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Fatwa d'al-Māzarī

Auteur

Al-Māzarī

Titre en français

Fatwa d'al-Māzarī

Titre descriptif

Fatwa d'al-Māzarī

Type de texte

Fatwa

Texte

و سئل عن أحكام تأتي من صقلية من قاضيها أو شهود عدول، هل يقبل ذلك أم لا؟ مع أنها ضرورة، ولا ندري إقامتهم هناك تحت أهل الكفر هل هي اضطرار أو اختيار؟

فأجاب القادح في هذا وجهان. الأول يشتمل على القاضي وبيناته من ناحية العدالة، فلا يباح المقام بدار الحرب في قيادة أهل الكفر، الثاني من ناحية الولاية أذ القاضي مولى من قبل الكفر، و الأول له قاعدة يعتمد عليها في هذه المسألة وشبهها، وهو تحسين الطنّ بالمسامين ومباعدة المعاصي عنهم، فلا يعدل عنها لظنون كاذبة وتوهّمات واهية كتجويز ما ظاهره العدالة، وقد يجوز في الخفاء وفي نفس الأمر أن يكون ارتكب كبيرة إلا من قام الدليل على عصمته، وهذا التجويز مطروح، والحكم للظاهر إذ هو الراجح إلا أن يظهر في المخايل ما يخرج عن العدالة فيجب التوقف، حتى يظهر ما يوجب زوال موجب راجحية العدالة، ويبقى الحكم لغلبة الظن بعد ذلك، والحكم هو مستفاد من قرائن محصورة فيعمل عليها، وقرائن العدالة مأخوذة من أمر مطلق متلقى. وقد أمليت من هذا طرفا في شرح البرهان، وذكرت طريقة أبي المعالي وطريقتي لما تكلّمنا فيما جرى بين الصحابة من الوقائع والفتن رضي الله عنهم أجمعين، وهذا المقيم ببلاد الحرب إن كان اضطرارا فلا شك أنه لا يقدح في عدالته، كذا إن كان تأويله صحيحا مثل إقامته ببلد أهل الحرب رجاء هداية أهل الحرب، أو نقلهم عن ضلالة ما، وأشار إليه الباقلاني. وكما أشار أصحاب مالك في جواز الدخول لفكاك الأسير، وكذا إن كان تأويله محض ووجوه لا تنحصر،كما أن الشبهة عند الأصوليين لا تنحصر. وربما كان خطأ عند عالم، وصوابا عند آخر على القول بأن المصيب واحد، فالآخر معذور. وأما لو أقام بحكم الجاهلية والاعراض عن التأويل اختيارا فهذا يقدح في عدالته. واختلف المذهب في ردّ ثهادة الداخل اختيارا لتجارة، واختلف في تأويل المدوّنة فيها أشدّ، فمن ظهرت عدالته منهم، وشكفي إقامته على أي وجه فالأصل عذره، لأن جلّ الاحتمالات السابقة تشهد لعذره فلا ترد لاحتمال واحد، إلا أن تكون قرائن تشهد أن إختيارا لا لوجه وأما الوجه الثاني وهو تولية الكافر للقضاة والأمناء وغيرهم لحجز الناس بعضهم عن بعض فواجب، فمن ادّعى بعض أهل المذهب أنه واجب عقلا، وإن كان باطلا تولية الكافر لهذا القاضي. أما بطلب الرعية له ولّاهسلطان مسلم.

