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Ostenderunt nobis Judaei nostri Lincolniae

Auteur

Henry III, King of England

Titre en français

Mandat obligeant les chrétiens à vendre des denrées alimentaires aux Juifs

Type de texte

Mandat

Texte

Rex Vicecomiti et Majori Cantuariae salutem. Ostenderunt nobis Judaei nostri Lincolniae quod occasione precepti venerabilium patrum sanctorum cantuariensis archiopiscopi et episcopi Lincoln, facti, de Judaeis, ne quis eis victualia vendat, nec communionem habet cum eis, nec inveniant aliquem qui eis aliquid vendet . Et ideo vobis precipimus quod visis litteris istis, precipi et clamari faciatis ex parte nostra, in baillia vestra, quod vendantur eis victualia et alia necessaria. Et si quem inveneritis qui eis deneget victualia et necessaria alia vendere in civitate Lincoln et alibi illum capiatis, et corpus ejus salvo custodiatis, donec aliud mandatum precipimus. Teste H.[Hubert de Burgh] etc. apud Westm. 10. die Nov. Eodem modo scribitur Majori et Preponitis Oxoniensi de Judeis oxoniensis, et Baillis de Norwic de Judeis norwicenses.

Langue

Latin

Source du texte original

Rotuli litterarum clausarum in Turri londinensi asservati, vol. 1 (London, 1833), 157.

Datation

  • Date fixe : 10/11/1222

Aire géographique

Traduction française

Le roi au Sheriff de Lincoln et au Maire de Canterbury, salut. Nos juifs nous ont montré que, par un édit des saints pères, l’archevêque de Canterbury et l’évêque de Lincoln, on a décrété concernant les juifs que personne ne doit leur vendre des victuailles ni communiquer avec eux, ni recevoir quelqu’un qui leur vendent quoi que ce soit. Donc nous vous commandons que, une fois lues nos lettres, vous fassiez ordonner et proclamer de notre part, dans vos baillages, qu’on leur vende de la nourriture. Et si vous trouvez quelqu’un qui refuse de leur vendre de la nourriture et autres choses nécessaires, dans la ville de Canterbury ou ailleurs, arrêtez-le, et gardez-le sain et sauf en attendant nos ordres. Témoignent H. [Hubert de Burgh], etc., à Westminster, le 10 novembre. De la même manière on écrivit au maire et et prévôt d'Oxford concernant les juifs d'Oxford et au bailli de Norwich concernant les Juifs de Norwich.

Source traduction française

J. Tolan

Résumé et contexte

Dans ce mandat, Hubert de Burgh, justicier en chef et régent du roi Henri III alors âgé de 15 ans, émet, au nom du roi, un ordre aux chrétiens de Lincoln selon lequel ils vendront des vivres et d’autres biens de nécessité aux juifs. Les juifs de Lincoln (et apparemment d’Oxford et de Norwich, puisque des lettres similaires furent adressées aux officiers royaux de ces cités) se sont plaints au roi que l’archevêque de Canterbury et l’évêque de Lincoln ont interdit aux chrétiens de vendre leur nourriture aux juifs. Pareille interdiction, évidemment, rendrait la vie impossible pour ces juifs. Le mandat n’explique pas pourquoi cette interdiction fut promulguée, mais le concile ecclésiastique d’Oxford tenu en avril de la même année nous donne une forte présomption. Ce conseil, sous la direction de Stephen Langton, archevêque de Canterbury, a établi, entre autres choses, que les juifs ne pouvaient avoir de serviteurs chrétiens travaillant dans leurs habitations. Ils ont également établi que les juifs devaient porter un insigne. Ce denier point leur fut commandé par un écrit royal de 1218 (http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252108/), mais la Couronne vendit un grand nombre d’exemptions, particulièrement en 1220 (http://form-tei.irht.cnrs.fr/manuscrit/affiche/id/268769 ). Parce que l’archevêque et l’évêque n’avaient pas d’autorité directe sur les juifs, ils semblent avoir décidé de leur mettre la pression en interdisant aux chrétiens de leur vendre de la nourriture et d’autres biens de nécessité. L’objectif de cette interdiction de vendre aux juifs est de les contraindre au respect de ces statuts ; le but n’est pas d’interdire de façon permanente tout commerce avec eux. Mais les juifs réussirent à obtenir l’annulation de l’interdiction par le roi, sans avoir à faire la moindre concession au clergé. Henri réaffirme avec force le monopole de son pouvoir sur ses « juifs », qui se trouvent sous sa protection.

Signification historique

Ce document témoigne de la tension entre la Couronne et l'église anglaise sur le statut des juifs d'Angleterre et sur le monopole du pouvoir royal sur eux. Il est possible de voir dans cette confrontation une lutte personnelle entre Hubert de Burgh et Stephen Langton, qui se sont aussi affrontés sur d'autres décisions. De façon plus fondamentale, il s'agit d'une confrontation entre les idéologies du roi et de l'Eglise. Les évêques cherchent à appliquer les canons du concile d'Oxford et à affirmer leur autorité sur leur troupeau chrétien en limitant leurs contacts avec les juifs. La Couronne réaffirme son monopole sur les juifs et ne souffre aucune interférence ecclésiastique.

Textes apparentés inclus dans le corpus

Traductions

  • Grayzel, 314-15

Mots-clés

; clergé ; Juifs/Judaïsme ; vente

Auteur de la notice

John   Tolan

Collaborateurs de la notice

Claire   Chauvin  :  traduction

Comment citer cette notice

Notice n°254390, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»

Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait254390/.

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