Nom de la loi
Rogatio ? Sempronia sur l'utilisation du trésor d'Attale III, roi de Pergame
Date
133 av. J.-C.
Rogator
Ti. Sempronius Gracchus (RE 54)
Thèmes
Sources
Plut., Ti. Gr., 14, 1-2On ne peut malheureusement rien tirer de précis de Cic., Rep., 3, 41.
il n'est pas nécessaire de supposer une confusion entre Ti. et C. Gracchus chez Flor., 2, 3, 1-2 (cf. Fraccaro, Opuscula, II, 33).
Bibliographie
- Rotondi, LPR, 300-301
- Fraccaro, P., Studi sull'età dei Gracchi, Città di Castello, 1914, 131-134
- Earl, D.C., Tiberius Gracchus. A Study in Politics, Bruxelles, 1964, 92-95
- Astin, Scipio Aemilianus, 212 et 350-351
- Badian, E., « Tiberius Gracchus and the Roman Revolution », ANRW I, 1, 1972, 661-731, notamment 713-714
- Bernstein, A. H., Tiberius Sempronius Gracchus. Tradition and Apostasy, Ithaca et Londres, 1978, 207-209
- Stockton, Gracchi, 67-69
- Braund, D., « Royal Wills and Rome », PBSR 1983, 16-57, part. 21-3
- Berrendonner, C., Le Peuple et l’argent. Administration et représentations du Trésor Public dans la Rome républicaine (509-49 av. J.-C.), Rome, 2022, 340-342
Commentaire
Apprenant que le roi de Pergame venait de mourir en instituant comme héritier le peuple romain, Ti. Gracchus décida d'en tirer parti pour financer sa réforme agraire. Toutes nos sources parlent du trésor royal (pecunia regis, βασιλικὰ χρήματα), mais selon Plutarque il devait servir à donner aux bénéficiaires de la loi agraire les moyens de s'équiper et de commencer à exploiter leurs terres, selon l'épitomateur de Tite-Live cet argent devait éviter la colère de la plèbe, quand elle constaterait que les terres disponibles étaient moins importantes que ce que Gracchus avait fait espérer. Ces deux traditions ne sont pas aussi contradictoires qu'on l'a dit. Il n'est pas question, dans la Per. Liv., 58, 2-4 2. Promulgauit et aliam legem agrariam, qua sibi latius agrum patefaceret, ut idem triumuiri iudicarent, qua publicus ager, qua priuatus esset. 3. Deinde cum minus agri esset quam quod diuidi posset sine offensa etiam plebis, quoniam eos ad cupiditatem amplum modum sperandi incitauerat, legem se promulgaturum ostendit ut his, qui Sempronia lege agrum accipere deberent, pecunia quae regis Attali fuisset diuideretur. 4. Heredem autem populum Romanum reliquerat Attalus, rex Pergami, Eumenis filius. de remplacer les assignations agraires par des distributions d'argent, mais plutôt de compenser le fait que les lots seraient moins étendus que prévus (ut his qui Sempronia lege agrum accipere deberent [et non pas debuissent ] pecunia quae regis Attali fuisset diuideretur : cf. Fraccaro, 132 n. 1. Seuls l'auteur du Vir. ill., 64, 5 Dein tulit ut de ea pecunia, quae ex Attali hereditate erat, ageretur et populo diuideretur. et Oros., 5, 8, 4Ac tunc forte Attalus, Eumenis filius, moriens testamento populum Romanum imperio Asiae succedere heredem iusserat. Gracchus gratiam populi pretio adpetens legem tulit uti pecunia, quae fuisset Attali, populo distribueretur. Obsistente Nasica etiam Pompeius spopondit se Gracchum, cum primum magistratu abisset, accusaturum., parlent purement et simplement de distribuer l'argent au peuple, donnant peut-être un résumé du texte livien plus déformé que celui de la Periocha de Plutarque (Plut., Ti. Gr., 14, 1-21. Ἐπεὶ δὲ τοῦ Φιλομήτορος Ἀττάλου τελευτήσαντος Εὔδημος ὁ Περγαμηνὸς ἀνήνεγκε διαθήκην ἐν ᾗ κληρονόμος ἐγέγραπτο τοῦ βασιλέως ὁ Ῥωμαίων δῆμος, εὐθὺς ὁ Τιβέριος δημαγωγῶν εἰσήνεγκε νόμον ὅπως τὰ βασιλικὰ χρήματα κομισθέντα τοῖς τὴν χώραν διαλαγχάνουσι τῶν πολιτῶν ὑπάρχοι πρὸς κατασκευὴν καὶ γεωργίας ἀφορμήν.) est seul à ajouter que, s'agissant des cités de l'ancien royaume d'Attale, Ti. Gracchus avait affirmé qu'il n'appartenait pas au Sénat de délibérer, et qu'il ferait une proposition au peuple. Il est certain que les responsabilités traditionnelles du Sénat en ce qui concernait les finances et l'administration de l'empire se trouvaient ainsi contestées, et cela explique la violence des réactions que provoqua Tiberius. Braund a toutefois justement relevé que le peuple romain était l'héritier d'Attale, et que le tribun dut en tirer argument pour justifier le renvoi au peuple de toute décision en cette matière.