Langue

Arabe

Datation

  • Entre 1100 et 1150

Aire géographique

Traduction française

L’Imâm Abû `Abd-Allâh al-Mâzarî -- que Dieu lui accorde Sa Miséricorde -- fut consulté à son époque : “Doit-on déclarer recevables, ou bien les récuser, tout jugement en provenance de Sicile [et prononcé] par son qâdî*, ainsi que les dépositions de ses témoins assermentés, tout en sachant qu’ils sont imposés par la nécessité et qu’on ne peut établir si leurs auteurs résident sous l’autorité des Infidèles de plein gré ou sous la contrainte.” Voici sa réponse -- que Dieu l’agrée : Toute récusation est concevable en fonction d’un double motif : -- Le premier touche à [la personne du] qâdî, ainsi qu’à ses avis fondés, considérée sur le plan de la probité, du moment qu’il réside en territoire ennemi (dâr al-harb) et sous l’autorité des infidèles, chose qui n’est point permise. --Le second s’attache à l’investiture, puisqu’il est investi par l’infidèle. Quant au premier motif, il se réfère à un principe fondamental qui lui confère sa légalité et qui consiste à accorder le préjugé favorable à tout musulman et à écarter de lui toute [idée de] désobéissance. C’est là un fondement dont on ne peut se détourner pour des conjectures sujettes aux mensonges, ou pour des hypothèses faciles à détruire. À titre d’illustration, citons le cas d’un jugement [porté sur une personne], qui ne soit fondé que sur l’aspect apparent de la probité, alors que la personne en question aurait pu commettre en privé un péché grave dans cette période considérée, à moins qu’une preuve n’ait établi son immunité contre l’erreur ; or cette dernière [probabilité] est à écarter ; donc, on ne juge que selon les apparences ; c’est bien là le principe fondamental, à moins que des indices troublants ne nous mettent hors d’état de l’appliquer et, dans ce dernier cas, l’attitude d’expectative est de rigueur jusqu’à ce qu’un nouvel élément vienne apporter un éclaircissement. Si cette personne en question réside en pays ennemi pour une raison impérieuse, il n’y a là rien qui puisse porter atteinte à sa probité. Il en est de même si elle le fait de son propre gré, tout en ignorant le jugement en vigueur ou tout en croyant au caractère permis de son acte. En effet, rien ne l’oblige à prendre connaissance de ce chapitre du savoir [juridique], au point que son ignorance [supposée] ne porterait pas atteinte à sa probité. De même, si elle interprète correctement la loi, de sorte qu’elle justifie sa résidence en territoire ennemi par l’espoir de l’arracher d’entre les mains [des occupants] et de le restituer à l’islam, ou de parvenir à mettre les infidèles sur la bonne voie, ou, du moins, à les détourner d’une hérésie quelconque. Al-Bâqillânî [mort 1012], ainsi d’ailleurs que les compagnons du [juriste] Mâlik --que Dieu, le Très Haut, lui accorde Sa Miséricorde-- signalent très brièvement la possibilité [licite] de pénétrer [en territoire ennemi] en vue de délivrer un prisonnier. La situation demeure la même si cette personne considérée pratique une interprétation fautive, laquelle, d’ailleurs, peut connaître des formes multiples, tout comme, du reste, les cas équivoques chez les fondamentalistes. C’est qu’une solution est susceptible d’erreur au regard d’un savant et de vérité au regard d’un autre, et ce en admettant comme principe qu’une seule personne atteint le vrai, alors que l’autre [soutenant une opinion divergente] peut être excusée. Par contre, si elle agit en méconnaissance de la loi, ou en se détournant sciemment de tout effort d’interprétation, il y a certainement là un motif d’atteinte à sa probité. Cependant, il y a divergence à l’intérieur de l’école [mâlikite] pour ce qui est de récuser le témoignage de toute personne pénétrant de son propre gré dans un territoire ennemi dans le but d’y faire du commerce. Les plus grandes divergences sont apparues pour ce qui est d’interpréter sur ce point la Mudawwana [de Sahnûn, mort en 854]. [En définitive], tolérer ses raisons personnelles doit être l’attitude de principe à adopter envers toute personne dont la probité est évidente, mais dont le but du séjour en territoire ennemi prête néanmoins à suspicion. C’est que la grande majorité des suppositions précédentes plaident pour cette tolérance et il n’est guère possible de les repousser toutes à l’exclusion d’une seule ; à moins que des indices annexes ne viennent attester que le séjour n’a aucun but [contraignant] et qu’il a été effectué de propos délibéré. Pour ce qui est du second point soulevé, c’est-à-dire l’investiture accordée par l’infidèle aux qâdîs, notaires, syndics et autres [détenteurs de charges honorables], il est un fait qu’on doit impérativement protéger les gens, les uns contre les autres, tant et si bien qu’un certain disciple de l’école [mâlikite] prétend fonder rationnellement cette obligation. L’auteur de la Mudawwana établit la légalité de tout intérim assuré par les notabilités d’un lieu quelconque, en l’absence du prince [sultân], et ce de peur de ne pouvoir traiter un cas d’urgence dans les délais prescrits. L’investiture accordée par l’infidèle à ce qâdî probe, soit pour répondre à un besoin impérieux, soit pour satisfaire la demande des justiciables, ne porte nullement atteinte à des jugements qui gardent de la sorte leur caractère exécutoire, tout comme s’il avait été investi par un prince musulman. C’est Dieu qui guide [nos pas] vers le droit chemin.

Source traduction française

A. Turki, "Consultation juridique d'al-Imam al-Mâzarî sur le cas des musulmans vivant en Sicile sous l'autorité des Normands," Mélanges de l'Université Saint-Joseph 50 (1984), 691-704.

