Réponses aux questions concernant les relations entre chrétiens et Sarrasins
Sur des croisés qui n'ont pas respecté leur voeu
Item, de dispensatione cum hiis qui, post crucis signationem, uenerunt in terram sarracenorum et post modum, multis de causis impediti, utpote quia duxerunt uxores ibi tacito quod essent crucesignati, uel quia non audent recedere propter metum sarracenorum. Respondemus: iniungatur alia penitentia crucesignatis qui propter infirmitatem, paupertatem uel timorem sarracenorum uotum implere non possunt; alii grauibus occupationibus detenti, non implicent se aliis, sed illis expeditis prosequantur uotum.
http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/76/12/57/PDF/Penyafort.pdf
Également, au sujet de la dispense de ceux qui, après avoir été marqués du signe de la croix, viennent en pays sarrasin et plus tard, pour de nombreuses et diverses raisons ne peuvent respecter le serment des croisés, soit parce qu'ils se sont mariés là-bas sans révéler qu'ils étaient marqués de la croix, soit parce qu'ils n'osent pas rentrer par crainte des Sarrasins. Nous répondons : un autre type de pénitence doit être imposé à ceux qui sont marqués de la croix et qui, pour cause de maladie, pauvreté ou par crainte sont incapable de respecter leur vœu. Les autres, qui sont pris par d'importantes tâches, ne doivent pas assumer de nouvelles charges mais une fois accomplis leurs autres devoirs, ils devront respecter leur vœu.
L. Foschia
C’est l’une des questions que le ministre franciscain et le prieur dominicain résidant à Tunis ont posées au pape Grégoire IX. Ici les frères mentionnent la présence des croisés (crucesignati) qui ont apparemment renoncé à combattre les sarrasins, sont allés dans un endroit aussi éloigné que Tunis, et pour une raison ou une autre n’ont pas respecté leur vœu. Certains ont eu peur des sarrasins ; certains se sont mariés sans avouer à leurs nouvelles épouses qu’ils étaient crucesignati. Le pape répond que les frères doivent laisser ceux qui ne peuvent pas respecter leur vœu – du fait d’une maladie, de la pauvreté ou pour d’autres raisons – accomplir une autre pénitence ; mais ceux qui peuvent aller doivent y être contraints aussitôt qu’ils le peuvent.
Il est difficile de savoir à partir de cette seule mention qui sont ces croisés, ce qu’ils font à Tunis et qui sont les femmes qu’ils ont épousées. Certains de ces croisés ont dû s'engager dans ce que les historiens ont nommé la croisade des Barons, qui reprend les efforts de Grégoire IX pour enrôler les dirigeants européens dans des actions planifiées contre les Ayyoubides à l’est et par conséquent dirigées pour aider à préserver l’empire latin de Constantinople. Michael Lower décrit comment Grégoire généralise la pratique du rachat des vœux de croisade contre des paiements financiers : là où les papes précédents ont autorisé cela pour ceux qui étaient incapables de remplir leur vœu, Grégoire encourage ceux qui ne sont pas aptes à partir en expédition de croisade (les femmes, les vieillards, les infirmes) à prononcer des vœux de croisade pour ensuite les racheter contre un paiement. Il est donc surprenant de ne trouver aucune mention du rachat contre paiement ici. 1
1 . M. Lower, The Barons' Crusade: a call to arms and its consequences (Philadelphia, 2005).
Laurence Foschia : traduction
Claire Chauvin : traduction
Notice n°252843, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252843/.