[La question des modalités juridiques d’acceptation du testament, par vote comitial ou par l’acte d’un magistrat, a été discutée : voir la mise au point de Berrendonner, qui remarque à juste titre que les sources ne font mention que de l’utilisation de l’utilisation du trésor royal, et non d’une procédure mise en œuvre pour l’accepter.]
Nous ne pas savons ce que Tiberius pensait proposer concernant les cités, et rien ne permet d'affirmer (avec Badian) qu'il ait eu l'intention de ne pas respecter le testament lorsqu'il accordait la liberté à certaines au moins d'entre elles (cf. pour Pergame, OGIS, 338, l. 3-5 [ἑπε]ὶ βασιλεὺς Ἄτταλος / Φιλομλήτορ καὶ Εὐεργέτη[ς μεθις]τάμενος ἐξ ἀν/θρῶπων ἀπολέλοιπεν τὴ[μ πατρί]δα ἡμῶν ἐλευθέραν. ; mais Per. Liv., 59, 3 Aristonicus, Eumenis regis filius, Asiam occupauit, cum testamento Attali regis legata populo R. libera esse deberet. ne suffit pas à prouver que toutes les cités auraient été libérées en vertu du testament : [Asia] libera, étant donné le contexte, y a plutôt le sens de « non soumise à un pouvoir royal »). Plutarque Plut., (Plut., Ti. Gr., 14, 1-21. Ἐπεὶ δὲ τοῦ Φιλομήτορος Ἀττάλου τελευτήσαντος Εὔδημος ὁ Περγαμηνὸς ἀνήνεγκε διαθήκην ἐν ᾗ κληρονόμος ἐγέγραπτο τοῦ βασιλέως ὁ Ῥωμαίων δῆμος, εὐθὺς ὁ Τιβέριος δημαγωγῶν εἰσήνεγκε νόμον ὅπως τὰ βασιλικὰ χρήματα κομισθέντα τοῖς τὴν χώραν διαλαγχάνουσι τῶν πολιτῶν ὑπάρχοι πρὸς κατασκευὴν καὶ γεωργίας ἀφορμήν.), de toute façon, distingue nettement le cas des cités, pour lequel Gracchus se contenta d'annoncer son intention d'en référer au peuple, et celui de l'argent, à propos duquel il aurait proposé une loi (εἰσήνεγκε νόμον ; de même (legem) tulit dans Vir. ill., 64, 5 Dein tulit ut de ea pecunia, quae ex Attali hereditate erat, ageretur et populo diuideretur. et Oros., 5, 8, 4Ac tunc forte Attalus, Eumenis filius, moriens testamento populum Romanum imperio Asiae succedere heredem iusserat. Gracchus gratiam populi pretio adpetens legem tulit uti pecunia, quae fuisset Attali, populo distribueretur. Obsistente Nasica etiam Pompeius spopondit se Gracchum, cum primum magistratu abisset, accusaturum.). L'auteur de la Per. Liv., 58, 2-4 2. Promulgauit et aliam legem agrariam, qua sibi latius agrum patefaceret, ut idem triumuiri iudicarent, qua publicus ager, qua priuatus esset. 3. Deinde cum minus agri esset quam quod diuidi posset sine offensa etiam plebis, quoniam eos ad cupiditatem amplum modum sperandi incitauerat, legem se promulgaturum ostendit ut his, qui Sempronia lege agrum accipere deberent, pecunia quae regis Attali fuisset diuideretur. 