Général
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Yves, évêque de Chartres
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Hildebert, évêque du Mans
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après 1097 - avant 1116
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n.c.
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Lettre
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Hildeberto, Dei gratia Cenomanensi episcopo, Ivo, humilis Carnotensis Ecclesiae minister, salutem.
De subdiacono respersione infamiae lacerato, nihil respondere dilectioni vestrae possumus quod non noverit vestra prudentia. Sed quia gratum est cuique(a) recte consideranti cum multos cognoverit in unam convenire sententiam, non est ingratum parvitati nostrae ea scribere quae ex auctoritate Patrum collegimus et quod ipsi in hujusmodi negotiis observare consuevimus.
Dicit enim beatus Augustinus(1) : « Nos quemquam a communione removere non possumus, nisi aut sponte confessum, aut in aliquo vel saeculari vel ecclesiastico judicio nominatum atque convictum. » Inde et Stephanus papa quintus de quodam diacono ex infamia(b) accusato ita scribit Leoni, Tianensi episcopo(2) : « Si suspicio super diaconum habetur, et accusatores idonei reperiuntur et testes quales sacri canones sanciunt, cum fuerit legitimis testibus approbatus, canonica sententia feriatur ; quod si nec sponte confitetur neque legitimi accusatores vel testes reperti fuerint et mala fama crebrescit, non publico examine, sed coram te et coram reverendissimis presbyteris et diaconibus secreto juramento se purget et boni testimonii permaneat. » De simili negotio papa Nicolaus ita scribit Salomoni, episcopo Constantiensi(3) : « Si, examinante episcopo causam presbyteri vel diaconi, non fuerit ille presbyter vel diaconus per testium approbationem forte convictus, non est scelus episcopo legitime manifestum, nisi forte presbyter vel diaconus scelus sponte sua confiteatur. Sola enim spontanea confessio et legitimus numerus, vel qualitas testium, decernentibus episcopis et accusatore quod objecerat comprobante, clericum privat proprio gradu. » Hinc beatus Gregorius scribit Johanni, Panormitano episcopo(4) : « Si quid de quocumque clerico ad aures tuas pervenerit, quod juste possit offendere, non facile credas nec(c) ad vindictam te accendat res incognita. » Unde idem in quadam epistola(5) : « Si sacerdos vel quilibet clericus a populo fuerit accusatus, si certi testes non fuerint qui crimini illato approbent veritatem, jusjurandum erit in medio, ut(d) illum testem proferat de innocentiae suae puritate, cui nuda et aperta sunt omnia(6), sicque maneat in proprio gradu. »
Haec praetaxatorum Patrum auctoritas comprobare videtur quod quilibet clericus mala fama(e) pulsatus sola se manu possit purgare et in suo gradu permanere. Verum posterorum(f) diligentia, experta quod temeraria hominum cupiditas facile adderet flagitio perjurium, districtiorem ad sedandam presbyteri infamiam sanxit purgationem, addens aliquid severitati ut sacerdotum studiosius consuleret honestati, in quorum ore non est apud simplices verbum Dei pretiosum, si non habeant etiam ab his qui foris sunt bonum testimonium(7). Posuerunt autem haec in discretione episcoporum ut, secundum quod audiunt malam famam presbyterorum crebrescere et ingravescere, exigant purgatoria sacramenta a presbyteris infamatis cum tribus, aut quinque, aut septem collegis. Unde ita continetur in concilio Hilerdensi, capitulo X(8) : « Si quis presbyter a plebe sibi commissa fuerit infamatus et episcopus legitimis testibus approbare non potuerit, suspendatur usque ad dignam satisfactionem, ne populus in eo scandalum patiatur. Sed sive secundum canones, sive ad arbitrium episcopi, collegas sibi quinque vel septem adjungat, cum quibus, coram posito sacro Evangelio, juret immunem se esse ab objecto crimine. » Quam satisfactionem nonnulli praecedentium Patrum in consuetudinem duxerunt, exemplo Leonis papae per sacramenta purgati(9).
His et hujusmodi dictis et exemplis credimus in potestate episcoporum esse purgationem sacerdotum vel exaggerare vel temperare, secundum quod intelligunt, et famae eorum consultum, et saluti plebium sibi commissarum esse necessarium. Scripsissemus vobis plura, sed nec ista intelligimus prudentiae vestra esse necessaria. Valete.
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unicuique éd.
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ex infamia éd.] per famam AMTAu
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ne M éd.
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et AMTAu
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mala sola MTAu
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posteriorum AMTAu.
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Augustin,
Sermo351, voir lettres 90, 186.
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Étienne VI (885-891), Jaffé 2655, Yves,
Décret6, 430 (Gratien, 15, 5, 1). Teano, évêché de la province de Caserte.
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Nicolas I (858-867), Jaffé 2155, Yves,
Décret6, 122 (Gratien, 15, 5, 2).
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Grégoire le Grand, l. 13,
ep. 45,CCSL140A, p. 1051,Coll. Tr. I, 55, 15 (Gratien, 15, 7, 2).
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Grégoire II,
ep. ad Bonifacium, 726. Yves,Décret6, 231 ;Panormie5, 9 (Gratien, 2, 5, 5). Yves fait une confusion entre les deux Grégoire.
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Hebr. 4, 13.
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I Tim. 3, 7.
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Attribué au concile de Lérida dans les collections d'Yves, mais
caput incertumd'après Friedberg. Yves,Décret6, 229 ;Panormie5, 2 (Gratien, 2, 5, 13).
