Constitutions de la IIIe Cour de Barcelone convoquée par le seigneur roi Jacques II
Confirmation des lois prosélytes adressées aux juifs et Sarrasins
constitution et interprétation
Et ad eorum supplicacionem, ordinamus quod statutum, seu privilegium, factum si favorem et aucmentacionem Christiane fidei per illustrissimum Dominum Regem Jacobum bone memorie avum nostrum, confirmatum per Dominum Summum Pontificem Innocentium quartum, et etiam capitulum factum per nos in generali Curia Barchinone, quod incipit : Item, quod si iudeus et iudea etc, plenarie observetur ; et quod predicacio fiat in sinagogis iudeorum et masquidis Serracenorum vel in aliis locis, in quibus pro faciendis suis omnibus consueti sunt congregari ; cuius siquidem privilegii seu statuti dicti Domini Regis Jacobi bone memorie dinoscitur esse talis.
Real Academia de la Historia, Cortes de los antiguos reinos de Aragón y de Valencia y principado de Cataluña, tomo I, parte 1 (Madrid: Est. Tip. de la Viuda e Hijos de Manuel Tello, 1896), 217
Et à leur supplication [des prélats, des nobles et des représentants municipaux], nous ordonnons que le statut ou privilège fait en faveur et pour l'augmentation de la foi Chrétienne par l’illustrissime seigneur roi Jacques, notre grand-père, de bonne mémoire, confirmé par le seigneur et souverain pontife Innocent IV, et aussi le chapitre fait par nous dans la Cour Générale qui commence par : Item, quod si iudeus et iudea etc., soient pleinement observés ; et que la prédication soit faite dans les synagogues des Juifs et dans les mosquées des Sarrasins ou dans les autres lieux où ils accoutument de se réunir pour traiter de toutes ces questions ; duquel privilège ou statut du dit seigneur le roi Jacques, de bonne mémoire, [la teneur] est telle [comme suit].
J. X. Muntané Santiveri
À la demande des trois états réunis à la Cour générale de 1311, Jacques II ordonna l'application complète de la loi adoptée par Jacques Ier l’année 1243 et en agissant ainsi, inséra, pour favoriser et promouvoir la foi chrétienne comme cela est dit dans le texte, dans le cadre juridique : l'indemnité de la propriété des convertis, le respect social dû à ceux-ci et l'approbation de prêcher aux juifs et musulmans. 1 Puis Jacques II confirma également la constitution qui avait été adoptée dix ans auparavant, en 1300, dans une cour générale qu'il avait présidée (la deuxième cour sous le règne de ce monarque qui eut lieu à Barcelone) et dans laquelle on appliquait l’indemnité de la propriété pour les biens qui provenaient de l’usure. Parmi les constitutions approuvées en 1311, celle-ci, avec la ratification et la confirmation que l'on a mentionné, est la première de toutes, et c'est pour cela qu’elle devient un excellent indicateur de l'intensification du prosélytisme chrétien au XIVe siècle en Catalogne, même si ce texte-comme on le verra ci-dessous- se fait écho aussi de l'opposition avec laquelle la minorité juive réagissait contre lui.
1 . J. Riera, « Les llicències reials per predicar als jueus i als sarraïns (Segles XIII-XIV) », 119.
En effet, avec les mots « quod predicacio fiat in sinagogis iudeorum et masquidis Serracenorum vel in aliis locis, in quibus pro faciendis suis omnibus consueti sunt congregari », on pourrait croire que les autorités ne cherchent rien de plus que la promotion de la prédication aux juifs et musulmans, mais en réalité elles veulent valider comme loi générale le privilège que Jacques I avait accordé à certains quartiers juifs selon lequel les sermons devaient être faits uniquement dans les limites de ces quartiers, plus précisément, dans les lieux de culte ou de réunion des juifs. 1 Avec cette norme on voulait éviter les désordres qui se produisaient quand se rassemblait une grande foule de chrétiens qui, encouragée par les paroles du prédicateur et enhardie par leur nombre, vexait et molestait les juifs contraints d'assister à la prêche. 2 Plus tard, certaines communautés juives obtinrent d'autres privilèges qui allaient en la même direction : un d’eux, par exemple, limitait entre trois et dix le nombre de chrétiens, élus seulement parmi les dirigeants de la ville, qui pouvaient accompagner le prêcheur à l’intérieur du quartier juif. 3
1 . Dans le statut de 1243 il n'était pas défini de lieu pour prêcher (« ad villas vel loca ubi Sarraceni vel iudei moram fecerint, et verbum Dei dictis iudeis vel sarracenis proponere voluerint, ipsi ad convocacionem eorum perveniant, et pacienter audiant predicacionem eorum »), mais à partir de Jacques I, en 1263, ce ne sera possible que dans les quartiers juifs, vid. J. Riera, « Les llicències reials per predicar als jueus i als sarraïns (Segles XIII-XIV) », 119.
2 . A. de Saldes, « La orden franciscana en el antiguo reino de Aragón », 598-599 ; un document de mai 1391 atteste ouvertement de la haine (le « gran oy ») que les gens de Barcelone avaient pour les juifs et que les questions religieuses envenimaient fortement, vid F. Baer, Die Juden im Christlichen Spanien, I, doc. 404 ; J. Riera, « Un procés inquisitorial contra jueus de Montblanc per un llibre de Maimònides », 66.
3 . Vid. J. Riera, « Les llicències reials per predicar als jueus i als sarraïns (Segles XIII-XIV) », 117-119 et 124-126.
conversion au christianisme ; Juifs/Judaïsme ; prosélytisme ; synagogue
Josep Xavier Muntane Santiveri
Youna Masset : relecture -corrections
Adam Bishop : relecture -corrections
Notice n°246326, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait246326/.