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Responsiones ad dubitabilia circa communicationem christianorum cum sarracenis[1]

Auteur

Raymundus de Peñafort

Gregorius IX

Titre en français

Réponses aux questions concernant les relations entre chrétiens et Sarrasins

Titre descriptif

Excommunication pour ceux qui vendent des bateaux aux musulmans

Type de texte

Avis de juriste

Texte

Cum ex constitutione domini Innocentii sint excommunicati qui uendunt naues et deferunt arma uel ferrum uel impendunt aliquod auxilium sarracenis, quid est quod ianuenses uendunt naues et maxime ueteres sarracenis, dicentes hoc sibi non fuisse prohibitum a prelatis suis? Respondemus: qui deferunt naues uel lignamina galearum, arma uel ferrum sunt excommunicati, quocumque tempore hoc faciant, et hoc per utrumque concilium. Qui uero alia deferunt in dispendium terre sancte sunt excommunicati per ultimum concilium. Uel si ad impugnandum christianos, sunt excommunicati per primum lateranense concilium.

Langue

Latin

Source du texte original

http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/76/12/57/PDF/Penyafort.pdf

Datation

  • Date fixe : 19/01/1235

Aire géographique

Traduction française

Puisque, sur ordre de sa Sainteté Innocent, ceux qui vendent des navires, transportent des armes ou du fer ou fournissent de l'aide aux Sarrasins sont excommuniés, que faut-il faire de ces Génois qui vendent des navires, en particulier des vieux bateaux, en disant que cela ne leur a pas été interdit par leurs propres prélats ? Nous répondons : ceux qui s'emparent de navires ou du bois des galères, d'armes ou de fer sont excommuniés, quel que soit le moment où ils le font, par les deux conciles. Car ceux qui font ce genre de commerce au détriment de la Terre Sainte sont excommuniés par le dernier concile [Latran IV] ; mais si le commerce de ces biens est destiné à combattre les chrétiens, ils sont excommuniés par le premier concile de Latran [en réalité Latran III].

Source traduction française

L. Foschia

Résumé et contexte

Le ministre franciscain et le prieur dominicain qui résidaient à Tunis ont rapporté au pape que des marchands génois vendaient des bateaux aux musulmans, en dépit des interdictions spécifiques formulées lors de Latran III, canon, 24, qui a interdit la vente des armes et du bois aux musulmans, interdictions reprises dans Latran IV, canon 71, qui les a cependant limitées au commerce avec "les sarrasins de l'Est", en d'autres termes les ennemis des croisés, ce qui permettait implicitement un commerce moins restrictif avec les musulmans du Maghreb. C'est peut-être cette ambiguïté qui autorise le clergé génois à fermer les yeux. Mais pour Grégoire et Raymond, de telles ventes contreviennent clairement aux interdictions commerciales décidées lors des deux conciles et appellent à une excommunication des marchands.

Signification historique

En plus d'une violation manifeste des interdictions commerciales des conciles, ce passage montre que les Génois ont remis en question l'autorité du ministre franciscain et prieur dominicain à Tunis. Les marchands génois affirmaient que leurs prélats n'avaient pas interdit ce commerce. Cela implique que les Génois, dont les intérêts économiques se situent clairement en bravant ces interdictions, ont des prêtres qui ferment les yeux. Les Génois ne reconnaissent aucune autorité aux ordres mendiants de Tunis pour prononcer leur excommunication : cette autorité relèverait sans doute de leurs propres prêtres, de leur archevêque, et en dernier ressort du pape. Parce qu'il n'y a pas d'évêque à Tunis, les Génois affirment avec insistance qu'ils obéissance à leur propre clergé. Dans sa réponse, le pape dépasse cette difficile question d'autorité, en insistant simplement sur le fait que ces marchands sont excommuniés par l'autorité de deux conciles ecclésiastiques : le troisième concile de Latran a prononcé l'excommunication de ceux qui vendent des armes à ceux qui combattent les chrétiens, tandis que le quatrième concile de Latran excommunie ceux qui font commerce "au détriment de la Terre Sainte". Grégoire avait récemment confirmé la nomination du franciscain Agnello comme évêque de Fez, pour servir la communauté chrétienne du califat Almohad ; l'établissement d'un évêque éliminait (du moins en théorie) le problème de juridiction si criant à Tunis.1 L'année suivante (1235), le pape envoya, comme émissaire au "Roi de Tunis" Abū Zakariyyā, Jean, "ministre des ordres mineurs sur les terres barbares".2 Il n'est pas sûr que ce Jean soit le même ministre franciscain qui (avec son contrepoint dominicain) envoya les quarante questions à Grégoire. Ce qui est évident, c'est que Grégoire entretient des contacts étroits avec les franciscains à Tunis et les emploie pour servir ses propres intérêts et pour agir comme des intermédiaires privilégiés avec l'émir.

1 . Voir M. de Mas Latrie, ed., Traités de paix et de commerce et documents divers concernant les relations des chrétiens avec les Arabes de l’Afrique septentrionale au Moyen Age (Paris, 1866 ; réimpr. New York, n.d.) vol 2., p. 10.

2 . Voir Mas Latrie, ed., Traités de paix et de commercevol 2., p. 11.

Liens

Textes apparentés inclus dans le corpus

Manuscrits

  • Il existe 7 manuscrits du Dubitabilia; pour les descriptions, voir Tolan, ed., p. 10-11.

Editions

  • F. Balme, C. Paban & I. Collomb, Raymundiana seu documenta quae pertinent ad S. Raymundi de Pennaforti vitam et scripta, Monumenta Ordinis Praedicatorum Historica 4 (Rome, 1898), p. 29-37.
  • X. Ochoa & A. Diaz, eds., Dubitabilia super communicationem Christianorum cum Sarracenis, in Universa bibliotheca iuris, volumen 1, S. Raimundus de Pennaforte, tomus C (Rome, 1978), cols 1024-36.
  • J. Rius Serra, Diplomatario : Documentos, Vida antigua, Crónicas, Procesos antiguos (Barcelona ,1954), p. 22-28.

Etudes

  • J. Tolan, “Taking Gratian to Africa: Raymond de Penyafort's legal advice to the Dominicans and Franciscans in Tunis (1234),” in A. Husain & K. Fleming, eds., A Faithful Sea: The Religious Cultures of the Mediterranean, 1200–1700 (Oxford, 2007), 47-63.
  • J. Tolan, “The legal status of religious minorities in the medieval Mediterranean world: a comparative study”, in M. Borgolte & B. Schneidmüller, eds., Hybride Kulturen im mittelalterlichen Europa: Vorträge und Workshops einter internationalen Frühlingsschule/Hybrid Cultures in Medieval Europe: Papers and Workshops of in International Spring School (Berlin, 2010), 141-49.
  • J. Tolan, “Marchands, mercenaires et captifs: le statut légal des chrétiens latin en terre d'islam selon le juriste canonique Ramon de Penyafort (XIIIe s.)”, in S. Boisselier, F, Clément & J. Tolan, eds., Minorités et régulations sociales en Méditerranée médievale (Rennes, 2010), 223-34.

Mots-clés

commerce ; excommunication

Auteur de la notice

John   Tolan

Collaborateurs de la notice

Laurence   Foschia  :  traduction

Claire   Chauvin  :  traduction

Comment citer cette notice

Notice n°252830, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»

Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252830/.

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