Quelqu'un dirige la prière pour des voyageurs musulmans comme un imam, puis ces musulmans découvrent qu'il est chrétien
Un chrétien mène la prière d'un groupe de musulmans qui voyagent
من"الواضحة"...قال: و من أَمَّ قوْماً في سفرٍ ثم علموا أنه نصرانىّ، فليعيدوا أبدًا، و إن ظُفِرَ به استتيب كالمرتد، فإن تاب وإلّا قُتِل. قاله مطرّف و ابن الماجشون. وجُعِل ذلك منه إسلام. ولا حجة له إن قال: لم أُردْ به إسلام، وفعلته عبثًا و مُجونًا .ومن "العتبية"، في كتاب المحاربين: روى يحيى بن يحيى، عن ابن القاسم، عن مالك، أنه قال: يُعيدون ابدًا. قيل له: أفيُقتل بما أظهر من الإسلام بصلاته؟ قال: لا أرى ذلك عليه .قال سحنون: إن كان في موضع يخاف فيه على نفسه، فدارى بذلك عن نفسه و ماله، لم يُعرض له، وأعاد القومُ الصلاة، و إن كان في موضع هو فيه آمن، فليُعرض عليه الإسلام، فإن أسلم فلا أعادة على القوم، وإن لم يُسلم قُتِل، و أعادوا الصلاة
Abī Zayd al-Qayrawānī, Al-Nawādir wa-al-ziyādāt ‘alā al-Mudawwana min ghayrihā min al-ummahāt, ‘Abd al-Fattāḥ M. Ḥulw, ed. ( Beyrouth,1999), vol 1, 290
Du livre al-Wāḍiḥa ... [Mālik b. Anas] dit : [Si] quelqu'un dirige la prière [comme imām] d'un groupe de personnes dans un voyage, et que plus tard ils apprennent qu'il est chrétien, ils renouvellent la prière. S’il est saisi [l’imām chrétien], il lui sera demandé de se repentir comme un apostat (murtadd), et, à moins qu'il ne se repente, il sera tué. Mutarrif et Ibn al-Mâjishûn disent [de même]. De cette façon, il devient musulman ; et il n'a pas le droit de dire : Je ne veux pas être un musulman à cause de cette [prière], je l'ai fait pour l'amusement et pour plaisanter. Et à partir du livre al-‘Utbīya, la section sur les guerriers (Muḥāribīn) : Yaḥyā b. Yāḥyā, transmis d’Ibn al-Qasim à Malik, a dit : Ils doivent renouveler la prière. Il lui a été demandé : Sera-t-il tué parce qu’il s’est révélé de l'Islam par sa prière ? Il a dit : je ne pense pas qu'il soit sur lui. Et Saḥnūn dit : s’il est dans un endroit où il craint pour son identité personnelle, et donc cache son identité chrétienne avec la peur du [préjudice sur] lui-même et ses biens, qu'il ne soit pas contraint [de se convertir] à l'Islam, et que les gens répètent la prière ; mais s’il est dans un endroit où il est en sécurité, alors il est contraint de se soumettre à l'Islam, s’il se convertit à l'Islam, les gens ne répètent pas leur prière, s’il ne convertit pas, il est tué et les gens répètent leur prière.
