Al-Qalqashandī, Shihāb al-Dīn Aḥmad
Interdiction d'employer les dhimmīs dans la fonction publique
Edit d'al-Mutawakkil excluant les dhimmīs des fonctions officielles
وقد انتهى إلى أمير المؤمنين أن أناساً لا رأي لهم ولا روية يستعينون بأهل الذمة في أفعالهم، ويتخذونهم بطانة من دون المسلمين، ويسلطونهم على الرعية، فيعسفونهم ويبسطون أيديهم إلى ظلمهم وغشهم والعدوان عليهم، فأعظم أمير المؤمنين ذلك، وأنكره وأكبره، وتبرأ منه، وأحب التقرب إلى الله تعالى بحسمه والنهي عنه، ورأى أن يكتب إلى عماله على الكور والأمصار، وولاة الثغور والأجناد، في ترك استعمالهم لأهل الذمة في شيء من أعمالهم وأمورهم، والإشراك لهم في أماناتهم، وما قلدهم أمير المؤمنين واستحفظهم إياه، إذ جعل في المسلمين الثقة في الدين، والأمانة على إخوانهم المؤمنين، وحسن الرعاية لما استرعاهم، والكفاية لما استكفوا، والقيام بما حملوا بما أغنى عن الاستعانة بأحد من المشركين بالله، المكذبين برسله، الجاحدين لآياته، الجاعلين معه إلهاً آخر، ولا إله إلا هو وحده لا شريك له؛ ورجا أمير المؤمنين - بما ألهمه الله من ذلك، وقذف في قلبه - جزيل الثواب، وكريم المآب، والله يعين أمير المؤمنين على نيته على تعزيز الإسلام وأهله، وإذلال الشرك وحزبه. فلتعلم هذا من رأي أمير المؤمنين، ولا تستعن بأحد من المشركين، وأنزل أهل الذمة منازلهم التي أنزلهم الله بها، واقرأ كتاب أمير المؤمنين على أهل أعمالك وأشعه فيهم، ولا يعلم أمير المؤمنين أنك استعنت ولا أحد من عمالك وأعوانك بأحد من أهل الذمة في عمل الإسلام.
qalqashandi
Il est parvenu au Commandeur des croyants que des hommes sans jugement ni discernement sollicitent l'aide des dhimmīs dans leur travail, les adoptent comme confidents au détriment des musulmans, et leur donnent autorité sur les sujets. Et [les dhimmis] les oppriment et lèvent la main sur eux, leur faisant subir tyrannie, tromperie et inimitié. Le Commandeur des croyants, attachant une grande importance à cela, a condamné cette conduite et l’a désavoué. Désireux de trouver grâce auprès de Dieu en mettant un terme à cela et en l’interdisant, il a décidé d’écrire à ses représentants dans les provinces et les villes ainsi qu’aux gouverneurs des régions frontières et des districts qu’ils ne devraient plus employer les dhimmīs en quoi que ce soit de leur travail ou de leurs affaires et qu’ils cessent de les choisir comme associés dans la confiance et l'autorité que leur confère le Commandeur des croyants et dont il leur confie la sauvegarde. Car [Dieu] a donné aux musulmans la foi en la religion, la confiance dans leurs frères, les croyants, et la capacité et la compétence pour remplir les fonctions qui leur sont confiées et les tâches qui leur sont imposées, éliminant ainsi la nécessité de rechercher l'aide de polythéistes, au lieu de l'aide de Dieu, et de ceux qui ne croient pas en ses apôtres, qui nient ses miracles, et qui placent un autre dieu à côté de Lui, alors qu’en fait, il n'y a pas d’autre dieu, car Il est le seul et Il n’a pas d’associé. Par cette décision que Dieu lui a inspirée et l’a projetée dans son cœur, Le Commandeur des croyants espère obtenir la généreuse récompense et le bonheur extrême dans l’au-delà. Que Dieu aide le Commandeur des croyants à atteindre son but qui est l’élévation de l’islam et de ses adeptes et l’abaissement du polythéisme et de ses partisans. Sache donc la décision de la Commandeur des croyants, ne sollicite l'aide d’aucun des polythéistes et réduis les dhimmīs à la position que Dieu leur a assignée. Fais lire la lettre du Commandeur des croyants aux habitants de ton district et proclame-la parmi eux. Que le Commandeur des croyants n’apprenne pas que toi ou l’un de tes assistants sollicitez l’aide de qui que ce soit parmi les dhimmīs dans les affaires de l’islam.
A. Oulddali
Al-Qalqashandī (m. 1418) dans son Ṣubḥ al-aʿshā mentionne un édit du calife abbasside al-Mutawakkil (847-861) interdisant l’emploi des non-musulmans dans l’administration. Ce texte, rédigé sous forme d’une lettre à l’adresse d’un gouverneur de province, explique une telle décision par le fait que la fonction publique, en raison de la confiance qu’elle requière et de l’autorité qu’elle confère, ne saurait être confiée à un mécréant. Le recours à l’aide des dhimmīs dans la gestion des affaires de l’État est considéré comme contraire aux principes de la religion musulmane tels qu’ils sont exprimés dans le Coran où nombre de versets, soigneusement rappelés au début de la lettre, affirme la supériorité de l’islam sur les autres confissions, et défendent aux croyants de choisir des alliés parmi les infidèles. Le ton résolument religieux de ce texte cache en réalité une volonté éminemment politique visant à juguler l’influence des non-musulmans dans l’administration abbasside à un moment où le pouvoir califal tentait de se régénérer en s’appuyant sur les courants traditionalistes.
Sur le contexte et la signification historique de ce texte, on se reportera à la notice " Edit d'al-Mutawakkil concernant les dhimmīs".
Adam Bishop : traduction
Notice n°252294, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252294/.