« yves-de-chartres-55 »


Général

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    Yves, évêque de Chartres

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    Hugues de Die, archevêque de Lyon

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    après 1096/07/12 - avant 1106


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    [après le 12 juillet 1096]

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    Lettre

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    Hugoni, Dei gratia Lugdunensi archiepiscopo, apostolicae sedis legato, Ivo, humilis Ecclesiae Carnotensis minister, cum debita obedientia fidele servitium.

    Causam Belvacensis electi(1) nuper apud Nemausum(2) coram domno papa familiariter ventilari vestra paternitas audivit et aliquando ut Belvacensi Ecclesiae secundum vota sua facta electio confirmaretur apud domnum papam(a) cum aliis intercessoribus intercessit. Sed quia domnus papa quibus de causis voluit praedictam electionem confirmare distulit, Ecclesia ab intentione sua non desistens, per diversa pericula, per laboriosa itinera post eum legationem misit, electum suum quem utilem sibi in recolligendis bonis suis quae male dispersa erant, fore praeviderat(b) et jam experta erat, summa devotione quaesivit ; multa precum ingeminatione promeruit, sic tamen ut super hoc vestra quaeratur benevolentia et desiderium supplicantis Ecclesiae vestra discretione impleatur sententia.

    Quoniam ergo exitus hujus negotii ex vestro pendet arbitrio, vigilantiam vestram multa precum instantia flagitamus ut, si aliquis venialis excessus, prout est humana conditio, in praedicti electi persona notatus est, quominus plena in eo videatur regularis integritas, provida hunc compensatione libretis et utili dispensatione(3) supportetis, praesertim cum Ecclesia praesens aeque sibi utilem non inveniat, quem cum pace regni et Ecclesiae consensu in episcopum eligat. Neque enim, ut nobis videtur, damnose aliquando rigor canonum remittitur ubi multorum utilitati providetur(4). Sic enim papa Pelagius quemdam Syracusanae urbis electum uxorem habentem et filios, cum ista occasione ordinationem ejus multo tempore distulisset, postea interveniente Cetego Patricio(5), quia Ecclesia in voluntatis suae proposito irrevocabiliter perstitit, accepta ab eo cautione quae competebat, ordinari permisit.

    In hunc quoque modum si velimus praeteriti et praesentis temporis exempla colligere, inveniemus principes Ecclesiarum quaedam pro rigore canonum districtius judicasse, multa pro temporum necessitate tolerasse, multa pro personarum utilitate(6) dissimulasse. Quae quia sollicitudini vestrae ignota esse non credimus, ea vobis enumerare superfluum duximus. Tantum provideat vestra vigilantia ne ulterius suspendendo ordinationem electi laboret et periclitetur Ecclesia. Quod si in hoc non bene consultum famae vestrae creditis, utile est et conducibile ut metropolitani sui et comprovincialium discretioni et providentiae cum vestra benevolentia committatis. Valete.


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    papam...domnum om.

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    providerat M.


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    Anseau, O. Guyotjeannin, Episcopus et comes, op. cit., p. 75, pense qu'il s'agit d'Anseau de Caix, frère d'Enguerrand Ier de Coucy, et non d'Anseau de Gerlande. Il fut élu évêque de Beauvais le 10 juillet 1096 mais, bien que favorisé par le roi et recommandé par Yves, il dut attendre trois ans avant d'être consacré, en 1099, année de sa mort († 21 nov. 1099). GC IX, 714, DHGE III, 443-444. Lambert d'Arras, Registre, E. 26, 32, 62.

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    Concile de Nîmes, 8-12 juillet 1096, O. Pontal, Les conciles, p. 234-237.

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    Jeu de mot compensatio/dispensatio.

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    Idée développée par Yves dans le Prologue concernant la dispense. Voir lettre 171.

