> Extrait

Apollonios de Rhodes, Argonautiques, 2, 468-489 Vian-Delage.

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Date du texte cité

IIIe siècle av. J.-C.

Texte (version originale)

"Ὠ φίλοι, οὐκ ἄρα πάντες ὑπέρβιοι ἄνδρες ἔασιν,

οὐδ' εὐεργεσίης ἀμνήμονες· ὡς καὶ ὅδ' ἀνὴρ

τοῖος ἐὼν δεῦρ' ἦλθεν, ἑὸν μόρον ὄφρα δαείη.

Εὖτε γὰρ οὖν ὡς πλεῖστα κάμοι καὶ πλεῖστα μογήσαι,

δὴ τότε μιν περιπολλὸν ἐπασσυτέρη βιότοιο

χρησμοσύνη τρύχεσκεν· ἐπ' ἤματι δ' ἦμαρ ὀρώρει

κύντερον, οὐδέ τις ἦεν ἀνάπνευσις μογέοντι.

Ἀλλ' ὅ γε πατρὸς ἑοῖο κακὴν τίνεσκεν ἀμοιβὴν

ἀμπλακίης. Ὁ γὰρ οἶος ἐν οὔρεσι δένδρεα τέμνων

δή ποθ' Ἁμαδρυάδος Νύμφης ἀθέριξε λιτάων,

ἥ μιν ὀδυρομένη ἀδινῷ μειλίσσετο μύθῳ,

μὴ ταμέειν πρέμνον δρυὸς ἥλικος, ᾗ ἔπι πουλὺν

αἰῶνα τρίβεσκε διηνεκές· αὐτὰρ ὁ τήν γε

ἀφραδέως ἔτμηξεν ἀγηνορίῃ νεότητος.

Τῷ δ' ἄρα νηκερδῆ νύμφη πόρεν οἶτον ὀπίσσω

αὐτῷ καὶ τεκέεσσιν. Ἔγωγε μέν, εὖτ' ἀφίκανεν,

ἀμπλακίην ἔγνων· βωμὸν δ' ἐκέλευσα καμόντα

Θυνιάδος Νύμφης, λωφήια ῥέξαι ἐπ' αὐτῷ

ἱερά, πατρῴην αἰτεύμενον αἶσαν ἀλύξαι.

Ἔνθ' ἐπεὶ ἔκφυγε κῆρα θεήλατον, οὔ ποτ' ἐμεῖο

ἐκλάθετ', οὐδ' ἀθέρισσε· μόλις δ' ἀέκοντα θύραζε

πέμπω, ἐπεὶ μέμονέν γε παρέμμεναι ἀσχαλόωντι."

Traduction

« O mes amis, certes tous les hommes ne sont pas violents et oublieux des bienfaits. Ainsi, cet homme-là n'est pas un ingrat : il vint ici pour connaître sa destinée; car plus il travaillait, plus il prenait de peine, et plus il lui était impossible de vivre, plus l'indigence le frappait à coups redoublés. À chaque jour mauvais un pire succédait, et le misérable ne pouvait reprendre haleine. Loin de là! Il payait la dure punition due par une faute de son père. Car cet homme, un jour qu'étant seul il coupait des arbres dans les montagnes, avait méprisé les prières d'une nymphe Hamadryade. Celle-ci, tout en larmes, avait essayé de l'attendrir par des paroles plaintives; elle lui demandait de ne pas couper le tronc d'un chêne qui avait son âge, dans lequel elle avait passé sans interruption un long espace de temps. Mais il coupa l'arbre, l'insensé! Telle est la folle arrogance de la jeunesse. Aussi, la nymphe envoya à lui et à ses enfants une calamité nuisible. Quand Paraibios vint vers moi, je devinai quelle avait été la faute de son père. Je lui recommandai d'élever un autel à la nymphe Thyniade, et d'y célébrer des sacrifices qui le délivreraient de ses maux, en la suppliant de détourner de lui le sort paternel. Depuis qu'il a échappé au malheur envoyé par les dieux, il ne m'a ni oublié, ni négligé; et c'est avec difficulté et malgré lui que je le congédie, car il persévère à m'assister dans mon affliction. »

Source de la traduction

Traduction De La Ville de Mirmont

Paraphrase/Commentaire sur le texte

Phinée raconte aux Argonautes l'histoire de Paraibios. Ce personnage n'a pas été inventé par Apollonios : peut-être l'a-t-il emprunté à une tragédie. Le scholiaste à Apollonios indique que dans d'autres versions il est donné comme un esclave de Phinée.

L'histoire de ce Paraibios rappelle les malédictions familiales typiques de la mythologie. Le père est un impudent et un orgueilleux qui ne respecte pas les demandes de divinités sylvestres. C'est sur son fils Paraibios que s'abat la vengeance divine. Phinée lui indique d'accomplir un sacrifice expiatoire : Paraibios lui témoigne une grande reconnaissance.

Cette histoire rappelle celle d'Érysichthon telle qu'elle est rapportée par Callimaque, Hymne à Déméter, vers 31-65. Mais chez Callimaque c'est à la déesse Déméter que s'en prend l'impudent qui est lui même châtié (ici le père reste anonyme). Chez Apollonios on peut se demander si la Nymphe meurt (les nymphes ne sont pas éternelles en effet) en même temps que l'arbre coupé. En tout cas, le sacrifice accompli, en même temps qu'il libère Paraibios de la faute de son père, institue un culte à cette Nymphe.

Rédacteur du commentaire

C. Cusset

Indexation

Thèmes(s):

Paraibios

Ethnique(s):

Thynien

Commentaire iconographique 1

Commentaire

Paraibios était le serviteur ou l'ami de Phinée, aussi a-t-on parfois été tenté de le reconnaître à ses côtés, par exemple dans le jeune homme qui, debout derrière le trône de Phinée, brandit deux lances (cratère attique à figures rouges, Paris, Louvre MNC 478 = G 364; vers 460 av. J.-C., LIMC s.v. "Boreadai" n° 18; "Paraibios" n°1), ou dans l'homme barbu, en costume oriental, armé d'une lance, qui regarde le vieux roi délivré par les Boréades (cratère à volutes lucanien, Ruvo, Mus. Jatta J 1095; vers 410 av. J.-C. : http://www.limc-france.fr/objet/14770).

Objet(s) et image(s)

http://www.limc-france.fr/objet/14770

Auteur du commentaire iconographique

N. Icard

Comment citer cette notice

Texte n°70991 dans CALLYTHEA [En ligne]; http://www.cn-telma.fr/callythea/extrait70991/. Première version : 23/03/11. Date de mise à jour : 17/10/12

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