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Non sine multa admiratione

Auteur

Alexander III

Titre en français

Non sine multa admiratione

Titre descriptif

Bulle interdisant aux juifs d’occuper des terres de l’Église et d’en tirer des revenus, et d’accepter des hommages venant de chrétiens.

Type de texte

Bulle pontificale

Texte

Non sine multa admiratione auditur et creditur, quod iudaei parochias ecclesiarum per prouinciam vestram emptionis vel conditionis aut etiam pignoris titulo in contemptum Dei et fidei christiane institutionis contumeliam detinent occupatas, et cum debiti reditus eisdem ecclesiis non soluantur, hae ecclesiae penitus deperisse iam dicuntur. Quoniam igitur ad ea corrigenda, que sunt maiestati diuinae contraria et a fidei christiane institutionibus aliena, promptos nos decet et diligentes existere: fraternitati uitae per apostolicam sedem praecipiendo mandamus, quatinus, si qui iudae sunt in prouincia vestra, qui tali modo parochias ecclesiarum detineant, ipsos ad eas dimittendas requisito prius et habito fauore carissimi in Christo filii nostri Henrici illustris Anglorum regis, arctius compellatis, aut si receptas detinuerint, aut parochias a modo receperint, ipsos cum omni districtione cogatis, ut ecclesiis, quarum eaedem parochiae sunt, debitos et collectos reditus cum omni integritate persoluant. Prohibentes omnibus Dei fidelibus sub interminatione anathematis, ne quis iudaeis hominia vel fidelitates facere audeat: quoniam contrarium sacris ordinibus est, ut christiani debeant iudaeis adstringi. Si qui vero contra prohibitionem nostram venire praesumpserint, in eos, contradictione et appellatione cessante, excommunicationis sententiam feratis.

Langue

Latin

Source du texte original

Sacrosancta Concilia Ad Regiam Editionem Exacta: Quae Nunc Quarta Parte Prodit Auctior. Ab anno MLXXIII. ad annum MCXCVII. (Paris, 1671)

Datation

  • Entre 1159 et 1181

Aire géographique

Traduction française

Ce n’est pas sans un grand étonnement qu’on entend dire et qu'on croit que dans votre diocèse des juifs, au mépris de Dieu et pour la honte des institutions de la foi chrétienne, détiennent les paroisses [i.e., revenus et biens paroissiaux] au titre d’un contrat, d’un engagement ou même d’un gage, et on raconte que, quand les dettes sur ces mêmes paroisses ne sont pas payées en retour, ces paroisses tombent totalement en ruine. C’est donc pourquoi, afin de corriger cela, qui est contraire à la majesté divine et étranger aux institutions de la foi chrétienne, il convient de nous montrer prompts et diligents : au nom du Siège Apostolique, nous commandons à votre confrérie, s’il se trouve des juifs dans votre province qui possèdent par de tels procédés les paroisses de l’Église, ayant d’abord réclamé et obtenu la faveur de notre fils préféré dans le Christ, Henri [II], l’illustre roi d’Angleterre, que vous poursuiviez strictement ceux-ci en justice afin qu’ils abandonnent ces biens, et, s’ils détiennent des paroisses reçues de la sorte, ou les ont reçues récemment, que vous les [les juifs] obligiez avec toute la sévérité requise à s’acquitter intégralement des revenus reçus et dus aux églises, dont ces mêmes paroisses font partie. Par interdiction à tous les fidèles de Dieu, sous la menace de l’anathème, [nous commandons] que personne ne soit entendu jurer un serment de vassal ou de fidélité : parce que cela est contraire aux lois sacrées, que des chrétiens soient contraints d’être attachés à des juifs. Mais s’il se trouvait quelqu’un pour prétendre venir à l’encontre de notre interdiction, nous porterions contre eux une sentence d’excommunication, sans possibilité d’appel ou d’objection.

Source traduction française

C. Chauvin

Résumé et contexte

Le pape Alexandre III adresse cette bulle à l’évêque de Londres (c’est l’une des nombreuses qu’il lui adresse). Il rapporte qu’il a entendu dire que les juifs d’Angleterre exerçaient un contrôle sur les terres de l’Église et sur les revenus afférents, et qu’ils obtenaient des serments d’allégeance venant des chrétiens. Il affirme que cela est contraire aux « institutions de la foi de l’Église ». Il demande à l’évêque d’obtenir l’aide du roi Henri II pour renforcer ces interdictions. Normalement, le pape devrait écrire à l’archevêque de Canterbury plutôt qu’à son subordonné l’évêque de Londres : le fait qu’il écrive plutôt à ce dernier suggère qu’il écrivit entre le 18 avril 1161 et le 3 juin 1162 (quand le siège de l’archevêque était vacant), ou bien lors de l’exil de Thomas Beckett en France, ou encore pendant la vacance du siège qui suivit le meurtre de Beckett. Cela pourrait indiquer que même lors de ce moment de tension entre Rome et le Roi d’Angleterre, le pape cherchait l’aide de son « fils préféré dans le Christ » pour protéger les intérêts de l’Église.

Signification historique

Cette bulle est l’un des nombreux textes des XIIème et XIIIème siècles qui interdisent l’usage des biens de l’Église en gage ou caution pour un prêt souscrit auprès des juifs : souvent il s’agit de livres ecclésiastiques, de vêtements ou d’objets liturgiques, ce qui est interdit ; ici, ce sont les terres et les revenus afférents. Le principe, proclamé à plusieurs reprises dans les bulles papales et les canons des conciles, en est que les « infidèles » ne devraient pas exercer de pouvoir sur les biens de l’Église ou sur les chrétiens. D’où l’association ici avec une autre question, interdisant aux chrétiens de prêter un serment d’allégeance ou de rendre hommage aux juifs.

Liens

Etudes

  • M. Cheney, "The council of Westminster 1175: new light on an old source", Studies in Church History 11 (1975), 61-8.

Mots-clés

assujettissement ; dîme ; fief ; gage ; prêt ; serment ; église

Auteur de la notice

John   Tolan

Collaborateurs de la notice

Claire   Chauvin  :  traduction

Comment citer cette notice

Notice n°252637, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»

Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252637/.

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