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    Pélage, ep. 20 patricio Cetego, PL 69, 414. Anselme de Lucques, 6, 40. Coll. trip. P 1, 54, 12 (Gratien, D. 28, 13).

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    Mêmes expresions Prologue, éd. citée, § 19.


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    a. Avranches, BM 243, 35v-36


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    M. Montpellier, Ecole de médecine H 231, 22v-23


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    T. Troyes, BM 1924, 86v-87


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    Au. Auxerre, BM 69, 21rv



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    À Hugues, par la grâce de Dieu archevêque de Lyon, légat du siège apostolique, Yves, humble ministre de l'Église de Chartres, service fidèle avec l'obéissance qui est due.

    Votre paternité a entendu récemment à Nîmes agiter familièrement devant le seigneur pape la cause de l'élu de Beauvais et elle a alors intercédé avec les autres intercesseurs auprès du seigneur pape pour que soit confirmée pour l'Église de Beauvais l'élection qui avait eu lieu selon ses vœux. Mais parce que le seigneur pape a différé de confirmer ladite élection pour les raisons qu'il a voulues, l'Église, ne renonçant pas à son intention, a envoyé, à travers des périls divers, des itinéraires difficiles, une délégation auprès de lui et lui a demandé avec grande dévotion son élu, dont elle avait prévu, et en avait déjà fait l'expérience, qu'il lui serait utile dans le recouvrement de ses biens qui avaient été malheureusement dispersés ; elle l'a obtenu par le redoublement pressant de ses prières, à condition cependant que votre bienveillance soit requise sur ce sujet et que le désir de l'Église suppliante soit satisfait par une sentence de votre discrétion.

    Puisque l'issue de cette affaire dépend donc de votre décision, nous sollicitons votre vigilance par l'instance pressante de nos prières pour que, si quelque faute vénielle, comme il appartient à l'humaine condition, a été reconnue dans la personne de l'élu, empêchant qu'on ne trouve totalement en lui l'intégrité régulière, vous la pesiez avec un jugement prudent et la supportiez avec un utile ménagement, surtout que l'Église en ce moment ne trouve personne d'aussi utile qu'elle puisse élire comme évêque avec l'appui du royaume et le consentement de l'Église. En effet la rigueur des canons, nous semble-t-il, est parfois relâchée sans danger quand on veille à l'utilité de beaucoup. Car c'est ainsi que le pape Pélage avait longtemps différé d'ordonner un évêque élu de la ville de Syracuse pour la raison qu'il avait femme et fils ; ensuite sur l'intervention du patrice Cetegus, comme l'Église persistait irrévocablement dans la décision de sa volonté, il permit de l'ordonner après avoir reçu de lui la caution qui convenait.

    Si nous voulions aussi rassembler sur cette mesure les exemples du temps passé et du temps présent, nous trouverions que les chefs des Églises ont jugé certaines choses plus sévèrement selon la rigueur des canons, en ont toléré beaucoup selon la nécessité des temps, en ont dissimulé beaucoup selon l'utilité des personnes. Parce que nous ne croyons pas que ces exemples soient ignorés de votre sollicitude, nous avons jugé superflu de vous les énumérer. Que votre vigilance cependant, si elle remet à plus tard l'ordination de l'élu, s'assure de ne pas mettre l'Église en peine et en danger. Si vous croyez qu' en cela on n'a pas bien veillé à votre renommée, il est utile et avantageux que vous remettiez cette affaire, avec votre bienveillance, à la discrétion et à la prévoyance de son métropolitain et des évêques de la province. Adieu.

Informations

Acte

admin ydc (IRHT), dans  Yves de Chartres

Lettres d'Yves de Chartres, éd. G. Giordanengo (agrégée de l'Université), éd. électronique TELMA (IRHT), Orléans, 2017 [en ligne], acte n. 20992 (yves-de-chartres-55), http://telma.irht.cnrs.fr/chartes/yves-de-chartres/notice/20992 (mise à jour : 21/09/2017).