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Constituciones tercie curie Barchinone celebrate per Dominum Jacobum Regem secundum[1 § 4]

Auteur

III Cort general de Barcelona

Titre en français

Constitutions de la III Cour de Barcelone convoquée par le seigneur roi Jacques II

Titre descriptif

Obligation pour les juifs et les musulmans d'assister aux prédications des prélats et des frères chrétiens

Type de texte

constitution et interprétation

Texte

Partus etiam et statuimus quod quandocumque Archiepiscopus Episcopi vel fratres predicatores aut minores accesserint ad villas vel loca ubi Sarraceni vel iudei moram fecerint, et verbum Dei dictis iudeis vel sarracenis proponere voluerint, ipsi ad convocacionem eorum perveniant, et pacienter audiant predicacionem eorum. Et officiales nostri, si gratis venire noluerint, eos ad hoc omni excusacione postponita compellant. Mandamus itaque vicariis baiulis curiis et nostris subditis officialibus universis presentibus et futuris quatenus dicta omnia prescripta ubique teneri et observari inviolabiliter faciant si de nostri confidunt gratia et amore.

Langue

Latin

Source du texte original

Real Academia de la Historia, Cortes de los antiguos reinos de Aragón y de Valencia y principado de Cataluña, tomo I, parte 1 (Madrid: Est. Tip. de la Viuda e Hijos de Manuel Tello, 1896), 218

Datation

  • Date fixe :
  • Précisions : Statut issu du Parlement ecclésiastique célébré à Lleida le 1243 (1242 selon la datation de l’Incarnation) et confirmé pendant la Cour Générale convoquée par Jacques II le Juste à Barcelone, au couvent des frères mineurs de cette ville, le 1311.

Aire géographique

Traduction française

Nous désirons et donc décrétons que chaque fois que l'archevêque, les évêques ou les frères dominicains ou franciscains visitent une ville ou un endroit où habitent des Sarrasins ou des juifs, et qu'ils veulent prêcher la parole de Dieu aux dits juifs ou sarrasins, ceux-ci doivent accourir à leur appel et écouter patiemment leur prédication. Mais s’ils refusaient de faire cela de bon gré, nos officiers doivent les obliger à le faire, laissant de côté toute excuse. Aussi nous commandons aux viguiers, bayles, juges ainsi qu'à nos sujets et à tous les fonctionnaires, présents et futurs, d’accomplir toutes les instructions ci-dessus et de les observer inviolablement, s’ils prétendent avoir notre faveur et notre amour.

Source traduction française

J. X. Muntané Santiveri

Résumé et contexte

Pendant le concile ecclésiastique de Lérida de mars de 1243 (1242 selon l’Incarnation) Jacques I, qui alors se trouvait dans l’étape finale de la conquête du royaume de Valence, promulgua un statut général qui représenta le début de l’offensive missionnaire contre les juifs et musulmans de ses terres. En effet, il y poursuivit le favorem et aucmentacionem Christiane fidei à travers la conversion de ces infidèles, ce qui fut confirmé par le pape Innocent IV avec une bulle adressée à l’archevêque de Tarragone et qui fut insérée aussi dans l’édition des Constitucions de Catalunya de 1495 (fol. 1v-2r). Il a été suggéré que la main de l’ex général dominicain catalan frère Raymond de Penyafort soit derrière la rédaction de ce statut 1 qui, de manière réaliste et pragmatique, structure le programme de conversion au christianisme en seulement trois points.

1 . J. Cohen, The Friars and the Jews, 106.

Signification historique

Le troisième et dernier point du programme est dédié aux prédications des infidèles. La règle ancienne selon laquelle la conversion au christianisme devait être le résultat de la persuasion et non de la force commença à être mise en question, non en théorie mais dans la pratique, vers la moitié du XIIIe siècle. Le brulement du Talmud à Paris au commencement de 1240 marqua la naissance d’une conception de l’activité missionnaire de l’Eglise qui finit par caractériser une grande partie de la vie ecclésiastique du bas Moyen Âge. 1 Ces deux visions se trouvent dans le statut que nous commentons : la volonté d’exposer les vérités du christianisme aux infidèles pour qu'ils se se rendent compte de leur erreur et embrassent la foi en Jésus. Bien que cette conception ne soit qu'un reflet- certainement pâle- du dialogue inter-religieux du XIIe siècle et de la première moitié du XIIIe siècle, elle a la vertu de maintenir la conversion dans l’orbite de la persuasion, et cela même si le dialogue, subordonné à l’objectif de convertir les incroyants, est réduit à la simple exposition unidirectionnelle des vérités chrétiennes ou, dans le pire des cas, à sa confrontation avec celles de l’autre religion. La dégradation de l’acte de communication accompagnée- comme on le verra- de l'obligation d’assister aux prêches, est un bon exemple de la nouvelle praxis missionnaire qui se met en place à partir de la seconde moitié du XIIIe siècle. En accord avec cet esprit, Jacques I établit des normes afin de complémenter l’annexion militaire avec la conversion des infidèles qui habitaient en ces lieux grâce à la prédication chrétienne. Dans ce statut, le comte-roi s’adresse aux juifs et aux musulmans de son royaume et leur ordonne de se réunir pour écouter avec patience les prédicateurs chrétiens quand ceux-ci le leur proposent. Conscient des réticences qu’une proposition de ce genre pouvait susciter auprès de ses destinataires, le monarque ordonne à ses officiers que s'ils résistaient, de les y obliger. 2 Selon le statut de 1243, les prélats de la province ecclésiastique Tarraconaise (l’archevêque de Tarragone –le destinataire deux ans après de la bulle de confirmation de ce statut d’Innocent IV- et les évêques des diocèses suffragants) pouvaient prêcher, puis les dominicains et les franciscains. Aucun document en Catalogne atteste une activité homilétique des prélats. Pourtant, lors de la Cour Générale de Barcelone en1311, on reproduit le statut de 1243 tel qu'il le fut à Lérida (avec la référence initiale aux autorités ecclésiastiques). Leur mention fut supprimée dans la confirmation que Jacques II fit des contenus du statut en 1296 où il suggérait que, au contraire des dominicains et des franciscains, 3 les évêques ne se préoccupaient pas réellement de prêcher aux infidèles. 4 Malgré l'intention de Jacques I, suivie par ses successeurs, de faire des dominicains et des franciscains les principaux agents de la conversion des infidèles, les notices mentionnant des prédications aux juifs réalisées par des membres de ces ordres religieux pendant le bas Moyen Âge sont peu abondantes en Catalogne. 5