La question juridique concernant un chrétien menant la prière pour un groupe de musulmans qui est en voyage est examinée par Mālik b. Anas (d. 179/795) sous la catégorie de l'apostasie irtidād). Toutefois, Mālik propose deux opinions contradictoires. Dans la première, il affirme qu'un chrétien qui prie avec les musulmans (conduisant la prière pour eux, dans ce texte) est considéré comme un apostat, et qu’il doit donc se repentir et devenir musulman. Cette décision s’explique car, prier publiquement avec les musulmans, est considéré par Mālik comme une déclaration de foi en l'Islam. Par conséquent, après avoir embrassé cette foi publiquement en priant avec les musulmans, s’il demeure encore chrétien, il devait être traité comme un apostat. S’il se repent et devient un musulman, il n’était pas puni ; mais s’il s’y refuse, il devait être tué et les musulmans répéter leur prière. Cette opinion est appuyée par deux autres juristes de Médine, ʿAbd al-Malik b. ʿAbd al-ʿAzīz b. al-Mājishūn (d. 212/827) et Muṭarrif b. ʿAbd Allāh (d. 222/835). Dans la deuxième opinion qu’il lui est attribué dans ce texte, Malik affirme que les musulmans devaient renouveler leur prière, tout en ne condamnant pas le chrétien à mort et ne le présentant pas comme apostat. Comment expliquer ces différences ? Un détail subtil sur le deuxième avis mentionné dans le livre du juriste andalou Muḥammad b. Aḥmad al-‘Utbī (d. 255/869) dans la section des Guerriers (Muḥāribīn) est susceptible d'apporter une réponse. Juriste d'Afrique du Nord, Saḥnūn (d. 240/855) élabore ce cas et explique cette contradiction : il précise que si un chrétien prie avec des musulmans et que, par crainte qu’on lui fasse du mal ou qu’on s’en prenne à sa propriété, il ne veut pas révéler son identité de chrétien, il devait ne pas être considéré comme un apostat ou obligé de se repentir. Il pouvait demeurer chrétien et les musulmans devaient répéter leur prière. Cependant, s’il prie en compagnie des musulmans dans un lieu sûr, où une telle peur est absente, il était alors considéré comme un apostat et devait se repentir. S’il se convertit, il ne devait pas être puni pour son acte, et la prière des musulmans qui s’en suivait était valable ; mais s’il refusait de se convertir, il était tué. Par conséquent, il est probablement que le premier avis de Mālik fasse référence à la dernière situation d'apostasie décrite par Saḥnūn, et sa deuxième opinion à la première de Saḥnūn.
Il n'y a aucune mention explicite d'un jugement pour apostasie dans le Coran, mais certains versets font référence aux non-musulmans qui tentaient de provoquer l'apostasie des musulmans, comme 2:109 « Nombre de gens du Livre aimeraient par jalousie de leur part, pouvoir vous rendre mécréants après que vous ayez cru. » et 3:72 « Ainsi dit une partie des gens du Livre : « Au début du jour, croyez à ce qui a été révélé aux musulmans, mais, à la fin du jour, rejetez-le, afin qu'ils retournent (à leur ancienne religion). » La loi sur l'apostasie et la peine de mort s’est développée au cours de la première moitié du VIIe siècle sur la base de deux traditions du Prophète: (1) Quiconque change de religion devait être tué, et (2) l'apostasie est l'une des trois infractions méritant la peine capitale. Cependant, ces traditions se réfèrent à l'abandon de l'Islam en faveur d'une autre religion ; la conversion à L’islam n’était pas considérée comme une apostasie. Malgré tout, les juristes se montrèrent en désaccord sur si, oui ou non, les non-musulmans étaient autorisés à se convertir à une autre religion reconnue par les musulmans. Avec la demande de la peine de mort pour apostasie, la majorité des juristes se sont mis d'accord sur la mise en place d’une « invitation à se repentir » (istitāba) donnant à chaque accusé d’apostasie l’obligation de retourner à l’islam. Il est rapporté que le Prophète accepta le repentir de plusieurs personnes qui avaient abandonné l'islam ; ‘Umar b. Khaṭṭāb (d. 23/644) ordonna que l'apostat soit emprisonné pendant trois jours, qu’il lui soit donné à manger et à boire pour qu’il se réconcilie avec l'Islam, et seulement ensuite lui demander de se repentir. Mālik b. Anas (d. 179/795) a tenu à ce que istitāba soit obligatoire sauf dans les cas de zanādiqa (sing. zindīq), les hérétiques ou ceux qui sont considérés comme des apostats cachés mais qui prétendent être musulmans. Afin d'avoir un statut juridique dans la communauté musulmane, une personne devait être affiliée à une religion reconnue par les musulmans comme légitime. Sinon, la personne est réputée pour ne pas avoir de religion, et il ou elle n'a aucun statut juridique en vertu de la loi islamique. Par conséquent, il est donné aux apostats le même choix qu’aux polythéistes (dont les croyances religieuses ne sont pas reconnues comme légitimes par les musulmans) : ils doivent accepter l'islam ou subir la peine de mort. Cependant, la loi islamique touchant à l'apostasie d'une personne qui a agi sous la contrainte est invalidée et le contexte dans lequel elle a eu lieu est pris en compte. Par conséquent, toute conversion forcée ou déclaration publique à l'islam faite dans des conditions de peur, sur la vie de la personne concernée ou sur ses biens, n’est pas qualifié d'apostasie.
apostasie ; chrétiens ; conversion à l'Islam ; peine de mort ; prière
Notice n°252434, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252434/.