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Constitucions i altres drets de Catalunya[I. 1. 9. 7]

Auteur

Jaume Callís et al.

Titre en français

Constitutions et autres droits de Catalogne

Titre descriptif

Interdiction aux juifs de couper et de vendre de la viande dans les boucheries chrétiennes

Type de texte

constitution et interprétation

Texte

Ordenam encara que negu jueu per si o per altre no gos tallar o vendre carns en les carniceries hon los carnicers christians tallen e venen carns mas en altres lochs separats e qui contrafara en sexanta sous barcelonesos sia punit.

Langue

catalan

Source du texte original

Constitucions de Catalunya: Incunable de 1495 (Barcelone: Generalitat de Catalunya. Departament de Justícia, 1988), fol. 19r [105]

Datation

  • Entre 1413 et 1422
  • Précisions : Traduction catalane d’une constitution approuvée par Pierre III pendant la Cour Générale de Perpignan (1351); aux Constitucions i altres drets de Catalunya on s'y réfère de la manière suivante : "Que algun iueu per si o per altre no gos tallar o vendre carn en carneceries de chrestians sots certa pena. Pere terç en la cort de Perpinyà. Capítol XXXVIII."

Aire géographique

Traduction française

Nous ordonnons aussi qu’aucun juif pour lui-même ou pour un autre ose couper ou vendre de la viande dans les boucheries où les bouchers chrétiens coupent et vendent de la viande, mais dans d'autres lieux séparés, et que celui qui fera le contraire soit punit pour 60 sous de Barcelone.

Source traduction française

J. X. Muntané Santiveri

Résumé et contexte

Quelques Cours Générales tenues pendant le règne de Pierre III furent particulièrement longues (plus d’un an). 1 La Cour de Perpignan, convoquée pour le 1er Septembre 1350, commença le lendemain de cette date au Palais royal de la ville et elle dura jusqu’au 14 Mars 1351, avec un changement de lieu, dans un monastère de la ville appartenant aux frères mineurs.

38 constitutions furent adoptées tout au long de cette Cour. Près de la moitié furent consacrées à des questions liées à l'administration, la justice et la sécurité publique, tandis que l'autre moitié tournait autour de l'économie. Ce ratio est également maintenu dans les six constitutions sur les juifs : trois d'entre elles concernent l'application de la justice et de la sécurité publique et le reste, aux affaires économiques.

1 . R. Conde; A. Hernández; S. Riera; M. Rovira, « Fonts per a l’estudi de les Corts i els Parlaments de Catalunya. Catàleg dels processos de Corts i Parlaments », Les Corts a Catalunya. Actes del Congrés d’Història Institucional. 28, 29 i 30 d’abril de 1998, Barcelone, Generalitat de Catalunya, Departament de Cultura, 1991, 28-35.

Signification historique

Avec cette constitution, la dernière concernant les juifs, de Perpignan, on voulait établir une séparation claire entre les boucheurs chrétiens et les juifs en proposant, sous peine pécuniaire en cas d'infraction, un emplacement différent pour les uns et les autres.

Dans ce cas, le lieu et la date sont assez importants. D'un côté, ce fut à partir du second tiers du XIVe siècle qu'augmenta considérablement le nombre de villes catalanes ayant une communauté juive qui, dans leurs ordonnances locales, interdirent aux membres de ces communautés de toucher avec les mains les aliments mis en vente sur le marché et dans les commerces. D'un autre côté, Perpignan, en 1299, fut une des premières parmi ces municipalités qui interdirent un tel contact physique. 1

Toutefois, la constitution de 1351, qui fait écho à cet état d’âme, ne s'applique pas aux aliments en général, mais uniquement à la viande, en particulier à celle des bovins et du petit bétail, qui était ce que l'on vendait dans les boucheries. Comme le processus associé à l'obtention et la consommation de ce type d'aliment étaient fortement réglementés par la normative religieuse juive, le plus probable fut que la viande devînt, aux yeux des législateurs chrétiens, le symbole par excellence de la séparation qui devait exister entre chrétiens et juifs.

En plus, un des éléments de ce processus qui, tout au long du Moyen Âge, provoqua un grand nombre de conflits entre les représentants civils de la majorité chrétienne, les bouchers chrétiens et les juifs en charge de l'approvisionnement de la communauté juive, fut le destin qu’on donnait à la viande « terefà », c'est à dire, la viande des animaux abattus et dépecés par les juifs qui, puisque elle ne remplissait pas les conditions nécessaires fixées par la loi juive pour être consommée, était rejetée. Lorsque cela se produisait, les clients chrétiens étaient les seuls à qui on pouvait vendre cette viande, mais cela, aux yeux des autorités chrétiennes, représentait un « gran menyspreu » (un grand mépris) qu'il fallait éviter. Dans le commentaire que T. Mieres, un juriste contemporain à la traduction catalane des Constitucions, fait à cette constitution il fonde l’interdiction de manger la viande « trufa », en s’appuyant sur une étymologie populaire de ce mot : « bonum non est, quasi sit mendacium iocosum, et quandoque illud dicitur burla ». 2

Les moyens pour parvenir à interdire cette pratique furent de plusieurs ordres. L'un d'eux, justement celui contenu dans cette constitution, consistait à maintenir séparées les boucheries des uns et des autres pour éviter que la viande rejetée par les juifs puisse être mélangée avec celle des chrétiens. D'autres formes consistaient à interdire aux juifs de tuer et d'écorcher leurs animaux dans les abattoirs, les boucheries ou les maisons des chrétiens; limiter le nombre d'animaux qu’ils pouvaient abattre, ou obliger à vendre cette viande à un prix inférieur à celle des chrétiens.

1 . J. Riera, « La conflictivitat de l’alimentació dels jueus medievals, segles XII-XV », 300.

2 . T. Mieres, Apparatus super constitutionibus curianum generalium Cathaloniae, Barcinonae: typis & aere Sebastiani à Cormellas, 1621, 376.

Textes apparentés inclus dans le corpus

Manuscrits

  • G. M. De Brocà, Taula de les Stampaçions de les Constitucions y altres drets de Cathalunya y de les costumes y ordinaçions de sos diverses paratges, Barcelona, 1907, 13 ; J. M. Font i Rius, « Estudi introductori », Constitucions de Catalunya: Incunable de 1495, Barcelona, 1988, LXVII-LXX.

Etudes

  • J. X. Muntané, « L’alimentació a l’aljama medieval de Tàrrega », Urtx, 22 (2008), 106-127.
  • J. X. Muntané, Fonts per a l’estudi de l’aljama jueva de Tàrrega. Documents i regesta, Barcelona: PPU, 2006.
  • J. Riera, « La conflictivitat de l’alimentació dels jueus medievals, segles XII-XV », Alimentació i societat a la Catalunya medieval, Anuarios de estudios medievales : Anejo, 20 (1988), 295-311.
  • F. Sabaté, « L'ordenament municipal de la relació amb els jueus a la Catalunya baixmedieval», F. Sabaté; C. Denjean (eds.), Cristianos y judíos en contacto en la Edad Media: Polémica, conversión, dinero y convivencia. Reunión científica en Girona (20-24 de enero de 2004), Lleida: Ed. Milenio, 2009, 733-804.

Mots-clés

alimentation ; amende ; boucherie ; interdiction ; Juifs/Judaïsme ; séparation ; viande

Auteur de la notice

Josep Xavier   Muntane Santiveri

Collaborateurs de la notice

Youna   Masset  :  relecture -corrections

Adam   Bishop  :  relecture -corrections

Comment citer cette notice

Notice n°252389, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»

Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252389/.

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