Résumé et contexte

Cette fatwā contenue dans l'Asnā al-matājir d'al-Wansharīsī est utilisée par l'érudit postérieur comme une base à son propre avis, opposé, concernant la permission de rester dans un territoire qui a été conquis par des forces non-musulmanes et qui est maintenant dār al-harb. La fatwā examine les deux questions connexes, à savoir s’il est autorisé à rester sur le territoire anciennement musulman, et si les opinions des juges qui ont été nommés par les dirigeants infidèles sont valables. En réponse aux deux premières questions, al-Māzarī déclare que, dans le cas des juges qui ont été forcés à rester ou s’ils avaient de bonnes raisons de le faire, alors ce devait être accepté. S’ils ne connaissent pas la règle générale de ne pas rester sur un territoire infidèle, ils sont compromis en tant que musulmans. Pour ceux qui font du commerce et ainsi vivent sous la règle non-musulmane pour une période, il y a un manque de consensus ; tandis que pour ceux qui résident sur le territoire infidèle pour des raisons inconnues, il faut leur attribuer le bénéfice du doute. Pour la seconde question, al-Māzarī prévoit que le juge qui est nommé par un infidèle peut être accepté, et confirme ses jugements.

Signification historique

La question posée à al-Māzarī et sa réponse, avec les controverses qui ont suivi à travers les siècles, fait montre des difficultés que posent, pour les musulmans, les premières pertes de territoire au cours de la reconquête chrétienne des régions d'Europe à l'époque médiévale.

Manuscrits

  • Voir les entrées sur al-Wansharisi

Editions

  • A.M. Turki, ‘Consultation juridique d'al-Imam al-Mazari sur le cas des Musulmans vivant en Sicile sous l'autorité des Normands’, Melanges de l'Universite Saint-Joseph 50 (1984) 691-704
  • Al-Māzarī, Fatāwā’l-Māzarī, ed. al-Maʿmūrī, Tunis, 1994, pp. 365-6
  • Al-Wansharīsī, Al-miʿyār al-muʿrib wa ’l-jamiʿ al-mughrib ʿan fatāwī ahl Ifrīqiyā wa ’l-Andalus wa ’l-Maghrib, ed. M. al-Ḥajjī 13 vols, Rabat, 1981-83), vol. X, pp. 107-9

Traductions

  • M. Brett, ‘Muslim justice under infidel rule. The Normans in Ifriqiya, 517-555H/1123-1160AD’, Cahiers de Tunisie 43 (1995) 1-26, pp. 4-5 (repr. in M. Brett, Ibn Khaldun and the medieval Maghrib, Aldershot, 1999, no. XIII)
  • J. Hendrickson, The Islamic obligation to emigrate. Al-Wansharīsī’s Asnā al-matājir reconsidered, Emery, 2009 (Diss. Emery University), pp. 373-6
  • A.M. Turki, ‘Consultation juridique d'al-Imam al-Mazari sur le cas des Musulmans vivant en Sicile sous l'autorité des Normands’, Melanges de l'Universite Saint-Joseph 50 (1984) 691-704

Etudes

  • M. Brett, ‘Muslim justice under infidel rule. The Normans in Ifriqiya, 517-555H/1123-1160AD’, Cahiers de Tunisie 43 (1995) 1-26, pp. 5-6 (repr. in M. Brett, Ibn Khaldun and the medieval Maghrib, Aldershot, 1999, no. XIII)
  • J. Hendrickson, The Islamic obligation to emigrate. Al-Wansharīsī’s Asnā al-matājir reconsidered, Emery, 2009 (Diss. Emery University), pp. 205-35
  • A. Metcalfe, The Muslims of medieval Italy, Edinburgh, 2009, pp. 176-77
  • J. Tolan, Histoire médiévale: Les Relations entre les pays d'Islam et le monde latin du milieu du Xème siècle au milieu du XIIIème siècle (Paris, 2000), 152-6.
  • A.M. Turki, ‘Fatwā al-Imām al-Māzarī fī Musulmīn al-muqīmīn bi-Ṣiqilliyya fī ḥamāyat al-Nurmān’, in Qaḍāyā thaqāfiyya min ta’rīkh al-gharb al-Islāmī. Nuṣūṣ wa-dirāsāt, s.n. (Beirut, 1988), 61-80

Mots-clés

assujettissement ; autonomie communautaire ; pacte

Auteur de la notice

Alex   Mallett

Collaborateurs de la notice

Youna   Masset  :  traduction

Comment citer cette notice

Notice n°252229, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»

Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252229/.

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