Ibn ʿAbd al-Barr al-Qurṭubī Abū ʿUmar Yūsuf b. ʿAbd Allāh
Location de matériel à usage vinicole
Le musulman peut-il louer sa monture à un chrétien qui transportera du vin ?
ولا يجوز لأحد أن يكري معصرته ولا دابته ولا سفينته ممن يعمل الخمر ويحملها وإن فعل أخذ منه ما قبض في اجرة ذلك وتصدق به وعوقب على فعله وإن كان لم يقبض ذلك من النصراني لم يحكم له بشيء وهكذا لو أكرى بيته أو حانوته أو لمعة من ارضه ممن يبيع فيها الخمر
Abū ʿUmar Yūsuf b. ʿAbd Allāh b. ʿAbd al-Barr al-Qurṭubī, al-Kāfī fī fiqh ahl al-madīna, (Riyad, 1980), II, p. 756.
Il n’est pas permis qu’ [un musulman] loue son pressoir, sa monture ou son bateau à producteur de vin qui transportera du vin. Celui qui agit ainsi, on lui confisquera ce qu’il aura perçu en contrepartie de cette location et on versera [cette somme] en aumône et on le sanctionnera. S’il n’a rien perçu de la part du chrétien, aucune mesure ne sera prise à son égard. Il en sera de même pour celui qui loue sa maison, sa boutique ou une parcelle de son terrain à celui qui y vend du vin.
M. Hendaz
Le juriste andalou, Ibn ʿAbd al-Barr (m. 1071), aborde ici quelques points liés à la location de matériels. Selon lui, le matériel, quel qu’il soit, ne peut être loué pour produire ou transporter du vin. Il en est de même pour ce qui concerne les biens mobiliers ou immobiliers mis à disposition d’un commerçant chrétien de boissons alcoolisées. Tout musulman qui aurait enfreint cette réglementation sera donc sanctionné d’une amende équivalente au montant de la somme perçue du loyer. En effet, dans le droit musulman, si la consommation de vin est interdite par la loi musulmane, aider à le vendre constitue une incitation à sa consommation et donc un délit.
Dans ce passage, le juriste andalou Ibn ʿAbd al-Barr (m. 1071) apporte des éclaircissements sur les libertés et les contraintes économiques entre musulmans et non-musulmans en terre d’Islam. Le libre exercice d’activités commerciales semble être la règle de base de son analyse. Cependant, les restrictions émises ici contre les chrétiens viennent du fait qu’elles impliquent la participation des musulmans dans ce qui est pour eux illicite. La sanction, comme on peut le constater dans les propos d’Ibn ʿAbd al-Barr, ne s’applique qu’aux musulmans ayant reçu une rémunération pour services illicites rendus, au regard de la loi musulmane. Ces mesures prises révèlent que, certainement, certains musulmans entretenaient des relations marchandes avec les chrétiens y compris quand cela contrevenait à certains principes du droit musulman en vigueur à cette époque.
David Peterson : traduction
Notice n°254396, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait254396/.