1 . B. Blumenkranz, Juifs et chrétiens, 67-81; G. Dahan, Les intellectuels chrétiens et les juifs au Moyen Age , 220-226 et 229-238; M. A. Shulvas, The Jews in the World of the Renaissance, 207.

2 . Toutefois, dans des documents postérieurs Jacques I mitigera ce ton : l’année 1263 il interdira qu’on oblige les juifs à sortir du call pour assister aux prêches et en1268 il limitera à dix le nombre des accompagnants des prédicateurs qui pouvaient entrer au call de Barcelone et Lérida. Une décennie plus tard, en 1279, Pierre II essayera de mettre fin aux violences et aux injustices (comme les amendes imposées aux juifs qui n’avaient pas assisté aux prêches parce qu’ils étaient malades ou absents) commises contre les juifs de Gérone à cause des prédications des franciscains et, encore plus important, il récupéra l’esprit initial de ces activités missionnaires quand il demanda aux frères prêcheurs d’utiliser la persuasion au lieu de la peur, les menaces et la violence pour convertir les juifs au christianisme, vid. J.Riera, « Les llicències reials per predicar als jueus i als sarraïns (Segles XIII-XIV), 117-118 ; Régné, History of the Jews in Aragon, num. 747 et 748; A. Huici, Documentos de Jaime I de Aragón, vol. 3, doc. 1190

3 . Grande documentation: l'année 1278, Nicolas III à la bulle Vineam Soreth désigna formellement la prédication auprès des juifs comme une partie de l’apostolat de dominicains et des franciscains, Cohen, The Friars and the Jews, 82-83.

4 . Tel que le clergé séculier, le clergé régulier qui n’appartenait pas aux dominicains ou franciscains ne le faisait pas. La raison pour laquelle on mentionne uniquement les évêques en oubliant les autres qui avaient la même attitude qu'eux, pourrait être due à la simple tradition (autrefois les sermons aux juifs faisaient partie des obligations pastorales des évêques, B. Blumenkranz, Juifs et chrétiens, 93-95), à la courtoisie (J.Riera, « Les llicències reials per predicar als jueus i als sarraïns (Segles XIII-XIV)", 116) ou, parce que tenant compte du contexte d'émanation du statut (un parlement ecclésiastique) et de son caractère général et fortement religieux, on ne pouvait pas laisser de côté aux prélats. D’autre part, la documentation est très explicite quand elle mentionne l'activité juridique des prélats de la Tarraconaise à propos des conversions du judaïsme (soit pour les convertis relapses soit pour les juifs qui avaient incité des chrétiens ou des convertis à apostasier, Régné, History of the Jews in Aragon, num. 2952, 2954, 2966 i 3389 parmi divers exemples, ou G. Escribà, Documents dels jueus de Girona (1124-1595), doc. 97), ou quand à l'officialisation de la conversion (pour annoncer publiquement les nouveaux convertis du diocèse, G. Escribà, Documents dels jueus de Girona (1124-1595), doc. 78, 105, 202, 269, 287, 290, 291, 295-299, 347, 390, 399, 587).

5 . On doit faire attention au fait que les seules notices du règne de Jacques I sont très postérieures au statut : 1263 et 1268, sous Pierre le Grand elles se concentrent en 1279, et les principaux documents de Jacques II ont déjà été énoncés dans le commentaire : 1296 et 1311. À l’exception des villes citées dans ces textes, on ne trouve que peu de notices de ce type pour les autres localités où il y avait des calls juifs et des couvents de ces ordres mendiants. De toute façon, afin de compléter le tableau des prédications adressées aux juifs pendant le bas Moyen Âge, il faudrait ajouter aux sermons prononcés par les membres de certains ordres mendiants les prédications faites par des individus qui n’étaient pas religieux mais laïcs (comme Raymond Llull, J. Cohen, The Friars and the Jews, 199-225; E. Colomer, El pensament als Països Catalans, 113-179), notamment les convertis du judaïsme.

Textes apparentés inclus dans le corpus

Mots-clés

clergé ; conversion au christianisme ; Juifs/Judaïsme ; prosélytisme ; prosélytisme

Auteur de la notice

Josep Xavier   Muntane Santiveri

Collaborateurs de la notice

Youna   Masset  :  relecture -corrections

Adam   Bishop  :  relecture -corrections

Comment citer cette notice

Notice n°245436, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»

Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait245436/.

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