Code Justinien
Interdiction faite aux juifs de tourner en dérision le symbole chrétien de la Croix à l'occasion de la fête de Pourim
Impp. Honorius et Theodosius AA. Anthemio pp.
Iudaeos quodam festivitatis suae sollemni Aman ad poenae quondam recordationem incendere et sanctae crucis adsimulatam speciem in contemptu christianae fidei sacrilega mente exurere provinciarium rectores prohibeant, ne locis suis fidei nostrae signum immisceant, sed ritus suos citra contemptum christianae legis retineant, amissuri sine dubio permissa hactenus, nisi ab illicitis temperaverint.
D. III k. iun. Constantinopoli Basso et Philippo conss.
P. Krüger, Corpus Juris Civilis II (Berlin, 1954), 61.
Les empereurs Augustes Honorius et Théodose à Anthemius, préfet du prétoire
Les gouverneurs de province interdiront aux juifs d’incendier Aman lors de l’une de leurs fêtes solennelles, en souvenir de son ancien châtiment, et de brûler une sorte de simulacre de la sainte Croix dans un esprit sacrilège pour se moquer de la foi chrétienne, pour qu’ils n’introduisent pas dans les lieux qui leur appartiennent le signe de notre foi. Qu’ils gardent leurs rites sans mépriser la loi chrétienne ; il ne fait aucun doute qu’ils perdront les autorisations accordées jusqu’à présent s’ils ne s’abstiennent pas de ce qui est interdit.
Donné le 4 des calendes de juin à Constantinople sous le consulat de Bassus et de Philippus.
Les Lois religieuses des empereurs romains de Constantin à Théodose II, 312-438, Volume I :. Code théodosien, Livre XVI. Réedition du texte de T. Mommsen, avec traduction française de Jean Rougé et notes de Roland Delmaire. Sources chrétiennes 497 (Paris: Cerf, 2005), ?. Légèrement modifié.
Ce texte figure parmi les dix-huit constitutions du Livre 1. 9 intitulé De iudaeis et caelicolis. C'est une copie avec corrections de la loi de Théodose II du 29 mai 408, qui figure dans CTh. 16.8.18. Les auteurs du Code Justinien y ont introduit deux corrections. La première - "in contemptum" dans le texte original est remplacé par "in contemptu" - ne modifie en rien la signification du texte. La seconde a plus d'incidence. Elle dénonce un rite associé à la fête de Pourim (14-15 adar). Les juifs d'Orient avaient coutume de brûler une effigie empalée ou crucifiée d’Aman, ce conseiller qui, selon Esther 9, 17-28, aurait comploté afin d’obtenir du roi de Perse Assuérus la mise à mort des juifs de son empire. La fête de Pourim commémore l’intervention salvatrice d’Esther, juive et reine de Perse, et la condamnation à mort d’Aman et de ses complices. Brûler un homme empalé ou crucifié était manifestement l’occasion de tourner en dérision un symbole du christianisme, attitude « sacrilège ». Le texte menace de sanctionner ces agissements par la perte des « autorisations accordées » aux juifs.
Adam Bishop : traduction
Notice n°136257, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait136257/.