Général
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Yves, évêque de Chartres
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Jean 2, évêque d’Orléans
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après 1097 - avant 1116
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n.c.
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Lettre
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Johanni, Dei gratia Aurelianensium episcopo, Ivo, eadem gratia Carnotensis ecclesiae minister, salutem et dilectionem in Domino.
Venerunt ad nos quidam fratres qui in episcopatu vestro communiter vivunt, sollicite quaerentes utrum clerici regulariter viventes parrochias regere possint et animarum habere custodiam(1). Quibus hoc respondi quia in primitiva Ecclesia nullus constitutus est rector animarum, nisi de communi vita assumptus, quia nemo rectius custos praeponitur vitae alienae quam qui prius factus est custos vitae suae. Quod nullo in loco melius probatur quam inter eos in quibus regularis vita vigere videtur, quibus tantum displicet aliena malitia quantum prius displicuit sua(2). Unde Clemens in quarta epistola sua(3) : « Communis vita, fratres, omnibus necessaria est, et maxime iis qui irreprehensibiliter vivere cupiunt et apostolorum vitam eorumque discipulorum imitari volunt. » Et in sequentibus(4) : « Unde consilium dantes, vestram prudentiam hortamur ut ab apostolicis regulis non recedatis, sed communem vitam ducentes et Scripturas sacras intelligentes quae Deo vovistis adimplere studeatis. » Inde etiam papa Urbanus in primo Decretali suo(5) : « Scimus vos non ignorare, fratres, quia vita communis inter bonos Christianos hactenus viguit et adhuc gratia Dei viget, maxime inter eos qui in sortem Domini electi sunt, id est inter clericos. »
Hae sententiae apostolicae nullum clericum a communi vita excipiunt, nec civilis, nec suburbanae ecclesiae presbyterum. Quod vero communis vita in omnibus ecclesiis pene defecit tam civilibus quam dioecesianis, non auctoritati, sed desuetudini et defectui ascribendum est, refrigescente charitate, quae omnia vult habere communia, et regnante cupiditate, quae non quaerit ea quae Dei sunt(6) et proximi, sed tantum quae sunt propria. His rationibus et auctoritatibus freti, constanter asserimus non esse audiendos qui clericos regulariter viventes a regimine animarum judicant repellendos, quia saeculo renuntiaverunt, sed ideo potius ad hoc assumendos, quia voluptates(a) et pompas saeculi contempserunt. Non enim mundi contractus est animas a vitiis avocare et ad virtutum celsitudinem provocare. Ideo convenientius ista docent qui ea quae dicunt opere complent, quam ii(b) qui sunt doctores legis et non factores legis(7). Non tamen ad hoc officium alii assumendi sunt, nisi quos vita et doctrina commendat et episcopalis auctoritas ad hoc agendum idoneos probat. Haec fraterne scripsi dilectioni vestrae ut eorum qui sua quaerunt rapacitatem adversus pusillum Dei gregem(8) compescatis et in clericali militia quiete vivere faciatis. Valete.
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his A
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voluntates A
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hi A.
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Ce sujet est déjà abordé dans la lettre 69. Les arguments sont similaires même s'il n'y a aucune reprise exacte de termes.
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Phrase similaire lettre 69.
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Epistola Clementis, De communi vita, c. 82,Fausses décrétales, éd. Hinschius, p. 65. Les deux citations de Clément ne sont présentes que dans laTripartitaA1.1, 23-24 (Gratien, 12, 1, 2).
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Epistola Clementis, De communi vita, c. 85,Fausses décrétales, éd. Hinschius., p. 66 (Gratien,ibid.).
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Decreta Urbani, c. 1,Fausses décrétales, éd. Hinschius, p. 143. Yves,Décret3, 139 (Gratien, 12, 1, 9).
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Matth. 16, 23 et
passim.
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D'après Rom. 2, 13, opposition entre
auditores et doctoreslegis, et I Tim. 1, 7 pourfactores legis.
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Luc. 12, 32.
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a. Avranches, BM 243, 111rv
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 85v-86
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À Jean, par la grâce de Dieu évêque des Orléanais, Yves, par la même grâce ministre de l'Église de Chartres, salut et affection dans le Seigneur.
Quelques frères qui vivent en commun dans votre évêché sont venus auprès de nous nous demander avec sollicitude si des clercs vivant selon la règle pouvaient diriger des paroisses et avoir la garde des âmes. Je leur ai répondu que dans la primitive Église personne n'a été institué directeur des âmes à moins de venir de la vie commune, parce que personne ne peut être plus sagement préposé comme gardien de la vie d'autrui que celui qui a d'abord été fait gardien de sa propre vie. On ne peut en faire l'expérience nulle part ailleurs mieux que parmi ceux chez qui l'on voit prospérer la vie régulière, à qui la méchanceté d'autrui déplaît d'autant plus que la leur leur a d'abord déplu. Aussi Clément dans sa quatrième épitre : « La vie commune, frères, est nécessaire à tous, et surtout à ceux qui désirent vivre de manière irrépréhensible et veulent imiter la vie des apôtres et de leurs disciples. » Et dans la suite : « Aussi, en vous donnant ce conseil, exhortons-nous votre prudence à ne pas vous écarter des règles apostoliques mais, en menant une vie commune et en comprenant les Écritures saintes, appliquez-vous à accomplir le vœu que vous avez fait à Dieu. » Et aussi le pape Urbain dans sa première décrétale : « Nous savons que vous n'ignorez pas, frères, que la vie commune a jusqu'à maintenant prospéré parmi les bons chrétiens et, grâce à Dieu, prospère encore, surtout parmi ceux qui ont été choisis pour l'œuvre du Seigneur, c'est-à-dire les clercs. »
Ces sentences apostoliques n'exceptent aucun clerc de la vie commune, que ce soit le prêtre de l'église de la cité ou des faubourgs. Et que la vie commune ait disparu dans presque toutes les églises tant des cités que des diocèses doit être imputé non à l'autorité mais à la désuétude et à la défection, parce que se refroidit la charité, qui veut que tout soit en commun, et que règne la cupidité, qui ne recherche pas ce qui est de Dieu et du prochain, mais seulement ce qui est propre à chacun. Fort de ces raisons et autorités, nous assurons fermement qu'il ne faut pas écouter ceux qui jugent que doivent être écartés du gouvernement des âmes les clercs qui vivent selon la règle, parce qu'ils ont renoncé au siècle, mais plutôt qu'il faut se les attacher, parce qu'ils ont méprisé les plaisirs et les pompes du siècle. Car la convention du monde n'est pas d'écarter les âmes des vices et de les amener à la hauteur des vertus. C'est pourquoi ceux qui accomplissent en action ce qu'ils disent enseignent plus convenablement ces choses que ceux qui sont docteurs de la loi et non acteurs de la loi. Toutefois il ne faut élever à cet office personne d'autre que ceux que recommandent leur vie et leur doctrine et que l'autorité épiscopale approuve comme aptes à cette fonction. J'ai écrit ceci à votre dilection pour que vous réprimiez la rapacité de ceux qui recherchent leurs intérêts contre le petit troupeau de Dieu et que vous fassiez vivre dans le repos ceux qui appartiennent à la milice cléricale. Adieu.