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Léon III (795-816), pour se disculper des accusations d'adultère et de parjure portées par ses adversaires, prêta un serment purgatoire en 800 devant l'empereur Charlemagne,
Dictionnaire historique de la papauté, p. 1020-1022. Il est fait allusion à ce serment dans Yves,Décret5, 313 ; les décrets de Léon et sa réponse à Charlemagne sont citésDécret6, 419 ;Panormie5, 3-4 (Gratien, 2, 5, 19). Voir aussi lettre 229.
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a. Avranches, BM 243, 109rv
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M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 76rv
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T. Troyes, BM 1924, 36rv
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Au. Auxerre, BM 69, 85v-86v
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À Hildebert, par la grâce de Dieu évêque du Mans, Yves, humble ministre de l'Église de Chartres, salut.
Au sujet de l'archidiacre qui a été déchiré par des éclaboussures d'infamie, nous ne pouvons rien répondre à votre dilection que votre prudence ne connaisse. Mais parce qu'il est agréable à quiconque réfléchit avec droiture de savoir que beaucoup concordent sur une opinion unique, il n'est pas désagréable à notre petitesse d'écrire ce que nous avons recueilli d'après l'autorité des Pères et ce que nous avons eu nous-même coutume d'observer dans des affaires de ce genre.
Le bienheureux Augustin dit en effet : « Nous ne pouvons écarter quelqu'un de la communion s'il n'a pas spontanément avoué ou s'il n'a pas été cité et convaincu dans un jugement ou séculier ou ecclésiastique. » Le pape Étienne V également écrit ainsi à Léon, évêque de Teano, à propos d'un diacre accusé d'infamie : « S'il y a soupçon sur ce diacre, si on trouve des accusateurs qualifiés et des témoins tels que les canons le prescrivent, quand la preuve aura été fournie par des temoins légitimes, qu'il soit frappé par la sentence canonique ; mais s'il n'a pas avoué spontanément, si des accusateurs ou des témoins légitimes n'ont pas été trouvés et si la mauvaise rumeur continue à se répandre, qu'il se justifie non dans une enquête publique, mais devant toi et devant de très révérends prêtres et diacres par un serment secret et qu'il demeure digne de bon témoignage. » Sur une affaire semblable le pape Nicolas écrit ainsi à Salomon, évêque de Constance : « Si, quand un évêque examine la cause d'un prêtre ou d'un diacre, ce prêtre ou ce diacre n'est pas convaincu par une preuve apportée par des témoins, le crime n'est pas pour l'évêque manifeste selon les règles, à moins que le prêtre ou le diacre n'avoue son crime spontanément. Car seule la confession spontanée et le nombre légal ou la qualité des témoins, avec la décision des évêques et la preuve de ce qu'il a objecté fournie par l'accusateur, privent un clerc de son grade. » Le bienheureux Grégoire écrit aussi à Jean, évêque de Palerme : « Si parvient à tes oreilles à propos d'un clerc quelque chose qui puisse lui porter offense à juste titre, ne le croie pas facilement, de peur d'être poussé au châtiment pour un fait que tu ne connais pas. » Et aussi le même dans une lettre : « Si un prêtre ou un clerc quelconque a été accusé par le peuple, s'il n'y a pas de témoins sûrs pour prouver la vérité sur le crime commis, il fera un serment publiquement afin de se présenter lui-même comme témoin de la pureté de son innocence devant celui pour qui toutes choses sont nues et découvertes, et afin de demeurer ainsi dans son propre grade. »
Cette autorité des Pères cités semble prouver que tout clerc frappé par une mauvaise rumeur peut se justifier de sa propre main et demeurer en son grade. Mais l'attention de ceux qui sont venus ensuite, qui avait remarqué que la cupidité téméraire des hommes ajoutait facilement le parjure au délit, décida d'une justification plus stricte afin de faire cesser l'infamie du prêtre, ajoutant quelque chose à la sévérité pour veiller avec plus de zèle sur l'honorabilité des prêtres, dans la bouche de qui la parole de Dieu n'est pas précieuse auprès des simples s'ils n'ont pas une bonne réputation également auprès de ceux qui sont au dehors. Ils mirent donc ces choses à la discrétion des évêques pour que, dans la mesure où ils apprennent que la mauvaise rumeur sur des prêtres se répand et s'aggrave, ils exigent des prêtres victimes d'infamie les serments justificatifs avec trois ou cinq ou sept collègues. Aussi est-il dit dans le concile de Lérida, chapitre X : « Si un prêtre a été taxé d'infamie par le peuple qui lui a été confié et que l'évêque ne peut en avoir la preuve avec des témoins légitimes, qu'il soit suspendu jusqu'à une digne satisfaction, de peur que le peuple ne souffre du scandale. Mais, soit selon les canons soit selon la décision de l'évêque, qu'il s'adjoigne cinq ou sept collègues avec lesquels il jure, devant le saint Évangile, qu'il est innocent du crime qui lui est reproché. » Cette satisfaction, quelques-uns des Pères précédents en prirent l'habitude, à l'exemple du pape Léon justifié par des serments.
D'après ces paroles et exemples et d'autres du même genre, nous croyons qu'il est au pouvoir des évêques ou d'aggraver ou de tempérer la pénitence des prêtres, selon ce qu'ils pensent, et qu'il leur est nécessaire de veiller à leur renommée et au salut des peuples qui leur sont confiés. Nous vous en aurions écrit davantage, mais nous savons que ce n'est pas nécessaire à votre prudence. Adieu.