Traité de paix passé entre le calife ʿUmar et les chrétiens de Jérusalem
Traité de conquête de Jérusalem
بسم الله الرحمن الرحيم. هذا ما أعطى عبدالله عمر أمير المؤمنين أهل إيلياء من الأمان، أعطاهم أمانا لأنفسهم وأموالهم ولكنائسهم وصلبانهم وسقيمها وبريئها وسائر ملتها، أنه لا تسكن كنائسهم ولا تهدم ولا ينتقص منها ولا من حيزها ولا من صليبهم ولا من شيء من أموالهم. ولا يكرهون على دينهم ولا يضار أحد منهم. ولا يسكن بإيلياء معهم أحد من اليهود. وعلى أهل إيلياء أن يعطوا الجزية كما يعطي أهل المدائن. وعليهم أن يخرجوا منها الروم واللصوص. فمن خرج منهم فإنه آمن على نفسه وماله حتى يبلغوا مأمنهم. ومن أقام منهم فهو آمن وعليه مثل ما على أهل إيلياء من الجزية. ومن أحب من أهل إيلياء أن يسير بنفسه وماله مع الروم ويخلي بيعهم وصلبهم، فإنهم آمنون على أنفسهم وعلى بيعهم وصلبهم حتى يبلغوا مأمنهم. ومن كان بها من أهل الأرض قبل مقتل فلان فمن شاء منهم قعدوا عليه مثل ما على أهل إيلياء من الجزية ومن شاء سار مع الروم ومن شاء رجع إلى أهله فإنه لا يؤخذ منهم شيء حتى يحصد حصادهم. وعلى ما في هذا الكتاب عهد الله وذمة رسوله وذمة الخلفاء وذمة المؤمنين إذا أعطوا الذي عليهم من الجزية شهد على ذلك خالد بن الوليد وعمرو بن العاص وعبدالرحمن بن عوف ومعاوية بن أبي سفيان.
Al-Ṭabarī, Annales (Leyde, 1964), I, an 15, 2405-6.
Au nom d’Allah, le Clément, le Miséricordieux! Ceci est ce qu’a octroyé le serviteur d’Allah, ʿUmar, Émir des Croyants aux gens d’Aelia (Jérusalem) en tant que sécurité (amān) ; il leur a octroyé la sécurité pour leurs personnes, leurs biens, leurs églises, leurs croix, aux malades comme aux valides, ainsi qu'à tous les membres de sa milla (peuple de Jérusalem) ; [il leur garantit] que leurs églises ne seront ni occupées ni démolies ni diminuées, et que ni les périmètres de ces églises ni les croix de ces églises ne seront raccourcis ; il en est de même de leurs biens qui ne seront pas touchés ; ils ne seront point contraints en la matière de leur religion ni ne souffriront de vexations. Nul des Juifs ne cohabitera à Jérusalem avec eux. Ils acquitteront la ğizya, à l’instar des Gens d’al-Madā’in. Ils leur incomberont d’expulser de la ville les Rūm (Byzantins) les brigands : celui qui en sortira jouira de la sécurité pour sa personne et ses biens jusqu’à ce qu’il arrive en lieu sûr ; mais celui qui, parmi eux, demeurera sur place sera tenu de ce à quoi sont tenus les gens de Jérusalem. Et ceux qui, parmi les gens de Jérusalem, aimeront accompagner eux-mêmes avec leurs biens, les Byzantins et quitter leurs cloîtres et leurs croix, jouiront de la sécurité jusqu’à ce qu’ils atteignent un lieu sûr (de leur choix). Et parmi les gens de la terre (les paysans) qui se trouvaient dans la ville avant que l'un deux ne fût tué, celui qui le voudra demeurera et alors il sera tenu de la même ğizya que les gens de Jérusalem ; et celui qui le voudra pourra suivre les Byzantins et celui qui le voudra pourra retourner à sa famille. Il ne sera rien pris d’eux jusqu'à ce que leur moisson ait été enlevée. Et sur ce que contient cet écrit l’engagement d’Allah est donné, sous la conscience de son Envoyé, la conscience des califes et la conscience des croyants, à condition qu’ils (les gens de Jérusalem) acquittent la ğizya. Ont été témoins de cela Khālīd b. al-Walīd, ʿAmru b. al-ʿĀṣ, ʿAbd Al-Raḥmān b. ʿAwf et Muʿāwiya b. Abī Sufyān. Et il (l'écrit) a été rédigé en l'an 15.
E. Rabbath, Les chrétiens dans l’islam des premiers temps. I. La conquête arabe sous les quatre premiers califes (11/632-40/661) (Beyrouth, 1985), 231-32.
Selon al-Ṭabarī (m. 310/923) qui le mentionne dans son Tārīkh, ce traité de paix fut établi par le calife ʿUmar I en personne à l’adresse des habitants de Jérusalem. Le document aurait été rédigé à al-Ğābiya en l’an 15 /636-37. Il garantit aux habitants la sécurité pour leurs personnes et leurs biens, la protection des églises et le libre exercice du culte. Il accorde également aux habitants la liberté de rester à Jérusalem ou de quitter la ville. En contrepartie, les chrétiens doivent acquitter une taxe (ğizya) et expulser les Byzantins et les voleurs.
Le présent traité suscite nombre d’interrogations qui concernent aussi bien son authenticité que son contenu. L’une d’elles porte sur l’interdiction faite aux juifs de vivre à Jérusalem. Pour beaucoup d’historiens, cette clause est sujette à caution et ce d’autant plus qu’une telle interdiction ne figure dans aucun des autres traités établis lors de la conquête musulmane. Partant de ce constat, Samuel D. Goitein considère le document comme une forgerie. De son côté, Milka Levy-Rubin propose d’analyser la stipulation relative aux juifs à la lumière des relations plutôt conflictuelles entre le judaïsme et le christianisme dans la ville sainte. Selon elle, la présence des juifs à Jérusalem représentait une menace pour les chrétiens. Il n’est donc pas exclu que ces derniers aient voulu saisir l’occasion qui leur offrait la prise de la ville par les musulmans pour interdire les juifs de sejour.
byzantins ; conquête ; Juifs/Judaïsme ; pacte ; ğizya
Adam Bishop : traduction
Notice n°238282, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait238282/.