Fuero de Cuenca
Chrétien blesée or tue par Maure libre
De mauro pacis qui xristianum percuserit uel occiderit. Si maurus pacis xristianum percusserit uel occiderit pro percussione pectet calupniam ad forum conchense : pro occisione mittatur in manu querelosi, ut ipse extorqueat ab eo pecuniam calumpniarum et tandem de corpore faciat quicquid ipse uomuerit.
R.Ureña y Smenjaud, Fuero de Cuenca, (Madrid,1935),
Dans le cas que un Maure de paix blesse ou tue un Chrétien, pour lui nuire, il doit payer la sanction pécuniaire -caloña- conformément au Fuero de Cuenca, pour le tuer il devrait être mis dans les mains du demandeur, de sorte que le demandeur doit prendre l'argent des amendes, et enfin qu'il doit faire avec son corps ce qu'il veut.
M.Bueno
Dans les villes frontalières comme celle de Cuenca, on trouve des Sarrasins libres en tant que colons avec des garanties identiques aux autres habitants de la ville, soient des chrétiens ou des juifs. Le Fuero de Cuenca proclame l’égalité de tous les voisins de la ville sans considérer leur condition sociale, religieuse ou leur origine. Les actes de violence étaient très communs aux villes frontalières: dans le cadre des communautés religieuses, les disputes et la violence peuvent renforcer les frontières de ces communautés à l’intérieur de la ville. 1
L’égalité entre des Sarrazins et les Chrétiens ne fut pas complète comme le souligne cette disposition qui met en exergue une certaine inégalité dans la typification de la peine pour l’homicide d’un chrétien de la ville par un sarrasin. Dans ce cas, le meurtrier non seulement doit payer la peine pécuniaire établi dans le Fuero (200 maravédis) et le huitième de 300 solidi au roi, non seulement il devenait ennemi de son accusateur mais aussi il devait mettre son sort entre les mains de la famille de la victime. Par contre dans le cas des blessures, les peines établies étaient les mêmes que pour d’autres habitants de la ville avec une typification établie dans le Fuero selon le cas (Chapitre XII du Fuero de Cuenca).
1 . R. Roldán Verdejo, Los delitos contra la vida en los Fueros de Castilla y León, Universidad de la Laguna, 1978.
Le Fuero de Cuenca fut octroyé aux villes les plus importantes de Castille et de la Manche pendant la fin du XIIe siècle et le XIIIe siècle, dans toutes ces lois municipales les Sarrazins libres ainsi que les juifs étaient placés sur un pied d’égalité juridique par rapport aux chrétiens.
Cette idée du prix du sang introduite dans le droit foral était déjà présente dans le droit islamique en tant que diya, ce qu’implique l’acceptation d’une compensation financière à la place de la loi de talion.1 Sur le plan de l’analyse juridique, ce concept correspond à la notion de « composition » ou wergeld en usage dans les anciens droits roman et germanique. 2
Dans le cas des blessures sur un chrétien, le châtiment établi pour les sarrasins était une compensation financière, aussi admise pour les homicides, mais avec une procédure différente que pour les autres homicides, à la place du défi (Chapitre XV, 1) la loi établit de le remettre dans les mains de la famille de la victime. Mais en dépit d’une procédure différente, le traitement était assez favorable par rapport aux territoires plus éloignés de la frontière avec les terres de l’islam, où les privilèges des mudéjares avaient commencé à être supprimés. Ce changement de situation est notamment reflété dans le Fuero de Madrid (1202), en punissant sévèrement l’homicide et blessures provoqués par des mudéjares sur les Chrétiens. Cette situation fut chaque fois plus restrictive pour les musulmans et les châtiments établis plus durs que ceux du Fuero de Cuenca.
1 . L. Daaïf, « Le prix du sang au premier siècle de l’Islam »,Hypothèse, 1, (2006),329-342.
2 . E. Tyan, Enciclopedie de l’Islam, 2 edition (Leyden,1960), 350.
Adam Bishop : relecture
Claire Chauvin : relecture
Notice n°252463, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252463/.