Code théodosien
Ordre de consulter les haruspices à la suite de la foudre tombée sur le Palatin
Imp. Constantinus A. ad Maximum. Si qui de palatio nostro aut ceteris operibus publicis degustatum fulgore esse constiterit, retento more ueteris obseruantiae quid portendat, ab haruspicibus requiratur et diligentissime scribtura collecta ad nostram scientiam referatur, ceteris etiam usurpandae huius consuetudinis licentia tribuenda, dummodo sacrificiis domesticis abstineant, quae specialiter prohibita sunt. 1. Eam autem denuntiationem adque interpretationem, quae de tactu amphitheatri scribta est, de qua ad Heraclianum tribunum et magistrum officiorum scribseras, ad nos scias esse perlatam. Dat. XVI kal. ian. Serdicae ; acc(epta) VIII id. mar. Crispo II et Constantino II CC. conss.
Paulus Meyer + Theodor Mommsen, eds. Theodosiani libri 16 cum Constitutionibus Sirmondianis et Leges Novellae ad Theodosianum pertinentes, (Berlin, 1905).
L'empereur Constantin Augiste, à Maximus (préfet de la Ville). S'il devait apparaître qu'une partie de Notre palais ou de tout autre ouvrage public ait été frappé par la foudre (éclair), que l'on demande aux haruspices, respectant ainsi l'observance de l'antique coutume, le sens du prodige et qu'il soit porté au plus vite à notre connaissance par un rapport écrit. Que l'on accorde même aux autres la permission d'user de cette coutume, pourvu qu'ils s'abstiennent des sacrifices privés qui ont été spécialement interdits. 1. Sache encore que Nous avons reçu le rapport officiel et l'interprétation de la chute de la foudre sur l'amphithéâtre (=le Colisée), à propos desquels tu avais écrit à Héraclien, Tribun et Maître des Offices. Donné le 16 des calendes de janvier à Sardique (=Sofia) ; reçu le 8 des ides de mars sous le 2e consulat des Césars Crispus et Constantin.
L. Foschia, 14 octobre 2010.
Cette loi est à rapprocher des lois 9.16.1-3 qui sont placées sous le titre générique de : "De maleficis, mathematicis et ceteris similibus". Constantin ici n'interdit pas les cultes pratiqués en public, mais seulement le recours aux haruspices dans les maisons privées ; il s'agit toujours, pour l'Empereur, de pouvoir contrôler le plus possible les pratiques traditionnelles et donc de maîtriser les rites domestiques.
La divination consiste à interpréter les signes pour se prémunir de l'avenir ou pour prévoir l'avenir. C'est une pratique qui dure longtemps chez les Romains malgré la christianisation de l'empire. Au IXe siècle, Agobard écrit un "Liber contra insultam uulgi opinionem de grandine et tonitruis" (PL 104, col. 147-164) : il s'y élève contre les "tempestarii" qui faisaient croire, dans les campagnes, qu'ils pouvaient déclencher tempête et foudre. Voir H. Platelle, "Agobard, évêque de Lyon (+840), les soucoupes volantes, les convulsionnaires", dans Apparitions et miracles, éd. A. Dierkens, 1991, p. 85-93. On peut ranger ces croyances au rang des pratiques proprement païennes. R. MacMullen, dans Christianisme..., ch. 1-3 considère ces coutumes comme un "substrat de rites relatifs aux espoirs et aux craintes de la vie qui ne s'adressent à aucun être en particulier". Le terme "haruspex" désigne au Bas-Empire de manière générale tous ceux qui prédisent l'avenir. Mais ici, il a le sens strict de "collège des haruspices de Rome". Ces haruspices, dépositaires de la "discipline étrusque" examinaient à l'aide des "libri fulgurales" le sens à donner à la foudre qui frappe un bâtiment public. L'haruspicine privée dans les maisons est interdite en 319 par Constantin (9.16.1-2). Valentinien I autorise la consultation des haruspices lorsqu'elle ne vise pas à nuire à autrui (9.16.9). Les sources ecclésiastiques, qui parfois répondent aux lois impériales ou les anticipent, sont souvent ambiguës sur la divination et la magie : elles considèrent les astrologues et autres mages comme des hérétiques et des païens. Nous savons, par des mentions chez les auteurs tardifs (Pères de l'église et historiens/philosophes païens) que ces pratiques divinatoires firent long feu : ainsi la consultation publique est-elle encore pratiquée en 410 comme en témoignent Sozomène, IX, 6 (voir aussi Zosime, V, 41, 2-3).
Jessie Sherwood : traduction
Notice n°1119, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait1119/.