'elles sont devenues les lacs de beaucoup d'âmes, je suggère et conseille à votre vigilance soit de corriger lesdites femmes dans leur lieu et leur ordre soit, si cela ne peut se faire, de veiller à confier ce lieu avec ses possessions à des moines religieux, après avoir cependant reçu d'eux la garantie qu'ils contraignent desdites femmes sous une discipline sévère et qu'ils les pourvoient du nécessaire sur les biens monastiques, aussi longtemps qu'elles vivront. Car de cette manière, d'un bon commencement vous ferez une récolte abondante parce que vous ramènerez à leur propos de continence ces femmes incontinentes, vous remettrez dans leur état premier les possessions du monastère destinées par les fidèles aux besoins des saints, vous contiendrez la détestable réputation qui attriste d'une mauvaise odeur les monastères religieux et vous libèrerez de la ruine éternelle les âmes des incestueux qui périssent de leur fréquentation.
Ce que je vous écris, je le tire du sein de la charité, désirant que vous fassiez pour moi la même chose, si vous apprenez que je m'enfonce dans un péril semblable. Car marchant dans la voie de Dieu nous devons nous tendre réciproquement les mains des exhortations pour qu'à l'arrivée nous nous réjouissions ensemble des poignées de fruits éternels. Adieu.