> Extrait

Lycophron, Alexandra, 688-693.

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Date du texte cité

IIIe siècle av. J.-C.

Précisions : (datation incertaine)

Texte (version originale)

ὅθεν Γιγάντων νῆσος ἡ μετάφρενον

θλάσασα καὶ Τυφῶνος ἀγρίου δέμας

φλογμῷ ζέουσα δέξεται μονόστολον.

ἐν ᾗ πιθήκων πάλμυς ἀφθίτων γένος

δύσμορφον εἰς κηκασμὸν ᾤκισεν τόσων,

οἳ μῶλον ὠρόθυναν ἐκγόνοις Κρόνου.

Traduction

Puis l'île qui écrase le dos des Géants et le corps du farouche Typhon, l'île que fait bouillonner la flamme recevra le voyageur solitaire, où le sultan des immortels établit l'espèce difforme des singes pour humilier tous ceux qui avaient fomenté une guerre contre les fils de Cronos.

Source de la traduction

traduction É. Prioux

Paraphrase/Commentaire sur le texte

Cassandre annonce qu’Ulysse ira, dans ses errances, à Ischia (Pithécusses) dont le nom est expliqué par une référence au mythe des Cercopes, transformés en singes pour les punir de leurs brigandages. Lycophron semble ici introduire une innovation en reliant cette légende avec celle des Géants que Zeus punit d’avoir voulu détrôner les Olympiens «fils de Cronos». Ce même passage introduit aussi un rapprochement entre Typhon et Ischia. Pindare (Pythiques, 1, 17-20) indique que le corps immense de Typhon est étendu sous la Sicile, l’Etna et les hauteurs qui dominent Cumes. La tradition qui fait mourir Typhon près de Naples était également connue de Phérécyde (voir schol. Ap. Rh. Arg. II, 1209-1215 - Apollonios, peut-être à la suite d’Hérodoros, situe pour sa part sa tombe à Nysa à la frontière entre Égypte et Syrie).

L’emploi d’une glôssa lydienne (palmus) pour désigner le «roi» des immortels qui punit ici Typhon et les Cercopes peut faire allusion aux liens entre Typhon et la Lydie. Que Typhon soit mentionné sous son nom, sans recherche de cryptage, en fait un cas assez exceptionnel dans l’Alexandra. Cette précision nous laisse entrevoir la diversité des traditions relatives aux Géants — diversité telle que Lycophron consent ici à préciser à ses lecteurs l’identité du Géant dont il parle.

Rédacteur du commentaire

É. Prioux

Indexation

Mot(s)-clé(s) :

gigantomachie; singe; île; géant

Commentaire iconographique 1

Commentaire

L'iconographie des Cercopes est limitée à leur capture par Héraclès qui les transporte, tels des animaux, attachés à un bâton. Ils ont généralement encore figure humaine, sauf sur des peintures de vase d'Italie méridionale qui pourraient évoquer, déjà, leur métamorphose en singes. Une péliké lucanienne (http://www.limc-france.fr/objet/14852) les montre, l'un doté d'oreilles animales et l'autre, semble-t-il, avec un visage de singe, et, sur un cratère apulien, ils sont représentés comme des figures simiesques en cage (http://www.limc-france.fr/objet/14851) Nous ne connaissons pas d'images d'Héraclès en compagnie des Cercopes postérieures au milieu du IVe s. av. J.-C.

Objet(s) et image(s)

http://www.limc-france.fr/objet/14852

http://www.limc-france.fr/objet/14851

Auteur du commentaire iconographique

N. Icard

Commentaire iconographique 2

Commentaire

Une oenochoé apulienne du British Museum (inv. F 237) en provenance de Canosa et datée de la fin du IVe s. av. J.-C. montre Zeus dans un quadrige guidé par Hermès poursuivant au-dessus des flots une créature anguipède. Zeus brandit son foudre tandis que le monstre, qui tourne le dos au quadrige, s’incline sous le poids d’un gros rocher qu’il tente de soulever à deux mains au-dessus de sa tête. Au-dessus du monstre, et faisant face à l’attelage, une tête boursouflée, aux oreilles pointues, crache du feu ou du vent. Les commentateurs de cette image y voient, les uns une représentation de la Gigantomachie, les autres le combat de Zeus contre Typhée. Tous considèrent que le monstre anguipède – Géant ou Typhée – se défend à l’aide du rocher. Mais son attitude, qui est celle d'un vaincu, et la présence des flots, avec lesquels se confondent déjà ses jambes anguipèdes, autorisent une autre lecture : le monstre est sur le point d’être écrasé sous le poids du rocher, et ce dernier représente une île (Ischia ou la Sicile) ; le monstre est donc bien Typhée. Quant au visage crachant feu ou vent, il représente les derniers soubresauts de la tempête cosmique déclenchée contre Zeus par la créature monstrueuse, à moins qu’il ne préfigure les vents violents nés du corps de Typhée écrasé (Hésiode, theog. 869-880). La version transmise par Apollodore (bibl. 1, 6, 3) précise qu’avant d’être foudroyé par Zeus et enseveli par lui sous l’Etna, Typhée avait immobilisé le dieu en lui coupant les tendons ; ces derniers furent remis en place par Hermès et c’est alors que Zeus, recouvrant sa force, s’élança sur son attelage et anéantit le monstre. Ainsi s’explique, sur l’image apulienne, la présence d’Hermès comme aurige de l’attelage divin.

Auteur du commentaire iconographique

P. Linant de Bellefonds

Comment citer cette notice

Texte n°880 dans CALLYTHEA [En ligne]; http://www.cn-telma.fr/callythea/extrait880/. Première version : 24/06/10. Date de mise à jour : 19/09/18

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