Code Théodosien
Abolition de toutes les constitutions promulguées par Magnence
Imp. Constantius a. ad Cerealem praefectum Urbi. Omnia penitus amputentur, quae tyrannicum tempus poterat habere tristissima. Universos ergo praecipimus esse securos exceptis quinque criminibus, quae capite vindicantur. Dat. VIII id. sep. Lugduni Constantio a. VII et Constante c. conss. (354 [immo 353] sept. 6).
Th. Mommsen & P. Meyer, eds., Theodosiani libri 16 cum Constitutionibus Sirmondianis et Leges Novellae ad Theodosianum pertinentes (Berlin, 1905).
Toutes les malheureuses conséquences induites par le tyran (Magnence) et son époque doivent être complètement abolies. C'est pourquoi Nous ordonnons que la tranquillité soit assurée à tous, à l'exception de ceux qui sont coupables des cinq crimes qui requièrent la peine capitale. Donné le 8e jour avant les ides de septembre à Lyon, l'année du 7e consulat de Constance Auguste et du consulat de Constant César.
L. Foschia, 15 octobre 2010.
Le texte que nous avons sous les yeux annule toutes les décisions prises par l'usurpateur Magnence qui s'empare du pouvoir en 352. C'est lui qu'il faut reconnaître sous l'expression "tyrannicum tempus" (l. 2).
Fl. Magnus Magnentius (PLRE I, 532) est un prince d'origine germanique et de religion païenne. Devenu protecteur puis comte des affaires militaires avant 350, il devait commander les légions palatines stationnées en Italie. Proclamé Auguste en janvier 350 par des conjurés dirigés par le "comes rerum priuatarum" Marcellin, il est contraint au suicide en 353. Supporteur du paganisme, Magnence était probablement celui qui avait autorisé ces sacrifices nocturnes, même si les textes de lois qu'il promulgua ne sont pas parvenus jusqu'à nous. Entre autres choses, il avait, dès son accession au pouvoir, aboli la constitution interdisant les sacrifices nocturnes (voir CTh 16.10.5). Par cette constitution, ceux-ci se retrouvent donc, de facto, interdits, comme avant 352. Du point de vue religieux, et plus particulièrement sur le plan de la législation païenne, ce texte marque le retour à l'ordre ancien, celui mis en place par les fils de Constantin. Cette interdiction des sacrifices nocturnes est un premier pas dans l'interdiction de l'ensemble des pratiques sacrificielles. Si l'on s'attaque d'abord aux cérémonies nocturnes, c'est précisément parce que, n'ayant pas lieu en plein jour, elles étaient quasi incontrôlables par les fonctionnaires impériaux et pouvaient de ce fait aisément se transformer en rites privés, ce que le pouvoir souhaitait à tout prix éviter. En raison de leur aspect clandestin et associal, elles avaient partie liée avec la "superstitio". Les problèmes posés par la célébration de sacrifices nocturnes étaient loin d'être inédits. Sans remonter au scandale des Bacchanales en 186 av. J.-C., rappelons que Cicéron condamnait les rites nocturnes, spécialement ceux qui admettaient des femmes (De Legibus II, 9, 14-15). En prétextant des dérives et même des crimes liés aux fêtes en l'honneur de Bacchus, il semble que le Sénat ait monté soigneusement une affaire apte à provoquer le scandale et à justifier la condamnation des initiés. Les Bacchanales suscitaient la réprobation des Romains à cause du caractère trop exotique et "non-conformiste" des cérémonies de cette secte orientale, mais aussi parce qu'elles mettaient en pratique un renversement de l'ordre social jugé dangereux par les autorités. De plus, les règles cultuelles de ces associations privées s'opposaient à celles de la religion publique.
Jessie Sherwood : traduction
Notice n°1112, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait1112/.