4. Heredem autem populum Romanum reliquerat Attalus, rex Pergami, Eumenis filius. en revanche, écrit seulement : legem se promulgaturum ostendit. Le problème est de savoir s'il y eut vote d'un pl. sc. (Astin), s'il n'y eut que la promulgation d'un projet que Tiberius n'aurait pas eu le temps de faire voter avant sa mort (c'est l'hypothèse la plus couramment acceptée : Rotondi, Badian, Bernstein, Stockton, entre autres) ou s'il n'y eut même pas promulgation, Tiberius s'étant contenté d'en manifester l'intention (Fraccaro, Earl). Une application immédiate était de toute façon impossible, puisque le trésor royal était resté à Pergame et qu'il ne fut envoyé à Rome que par M. Perperna en 130 (Iust., 36, 4, 9In huius locum missus Perpenna consul prima congressione Aristonicum superatum in potestatem suam redegit Attalicasque gazas, hereditarias populi Romani, nauibus inpositas Romam deportauit.). Mais aucun écho ne nous est parvenu de la controverse qui aurait dû renaître alors, et il est probable que, promulgué ou non, le projet n'avait pas été voté à la mort du tribun. Un s. c. ratifiant les actes d'Attale III, le s. c. Popillianum de Pergamenis (RDGE, 11 ; T. Drew-Bear, « Three senatus consulta concerning the province of Asia », Historia, 1972, 75-87 et Nouvelles Inscriptions de Phrygie, Zutphen, 1978, 1-8) fut adopté au plus tôt dans les derniers mois de 132, juste avant l'envoi en Asie d'un magistrat et d'une armée chargés de mettre fin aux prétentions d'Aristonicos - Eumène III (E. Badian, c. r. de J. Hopp, Untersuchungen zur Geschichte der letzten Attaliden, Munich, 1977, dans (JRS, 70, 1980, 202, et « Two notes on senatus consulta concerning Pergamum », LCM, 11, 1986, 14-5), sinon même après la fin de la guerre contre Aristonicos (Magie, RRAM, 1033-4 n. 1 ; E. S. Gruen, The Hellenistic World and the Coming of Rome, Berkeley, 1984, 603-4) : selon les restitutions que l'on adopte pour les l. 16-19 (RDGE, 11, l. 16-19ὅπως ταῦτ[α κύρια ἦι στρατη- /γο]ί τε οἱ εἰς Ἀσίαν πορευόμεν[οι μὴ κινῶσι τὴν δια-] / [θήκ( ?)ην, ἀλλὰ ἐῶσι κύρια μένειν, [ἃπαντα καθὼς ἡ σύνκλη-] / τος εἐπέκριν[εν].), il ratifie le testament lui-même ou renvoie à un précédent s. c. qui avait déjà dû le ratifier (voir la récente discussion de R. M. Kallet-Marx, Hegemony to Empire. The Development of the Roman Imperium in the East from 148 to 62 B.C., Berkeley, 1995, 101-108, 353-355), mais on n'y trouve en tout cas aucune référence à une ratification en vertu d'une loi Sempronia.
Comment citer cette notice
Jean-Louis Ferrary. "Rogatio ? Sempronia sur l'utilisation du trésor d'Attale III, roi de Pergame ", dans Lepor. Leges Populi Romani, sous la dir. de Jean-Louis Ferrary et de Philippe Moreau. [En ligne]. Paris:IRHT-TELMA, 2007. URL : http://www.cn-telma.fr/lepor/notice671/. Date de mise à jour :25/04/24 .