Uenerabilis Frater Uir
Demande du pape au sultan marīnide de rapatriement d’un mercenaire en Castille.
Magnifico uiro Addurhanien Regi Benamarine uiam agnoscere ueritatis et agnitam custodire. Uenerabilis frater noster Arnaldus episcopus Marrochitanus et dilectus filius nobilis uir Aymerus Alfonsi miles Ispaliensis diocesis iudex christianorum tue curie ad nostram accedentes presentiam certas gratias pro se et christianis eisdem impetrarunt a nobis. Nosque considerantes eundem militem fore etate prouectum et decens ac expediens esse suis anime et corpori quod a mundanis laboribus acquiescat et deinceps dicto seruiat et non mundo sibi persuasimus quod ad dictam Curiam non rediret sed uiueret et moriretur in Castella inter suos consanguineos et amicos ipse uero nobis respondit quod de reuertendo ad dictam Curiam prestiterat iuramentum. Quare magnificentiam tuam rogamus quatenus dictos Episcopum et ecclesiam suam ac militem et omnes christianos sub tuo dominio commorantes habeas commendatos ipsique militi si et cum uoluerit concedas licentiam ad partes Castelle libere reuertendi et in eis dies suos etiam finiendi. Datum apud Pontemsorgie Auinionensi diocesis Idus Septembris Anno quinto.
Clara Maillard - Vatican, Archivium Secretum Apostolicum, Reg. Vat. 244 I, f. 80 r, ep. 171.
Au magnifique Addurhanien, roi Benamarin, [qu’il puisse] connaître la voie de la vérité et la garder. Notre vénérable frère Arnaldus, évêque de Maroc, et le noble Aymericus Alfonsi, soldat du diocèse de Séville et juge des chrétiens de ta Curie, en venant jusqu’à nous ont obtenu certaines grâces pour eux et pour les dits chrétiens. Et nous, considérant que ce militaire est avancé en âge et qu’il est convenable et nécessaire pour son âme et son corps qu’il se repose du travail du monde et qu’à son tour il ne serve plus le dit monde, nous sommes persuadés qu’à la dite Curie il ne doit pas revenir et qu’il doit vivre et mourir en Castille parmi les siens. Or il nous a répondu qu’il avait prêté serment de revenir jusqu’à cette Curie. C’est pourquoi nous demandons à ta magnificence que tu aies en recommandation cet évêque et de son église ainsi que de ce militaire et tous les chrétiens demeurant sous ton pouvoir, et qu’à ce militaire, si et quand il le voudra, tu concèdes la licence pour rentrer librement dans les régions de Castille et pour finir là ses jours. Donné à Pont de Sorgue dans le diocèse d’Avignon, les ides de septembre, la cinquième année [de notre pontificat].
Clara Maillard
Quelques années avant 1375, le Marīnide Abū Fāris avait soutenu le roi de Grenade dans sa lutte contre la Castille. Algésiras avait été reprise1 . En 1375, Arnaldus Sartedol, évêque de Marrakech et Aymarus, noble et soldat du diocèse de Séville et juge des chrétiens, furent envoyés par le pape en mission auprès du sultan marīnide. Il demandait au sultan marīnide de prendre soin des chrétiens demeurant dans son royaume ainsi que le rapatriement d’Aymericus Alfonsi en Castille.
1 . M. KABLY, Société, pouvoir et religion au Maroc à la fin du Moyen Âge, Paris, 1986, p. 203.
En 1375, la papauté, après un long silence, s’intéressa à nouveau au Maghreb. Neuf bulles furent enregistrées au sujet de cette partie du monde dont huit concernent le Maroc – notamment les difficultés des chrétiens au royaume de Marrakech, la paix entre monarques chrétiens et la guerre contre le roi de « Benimarin », le Marīnide1 –. Grégoire XI renoua avec la pratique du XIIIème siècle. L’évêque de Marrakech était à nouveau le messager du pape dans ces terres lointaines : il apportait des informations sur ce qui se passait au Maroc et amenait la parole du pontife en Afrique. Ainsi Grégoire XI pouvait-il rapporter à Charles V, roi de France, les paroles qui lui étaient parvenues et poursuivre les appels à la paix au roi d’Angleterre car tous les chrétiens vivant dans des régions lointaines, y compris ceux des régions d’Afrique2, craignaient les Sarrasins. Par ailleurs ce pape se souciait des affaires temporelles des fidèles du royaume de Marrakech, au service du souverain marīnide et, par l’intermédiaire d’Arnaldus Sartedol, évêque de Marrakech, prenait soin des mercenaires qui composaient l’Église de Marrakech.
1 . 1375, mai, 18. Hiis diebus cum. Reg. Vat. 271, f. 33 r° - 34 r°. Ut per litteras (LITPA), Brepols, GREGOIRE XI, Lettres secrètes et curiales (relatives à la France) – 001896, en ligne. 1375, septembre, 5. Dudum venientem ad. Reg. Vat. 271, f. 54 r°, ep. 54. GREGOIRE XI, G. MOLLAT, Lettres secrètes et curiales du pape Grégoire XI intéressant les pays autres que la France, Bibliothèque des Écoles Françaises d’Athènes et de Rome, Paris, De Boccard, 1962-1965, fasc. 2, p. 146, n° 3.455.
2 . « partibus quoque Affrice ». 1375, mai, 18. Hiis diebus cum. Reg. Vat. 271, f. 33 r° - 34 r°. Ut per litteras (LITPA), Brepols, GREGOIRE XI, Lettres secrètes et curiales (relatives à la France) – 001896, en ligne.
armée ; chrétiens ; mercenaires
Adam Bishop : traduction
Anna MATHESON : traduction
Luca Fois : relecture -corrections
Notice n°268793, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait268793/.